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5. Le Front de gauche

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    Publié à 2 avr. 2015, 00:32 par Jean-Pierre Rissoan
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    Publié à 7 juil. 2011, 06:29 par Jean-Pierre Rissoan
  • MELENCHON ET LA RESISTANCE … Hier soir, place des Martyrs de Stalingrad, à Paris, station de métro J. Jaurès, se tenait le premier meeting de campagne du candidat Mélenchon. Les caméras de la chaîne LCP ...
    Publié à 26 juil. 2011, 13:41 par Jean-Pierre Rissoan
  • B. Claude Mazauric, P.C.F., Mélenchon, la matière et l’anti-matière…   27/04/2011  Parlons maintenant de Jean-Luc Mélenchon. Je tiens que Jean-Luc Mélenchon est notre meilleure figure de proue commune dans la première partie, "présidentielle ",  de cette bataille ...
    Publié à 2 juil. 2011, 01:37 par Jean-Pierre Rissoan
  • Claude Mazauric, P.C.F., Mélenchon, la matière et l’anti-matière…   26/04/2011  Je publie aujourd’hui de larges extraits d’un texte de Claude Mazauric qu’il intitule sobrement : 2012. Claude Mazauric appartient à la lignée des grands historiens ...
    Publié à 6 sept. 2016, 02:14 par Jean-Pierre Rissoan
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Le Front de Gauche : le quatrième état qui se lève… le vrai rapport de force à gauche au premier tour des départementales

publié le 1 avr. 2015, 08:34 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 2 avr. 2015, 00:32 ]

    A la suite du journal Le Monde dont l’influence est grande dans les rédactions, les journaux ont parlé du nouveau tripartisme qui caractériserait la vie politique française aujourd’hui : la droite, la gauche -sous entendu le PS- et le Front National. Le front de Gauche ? le PCF ? les 11,5% de 2012 ? aux oubliettes. Il est vrai que M. Valls avait donné le la : la gauche est divisée et c’est là les raisons de son échec. Le Monde lui-même donne les résultats électoraux en distinguant les binômes investis par le FDG (PCF + PG), les binômes PCF, les Binômes PG, les binômes PS-UDG (union de la gauche) investis par le PS et au moins un autre parti de gauche (EELV, PRG, PCF, PG) sans oublier les binômes PS, bien sûr, ni les binômes extrême-gauche, ou les binômes divers-gauche : ceux notamment investis par "plusieurs partis de gauche mais pas par le PS" -sic-.

    On a pu voir dans ces conditions et sur ordre du ministère de l’Intérieur, des résultats en bâtonnets où le PS et autres font bonne figure face à la droite et au FN alors que le FDG n’avait que de misérables 5 ou 6%, le PC avec 1,5% etc… Quantité négligeable donc, d’où la fable du tripartisme.

    Le Parti Communiste avait prévenu, dès avant le premier tour, que ce tour de passe-passe de Valls pouvait défigurer la lecture des résultats au soir du 1er tour. Il a effectué ses propres calculs et arrive à un pourcentage de 9,4%.

Le Front de gauche réalise un score de 9,4 % au niveau national. [1] "Dans un communiqué, le PCF annonce un résultat en progrès du Front de gauche aux élections départementales à 9,4% des suffrages exprimés. La totalisation des résultats publiés ce matin par le ministère de l'Intérieur rend volontairement illisibles les scores des candidates et candidats présenté-e-s et soutenu-e-s par le PCF et le Front de gauche, avec dans de nombreux cantons un large rassemblement de forces de gauche et écologistes. La réalité de ces totalisations est la suivante : les listes soutenues par notre rassemblement réalisent un score de 9,4 % au niveau national. Le PCF avec le Front de gauche fait plus que résister, il progresse par rapport aux élections départementales de 2008 et 2011. Ces résultats sont un encouragement à poursuivre le travail de rassemblement et d'espoir pour une autre politique à gauche. (...)".

Mais dira-t-on, c’est de la propagande communiste as usual. Heureusement, l’honnêteté est un bien partagé, pas par tous mais partagé tout de même. Ainsi le quotidien virtuel MEDIAPART publie un dossier intitulé Départementales : le vrai rapport de force à gauche au premier tour où il est dit :

"Un groupe de chercheurs a "recodé" les résultats des départementales pour donner une vision plus détaillée du premier tour. Notamment à gauche, où ce recomptage fait apparaître que les candidats soutenus par le PS ont obtenu 24,7 % des suffrages exprimés, et la "gauche autonome" 10,1 %.Quel est l'état réel des rapports de force à gauche après le premier tour des départementales ? Les résultats officiels communiqués par le ministère de l'intérieur n'ont permis de répondre qu'en partie à la question".

 

Voici la teneur de la substantifique moelle du dossier :

 

    "En cause, la non-mention du nombre de cantons où tel ou tel parti était candidat – les écologistes sont ainsi crédités d'un très modeste 2 % au niveau national, alors qu'ils n'étaient candidats que dans 377 cantons sur 2 000, où ils ont réalisé en moyenne près de 10 % des suffrages exprimés.

    Mais c'est surtout l'étiquetage des binômes candidats choisi par le ministère de l'intérieur pour ces élections, qui est remis en doute. Le PS a ainsi choisi d'additionner à son score (13% des suffrages exprimés) les 8 % d'"union de la gauche", fourre-tout regroupant des binômes soutenus par lui. Le soir du premier tour, le premier secrétaire du PS parlait ainsi de "25 %" pour le PS. Le lendemain, le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, invité de BFM-TV, évoquait même « 28,8 % » pour le "PS et ses alliés" – un résultat très flatteur, qui englobe aussi les "divers gauche". Un bloc crédité de 6,79% qui regroupe en réalité toutes sortes d'alliances, à commencer par les binômes EELV-Front de gauche qui ont réalisé de gros scores dans certains centres urbains. Autant de résultats invisibles dans la nomenclature choisie par le ministère. À Grenoble par exemple, le binôme PS-PRG sans le PCF a été codé "union de la gauche" par le ministère de l'intérieur, tandis que l'alliance EELV-PG-Nouvelle Donne a été estampillée "divers gauche".

    Ces scores ont permis au PS d'affirmer qu'il résistait bien et qu'il n'y avait pas de dynamique sur sa gauche : cumulés, les scores des binômes "Front de gauche" (4,72 %), "Parti de gauche" (0,06 %) et "PCF" (1,32 %) ont à peine dépassé les 6 %. Le Front de gauche a dénoncé un "tripatouillage des étiquettes" destiné à " réduire son score" et à "effacer les rassemblements opérés notamment avec EELV et/ou des citoyens".

    À droite, les problèmes d'étiquetage se posent peu. Pour l'essentiel, l'UMP et l'UDI sont parties unies. Quant au FN, il n'avait pas d'alliés et s'est présenté partout sur son propre nom. À gauche, en revanche, ils masquent les rapports de force réels. Selon plusieurs spécialistes des élections et chercheurs réunis au sein du réseau Futur des études électorales (FEEL) de l’Association française de science politique, le "nuancier" du ministère de l'intérieur, qui "repose sur un ensemble de choix discutables", est "insatisfaisant pour avoir une vision précise des rapports de force électoraux nationaux car il ne permet pas de rendre compte de l’ensemble des stratégies d’alliances entre les partis. Et ce d’autant que l’instauration d’un scrutin binominal offre des possibilités importantes d’alliances"[2]. "Pour ces élections départementales", poursuivent-ils dans une note publiée sur le blog slowpolitix, "la problématique principale concerne la gauche, compte tenu de la forte fragmentation de ses candidats et les logiques différenciées d’alliances entre ses diverses composantes. Or c’est à gauche qu’il existe un enjeu à comparer les résultats des forces politiques puisque de nombreuses organisations (PCF, PG, EELV, etc.) cherchent à concurrencer la position nationale dominante du PS". Sur la base du fichier officiel des résultats, la vingtaine de membres du réseau ont mis leurs efforts en commun pour "recoder" l'ensemble des binômes.

    Leurs conclusions ne bouleversent pas la lecture que l'on peut faire du scrutin. Ainsi, le total toutes gauches-toutes droites reste égal, et le score du FN est le même. Mais ce calcul, qui est accompagné d'une mention de l'offre "réelle" (le nombre de cantons où chacune des différentes combinaisons politiques était proposée), a le mérite de donner une meilleure idée de la dynamique des deux grands blocs de gauche. Il est ainsi possible de mesurer plus objectivement le score de ce que Simon Labouret, un des chercheurs qui a participé à ce travail, nomme le "bloc gouvernemental" [3] : les binômes PS ou d'alliances avec le PS (PS-PRG, PS-PCF, PS-EELV, PS-PCF-EELV). Au total, ce bloc est crédité de 24,7 % des suffrages exprimés, dont 4,6 % pour les binômes constitués par le PS avec EELV et le PCF, deux partis qui ne sont pas au gouvernement. C'est bien moins que les estimations avancées par Stéphane Le Foll. Et moins que le Front national.

    "Le score du PS est meilleur qu'aux européennes et il a résisté à certains endroits, là où les notabilités locales étaient fortes, explique Simon Labouret, membre du FEEL et assistant de recherche au Centre d'études européennes de Sciences Po. On peut penser par ailleurs que la stratégie de la peur du FN adoptée par Manuel Valls a eu pour effet de polariser les voix sur le candidat socialiste, plus que sur d'autres offres". Une tactique payante au premier tour, donc, mais qui risque de l'être beaucoup moins au second. "On peut s'attendre à des reports très mauvais de la droite sur le PS. D'autant que les électeurs du Front national ont été très stigmatisés par le PS et auront du mal à voter pour lui".

    La "gauche autonome" du PS (Front de gauche, Front de gauche-EELV, EELV), elle, peut être évaluée à 10,2% : 5,5% pour les binômes Front de gauche (investis par le PCF ou le PG), présents dans la moitié des cantons ; 2,8% pour l'alliance écologiste-Front de gauche, présente dans moins d'un quart des cantons ; et 1,9% pour EELV, présent dans 32 cantons. Le "recodage" permet de donner d'autres clés de lectures. Ainsi, les binômes soutenus par le PCF, présents dans trois cantons sur quatre, obtiennent 9,4 % des suffrages exprimés. Les binômes soutenus par EELV ne sont présents que dans la moitié des cantons mais réalisent un score presque équivalent, 8 %.

    Pour Simon Labouret, la classification du ministère de l'intérieur a "sa logique" : "produire des résultats rapidement", qui n'est pas celle des commentateurs ou des politologues. Mais le chercheur décèle quand même aussi dans cet étiquetage contesté "un problème de routine administrative". "Il a fallu un ou deux ans au ministère pour prendre en compte la réalité électorale du Front de gauche, c'est la même chose qui se passe aujourd'hui avec les alliances entre, par exemple, le parti de Gauche et EELV" », dit Simon Labouret. Les chercheurs du groupe FEEL "regrettent" aussi certains "choix" opérés. "Par exemple, considérer que l'union de la gauche, c'est le PS et le PRG, cela relève d'une vision assez embuée", poursuit-il. "Nous aimerions qu'il y ait plus de réactivité dans l'évolution de l'offre électorale, parfois moins de conservatisme dans certains choix, et proposons d'intensifier les liens entre les chercheurs et le ministère".

    Fin de citation.  

    Vous pouvez donc vous fier à cette carte électorale du Front-de-gauche qui se présente ainsi - en regrettant que l’unité de base soit le département et non le canton, ce qui eût donné une configuration plus proche du réel -.

 

et les élus :

source : cartes élaborées par l'Humanité.

[2] En effet, chaque membre du binôme ayant droit à un suppléant, pas moins de quatre noms figurent sur le bulletin de vote. Quatre partis peuvent donc être représentés.

[3] Je rejette totalement cette qualification de bloc gouvernemental pour un binôme PS-PCF mis en place exclusivement parce que la menace FN était immédiate. Le candidat PCF n’approuvait en rien la politique de Valls-Hollande en constituant ce bloc républicain avec son voisin socialiste.

La dépêche d’Ems de l’agence France-Presse

publié le 25 mars 2013, 07:32 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 27 mars 2013, 14:45 ]

    Tout est parti d’un mauvais travail de l’AFP et des journalistes clients de l’AFP qui n’ont pas fait leur travail de vérification des sources.

Katell PRIGENT (AFP) – Il y a 1 jour  (soit le 24 mars, JPR)

BORDEAUX — "Qu'ils dégagent tous", "salopards", "échec du gouvernement"... le vocabulaire utilisé samedi lors du 3e Congrès, à Bordeaux, du Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon a traduit une radicalisation provoquant de vifs débats avec le PS.

Durant ces assises qui s'achèvent dimanche, et qui ont été largement dirigées contre les "politiques d'austérité" du gouvernement et de l'Europe, les dirigeants du PG s'en sont en particulier pris au ministre de l'Economie Pierre Moscovici provocant un échange acerbe avec le PS.

François Delapierre, secrétaire national, a dénoncé "les 17 salopards de l'Europe" faisant référence à l'attitude des 17 gouvernements de la zone euro à l'égard de Chypre. Dans ces 17 salopards, il y a un Français, il a un nom, il a une adresse, il s'appelle Pierre Moscovici et il est membre du Parti socialiste", a-t-il dit vivement applaudi par les 800 délégués.

"Une très belle expression", dit en souriant aux journalistes Jean-Luc Mélenchon, en qualifiant le ministre de "petit intelligent qui a fait l'ENA" et qui "ne pense pas français, qui pense finance internationale".

Ces propos ont été qualifiés "d'inacceptables" par le 1er secrétaire du PS, Harlem Désir, qui a demandé à M. Mélenchon de les "retirer". "C'est un vocabulaire des années 30 que l'on ne pensait plus entendre de la bouche d'un républicain et encore moins d'un dirigeant de gauche", a dit M. Désir à l'AFP.

"Une diversion, à la méthode socialiste habituelle : insulter et insinuer plutôt que de répondre sur le fond", a répondu Jean-Luc Mélenchon. Harlem Désir "ferait bien de nous dire ce que pense le PS du vote des ministres français sur Chypre", a-t-il ajouté. (…).

        Copyright © 2013 AFP. Tous droits réservés [1].

 

    Dans POLITIS du 24 mars 2013,  Michel Soudais donne la "retranscription fidèle (…) des propos de Mélenchon" et donne à entendre la bande sono : http://www.politis.fr/Ce-qu-a-VRAIMENT-dit-Melenchon,21436.html

        JLM : « Le fond de l’affaire est le suivant, qu’a fait le Français dans la réunion ? Il s’est pris pour un petit intelligent, économique, vachement responsable, qu’a fait des études à l’ENA, qui sait comment on doit organiser la rectification des comptes d’une nation, gna gna gnagna gna gna gna… Ben va dans une administration, tu représentes pas le peuple français quand tu fais ça ! Il faut dire : « Non, pas question. Je refuse. Je ne suis pas d’accord. » Pourquoi ? Pas en se disant « les Grecs, je sais pas quoi », mais en se disant « mais demain c’est moi ». Comment le même homme demain à la même table si on lui dit « mais M. Moscovici vous n’avez pas fait ci, vous n’avez pas fait ça, vous avez accepté telles dépenses sociales et tout… » Comment il va pouvoir dire « non » vu qu’il a déjà dit « oui » pour les chypriotes ? Donc il se met dans leurs mains. Donc c’est un comportement irresponsable. Ou plus exactement c’est un comportement de quelqu’un qui ne pense plus en français… qui pense dans la langue de la finance internationale. Voilà. ».

     Voilà comme l’on passe de "c’est un comportement de quelqu’un qui ne pense plus en français… qui pense dans la langue de la finance internationale" à quelqu’un qui "ne pense pas français, qui pense finance internationale". Et c’est journaliste à l’AFP. Et c’est une dépêche de l’AFP. Et c’est la matière première de tous les journalistes qui reprennent en boucle cette affirmation sans la vérifier. Vérifier ses infos ? Allons donc ! Autrefois, oui, mais maintenant…

     Si l’on dit que Barroso ou Mario Draghi ne pensent pas portugais pour l’un, italien pour le suivant mais pensent finance internationale, où est l’insulte ? C’est une opinion et j’ai tendance à penser que c’est même une vérité. Si on dit la même chose pour Moscovici c’est de l’antisémitisme ! Même si on ignore que celui-ci est d’origine juive et semble-t-il de confession juive. Comment savoir ?

    Mais, de toute façon, le problème n’est plus là. Le problème est que Jean-Luc Mélenchon N’A PAS PRONONCE CES PAROLES QUE LUI PRÊTE L’AFP…

    Il y a une différence -selon moi minime - entre ne plus penser en français et ne plus penser français. les esprits les plus tordus exagèrent cette différence en interprétant de la façon suivante : Dans le premier cas, on n’utilise plus l’ensemble de codes que représente la langue française, on utilise une autre langue, un autre langage : celui de la finance internationale, langage qui véhicule un autre esprit, une autre mentalité. Dans le second cas, on ne pense plus en tant que Français, on ne pense plus comme devrait penser un Français banal, un Français comme tout le monde, on pense en étranger… C’est ce qu’a compris Harlem Désir dont l’intelligence a frappé tous les esprits depuis qu’il sévit au PS. Et c’est ce qu’on comprit tous les malfaiteurs dont Moscovici lui-même, Valls, Copé, Nathalie Kosciusko-Morizet, l’inévitable Elkabbach et tant d’autres dont l’inévitable PROGRÈS de Lyon qui, dans son édition du 25 mars publie un article non signé -donc issu du texte des agences- alors que depuis le 24, il avait le temps de vérifier ses sources. Même la page d’accueil d’Orange -chef-d’œuvre perpétuel d’âneries et de turpitudes politiques - y est allé d’abondance mais, à l’heure où j’écris ces lignes, tout a disparu. La vérité a éclaté, et tous ces gens sont ridiculisés et devraient porter un bonnet d’âne. Même l’horrible Apathie.  

    Tout fut bon pour accuser Jean-Luc Mélenchon d’antisémitisme. Union sacré UMPS contre le leader du Front de Gauche.   

    Tout cela confirme à quel point le Front de Gauche fait peur. Tous les moyens sont bons, comme disait Maurras de l’Action français, pour l’abattre…

 

La dépêche d’Ems, facteur déclenchant de la guerre de 1870

 

    Cela se passe en juillet 1870. Il est fortement question qu’un prince Hohenzollern se pose sur le trône d’Espagne, si bien que la France serait prise en tenaille puisque la Prusse est déjà frontalière au niveau de la Moselle. La France exige que cette candidature soit retirée. Ce qui fut. Mais elle veut plus. Elle veut que le roi de Prusse en personne écrive qu’à tout jamais il n’y aura plus de candidature Hohenzollern au trône d’Espagne. Notre ambassadeur va voir Guillaume 1er en cure à Ems près de Coblence. Et manifestement se montre un peu trop insistant. Le roi écrit à Bismarck et celui-ci s’adresse à la presse.

Voici les deux textes, le texte reçu et le texte publié par Bismarck

    1. - Dépêche reçue par Bismarck (envoyée de la part du roi par son confident Abeken) "Sa Majesté le roi m'écrit : "Le comte Benedetti -ambassadeur de France) s'est cramponné à moi à la promenade et m'a demandé, d'un ton à la fin très insistant que je lui donnasse l'autorisation de télégraphier immédiatement que je prenais à tout jamais l'engagement de ne plus consentir à la candidature Hohenzollern, si elle venait à se reproduire. Je finis par le rembarrer avec quelque sévérité. Je lui dis qu'on ne pouvait ni ne devait prendre de tels engagement à tout jamais. Naturellement je lui fis savoir que je n'avais encore aucune nouvelle et qu'étant plus rapidement informé que moi, par la voie de Paris et de Madrid, il voyait bien que mon gouvernement était une fois de plus hors de cause". Sa Majesté a reçu depuis une lettre du prince [Antoine de Hohenzollern, père du candidat au trône vacant d’Espagne, qui annonce que son fils renonce au trône espagnol, JPR]. Or, ayant dit au comte Benedetti qu'elle attendait des nouvelles du prince, elle a pris deux décisions : 1° sur mon rapport et celui du comte Eulenbourg, S. M. a décidé de ne plus recevoir le comte Benedetti, touchant la question de l'engagement précité ; mais, 2° de lui faire savoir par un aide de camp qu'elle avait reçu confirmation par le prince, de la nouvelle que Benedetti tenait de Paris que S. M. n'avait rien à lui dire de plus. - S. M. fait Votre Excellence juge de la question de savoir si la nouvelle exigence de Benedetti et le refus qui y a été opposé ne devraient pas être immédiatement communiqués à nos ambassadeurs et à la presse". (Trad. dans ANDLER, Le prince de Bismarck).

 

    2. - Dépêche publiée par Bismarck : "La nouvelle du renoncement du prince héritier de Hohenzollern a été officiellement communiquée au gouvernement impérial français par le gouvernement royal espagnol. Depuis, l'ambassadeur français a encore adressé à Ems, à S. M. le Roi, la demande de l'autoriser à télégraphier à Paris que S. M. le Roi, à tout jamais, s'engageait à ne plus donner son consentement, si les Hohenzollern devaient revenir à leur candidature. S. M. le Roi là-dessus a refusé de recevoir encore l'ambassadeur français et lui a fait dire par l'aide de camp de service que S. M. n'avait plus rien à communiquer à l'ambassadeur". (Trad. dans MATTER, ouvr. cité, t. I).

On notera que le roi n'avait nullement permis de divulguer son refus de recevoir l’ambassadeur. Mais "ce texte", dit Bismarck à von Moltke, "produira sur le taureau gaulois l’effet du chiffon rouge".

Mais les journalistes de l’AFP ne savent plus ce qu’est la dépêche d’Ems. Cela n’empêche pas Katell Prigent de jouer à Bismarck. Si elle le connaît bien sûr.

Le chiffon rouge a fait réagir tous les anti-Front de Gauche de France et de Navarre, taureaux sauvages dès que se lève le quatrième état.  

 

Pierre LAURENT, " refonder la République " !

publié le 18 déc. 2012, 14:24 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 19 déc. 2012, 12:10 ]

A Marseille, Pierre Laurent lance un appel à refonder la République

« Refonder la République - reconquérir la liberté, reconstruire l'égalité des droits et refonder la fraternité »,

vous trouverez ci-dessous le discours prononcé par Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, à Marseille le 15 décembre 2012 à l'occasion de l'initiative du PCF sur la République.

 

 

Seul le prononcé fait foi

 

 

Mesdames et messieurs,

Chers amis, chers camarades,

Nous sommes réunis ici, dans cette belle et grande ville populaire de Marseille, pour lancer un appel.

Oui, ici en 2012, 220 ans après la proclamation de la République, nous le clamons haut et fort : la République, notre République, est à refonder. Oui, la République, celle qui clame sur ses frontons « Liberté, Egalité, Fraternité », celle qui ne reconnaît que la souveraineté populaire, doit reprendre le combat. Parce qu'elle est abîmée, défigurée, salie. Abîmée par l'indécence des inégalités et la violence des discriminations ; défigurée par l'arrogance des pouvoirs de l'argent, le poison des divisions et des concurrences à outrance ; salie par le racisme banalisé du Front national et d'une partie grandissante de l'UMP. Les mots ne suffisent plus. La République n'est pas un drapeau dans lequel il fait bon se blottir si c'est pour, aussitôt après, s'essuyer les pieds sur ses valeurs comme sur un paillasson. La République a toujours été un combat. La France a progressé et rayonné dans le monde chaque fois qu'elle s'est hissée au devant de ses valeurs fondatrices. Elle s'est déshonorée chaque fois qu'en son nom, ces valeurs ont été trahies. La République n'est elle-même que quand elle fait vivre au quotidien, concrètement, ses principes de liberté, d'égalité et de fraternité. Et aujourd'hui, en 2012, nous le disons, le combat doit reprendre, vite et fort, avant que la République ne s'abîme un peu plus encore. Une nouvelle page doit s'écrire, que nous baptisons VIe République.

 

*

 

C'est aux volontaires marseillais, partis en juillet 1792 de la rue Thubaneau à Marseille pour marcher sur Paris, que fut distribué un tiré-à-part avec les paroles de l'hymne écrit par Rouget de l'Isle. Cela faisait deux ans déjà que les révolutionnaires diffusaient la devise « Liberté, Egalité, Fraternité » depuis que Robespierre en avait fait la proposition dans son Discours sur l'organisation des gardes nationales. « Liberté, égalité, fraternité », la devise nationale mettrait encore du temps à s'imposer officiellement définitivement mais depuis lors, elle n'a jamais plus quitté l'imaginaire républicain de notre nation. On n'a rien fait de plus révolutionnaire depuis. Qu'un peuple, qu'une nation décrète l'abolition des privilèges, proclame que « tous les hommes naissent libres et égaux en droits », et en fasse sa loi suprême, on n'a rien fait de plus révolutionnaire depuis. Ces trois mots, inscrits au fronton de nos mairies, de nos écoles, ces trois mots sont les piliers de la France, du pays qui nous unit, de chaque femme, de chaque homme, né ici, et de chaque femme, de chaque homme qui choisit notre pays pour y vivre, qui le choisit pour nation. On n'a rien fait de plus révolutionnaire depuis. Il n'est pas donc étonnant qu'il ait toujours fallu se battre pour que ces mots passent de nos frontons à la réalité. Les privilégiés, hier ceux de l'Ancien régime, aujourd'hui les nouveaux aristocrates de la finance, ne s'y sont jamais résolus. Ils n'ont jamais cessé, pour entraver ces principes, d'en limiter la portée, de diviser, d'opposer, de discriminer, de séparer, de hiérarchiser, de mettre en concurrence les individus entre eux.

Nous voulons une société d'individus librement associés, solidaires et égaux en droits. Eux défendent une société d'exploitation de l'homme par l'homme. Jean Jaurès ne s'était pas trompé sur la portée historique de l'invention républicaine, lui qui qualifiait la République proclamée en 1792 de « sublime nouveauté du monde ». « Que ce peuple, écrit le fondateur de l'Humanité, où il n'y avait pas d'esclaves, où il n'y avait pas de serfs et où, depuis le 10 août, tous les citoyens étaient égaux, s'élevât à la République, et qu'il devînt, vraiment, tout entier, dans tous ses éléments, un peuple de rois, voilà [...] la grande nouveauté et la grande audace ». Aujourd'hui à nouveau, mes amis, mes camarades, il faut pousser les privilégiés vers la porte. Notre République souffre trop. L'heure de l'audace, celle de l'égalité, a de nouveau sonné. Car à toutes celles et à tous ceux qui s'interrogent, et qui devant ce spectacle d'injustices qui n'en finit pas, se demandent : « Sommes nous impuissants ? » Je réponds avec conviction : « Non, nous ne sommes pas impuissants mais divisés ». Ce n'est pas du tout la même chose. Et tant que nous sommes divisés, les privilégiés règnent. Ils nous isolent, ils nous opposent. Et la division des exploités, des dominés c'est leur force. Comment s'y prennent-ils pour entretenir et développer ce climat de division ? Tout est fait pour que chaque être humain se sente plongé dans un climat permanent d'insécurité sociale, culturelle, existentielle.

 

Chacun de nous se sent menacé. Désormais, un Français sur deux se déclare pauvre ou pense qu'il peut le devenir.Il y a des milliards qui vont et viennent d'un bout de la planète à l'autre par de simples clics informatiques comme si le monde se réduisait à une gigantesque caisse enregistreuse. C'est nous, par notre travail, qui mettons cet argent en caisse, mais nous n'en tirons aucun bénéfice. Des millions d'entre nous, de plus en plus nombreux, ont le sentiment de vivre en sursis. Qui n'a ressenti au moins une fois qu'à tout moment, qu'au moindre coup dur, tout est compromis, qu'on peut tout perdre, que l'avenir est bouché, que la situation nous échappe. Certains en viennent à se dire qu'ils s'en tireraient bien mieux tout seuls en la « jouant perso » puisque, maintenant, dans la vie comme dans le commerce, on dirait qu'il faut éliminer les concurrents pour s'en tirer, car il n'y a pas de place pour tous. Le matraquage sur l'austérité, sur la compétitivité, qui ignorent toutes ces fortunes capitalistes qui se gavent sur notre travail, est leur arme de division massive. Chacun est renvoyé à lui-même. Eduquer ses enfants, se soigner, se loger, si vous n'en avez pas les moyens, c'est tant pis pour vous, c'est chacun pour soi. Chaque jour, chacun pense devoir, pour s'en sortir, affronter l'humanité entière et croit que personne ne sait qu'il existe, que personne ne se soucie de lui.

Divisés, nous sommes dominés. Dominés parce qu'empêchés de décider par nous-mêmes, dominés parce que soumis au chantage, réduits au silence le jour un plan « social » s'abat. Dominés parce qu'entravés en permanence de choisir sa vie, ses études, son lieu d'habitation, le sens de son travail. Dominés parce que sous-payés parce qu'on est une femme, un jeune, un immigré, et qu'en 2012, cela suffit encore pour nous traiter en salarié ou en citoyen de seconde zone. Oui, tant que nous sommes divisés, ils règnent.

La violence de cette société est partout. Celles et ceux eux qui souffrent le plus, ont honte, se taisent, rasent les murs. Quand on n'est pas encore tombé, on préfère prendre ses distances pour se protéger, dès que possible aller vivre ailleurs, un peu plus loin, pour échapper au malheur, quitter la grande ville et ses solitudes, quitter la banlieue et la stigmatisation. On en vient à avoir peur de ses semblables en croyant se protéger des difficultés qui nous frappent tous. En vérité, la République est malade de la violence du fric, malade de la loi du plus fort, malade de la précarité généralisée et du chacun pour soi. Tous les jours, on assigne les gens à leurs difficultés quotidiennes comme si la violence du monde leur tombait dessus sans que personne ne puisse lui faire face. Mais c'est le système du fric, et ses valeurs de compétition et de concurrence qui opposent et tuent nos solidarités. Au royaume du capitalisme, l'égoïsme des intérêts est roi.

Quand Mittal, le financier de l'acier, dispose à lui seul du pouvoir de vie ou de mort sur la sidérurgie nationale, à Fos, à Florange ou ailleurs, et qu'il continue sans vergogne d'empocher crédits d'impôts et aides publiques, qu'il impose sa loi au nouveau gouvernement, c'est que quelque chose ne tourne plus rond dans la République. Quand les actionnaires et les marchés financiers nous font la leçon tous les jours sur les dépenses publiques, et qu'en réalité le taux de perception réel de l'impôt sur les sociétés est constaté à 28 % pour la moyenne des entreprises, mais à seulement à 13 % pour les grandes entreprises et à 8 % pour celles du CAC 40, la République n'est plus tout à fait la République. Car en République, ce n'est pas à celui qui a le moins de contribuer le plus au pot commun, ce n'est pas au travail de payer pour le capital, c'est à l'économie et aux finances d'être au service de l'intérêt général. Quand les dividendes s'envolent, et que les files des Resto du cœur s'allongent, quand la Commission européenne veut mettre fin à l'aide européenne versée aux associations de lutte contre la pauvreté et la précarité qui aident au quotidien des millions de Français et d'Européens et que notre gouvernement ne résiste pas, la République n'est plus tout à fait la République. Car en République, ce n'est pas au précaire de se débrouiller tout seul, c'est à la société d'éradiquer la pauvreté en développant la solidarité et en garantissant le droit à l'emploi pour tous... Quand les meurtres se multiplient en Corse et à Marseille, que les causes (le fric, la spéculation immobilière, les trafics mafieux) sont parfaitement identifiées, et que l'Etat ne trouve jamais aucun coupable, oui la République est malade et n'est plus tout à fait la République. Car en République, ce n'est pas en privatisant les services publics, ce n'est pas en abdiquant devant la violence qu'on s'en débarrasse, mais c'est en faisant jouer son vrai rôle à l'État, garant des lois, garant des droits, qu'on fait reculer l'impunité. Quand à la tête de l'UMP, on se déchire sur fond de fraudes électorales, que seules comptent les ambitions personnelles des belligérants alors qu'on prétend vouloir gouverner la France, la République n'est plus tout à fait la République. Car en République, ce ne sont pas les calculs égoïstes et égocentriques qui font l'homme d'État, c'est le sens de l'intérêt de la France, c'est l'attention constante portée au débat et à la décision démocratique, c'est le respect des engagements pris qui font la femme ou l'homme de gouvernement. Quand des millions de Français sont montrés du doigt en raison de leur religion, qu'un président pour rester au pouvoir se lance dans une compétition raciste et xénophobe, ou qu'un député pour prendre la tête de son parti attise la haine dans les cours d'école avec des provocations imbéciles et humiliantes, la République n'est plus tout à fait la République. Quand on multiplie les contrôles de police « à la gueule du client », et que des centaines de jeunes Français sont harcelés, non pas parce que leurs comportements sont suspects ou leurs agissements criminels mais parce qu'ils sont considérés a priori, à cause de leur apparence, comme suspects, la République n'est plus tout à fait la République. Voilà la société dont nous ne voulons plus. Les puissants attisent la méfiance et les peurs. Nous y perdons tous et eux seuls y gagnent.

Nous, notre force, c'est notre unité. Unité dans l'égalité des droits. Unité dans le refus de toutes les discriminations sociales, ethniques, religieuses, sexuelles ou territoriales. Nous concevons toutes nos diversités comme le patrimoine commun de toute l'humanité, de chacune et chacun d'entre nous. Nous combattons toutes les aliénations. Nous ne voulons pas nous enfermer dans des identités étriquées et figées. Nous sommes des humains uniques et complexes, d'influences et d'appartenances multiples. Nous voulons construire ensemble un nouveau monde de partage et d'humanité. Face à toutes les divisions, nous avons donc la solution. Rien n'est plus urgent pour sortir ensemble de la crise que de reconquérir notre liberté, de reconstruire l'égalité des droits pour tous, de refonder la fraternité.

 

*

 

Oui, la République que nous voulons vivre pleinement aujourd'hui, c'est la République de l'égalité sociale.« La liberté n'est qu'un vain fantôme quand une classe d'hommes peut affamer l'autre impunément », déclamait Jacques Roux l'Enragé à la tribune de la Convention en juin 1793. Face aux féodalités financières, cela demeure d'actualité. On nous dit : « l'égalité sociale, ce n'est pas possible ». Je réponds que ce n'est pas l'égalité sociale qui est impossible, c'est de laisser les inégalités et les injustices se creuser qui rend la vie en société impossible. La République de l'égalité sociale dans notre France du XXIe siècle n'adviendra pas sans une nouvelle abolition des privilèges de l'argent. Si nous voulons l'abolition des privilèges, si nous voulons l'interdiction des licenciements boursiers, la fin des mises en concurrence systématiques, l'éradication des emplois précaires, des temps partiels imposés, c'est pour construire un nouvel âge du partage, un nouvel âge social, celui de la sécurisation sociale et professionnelle de tous, celui de la sécurisation du droit à la santé, au logement, à l'éducation. Voilà ce qui à nos yeux devrait être le cœur des priorités gouvernementales, et non la course à la compétitivité.

*

La République que nous voulons vivre, c'est celle de la reconquête d'une véritable souveraineté populaire. À l'heure de la mondialisation, de l'Europe austéritaire, des actionnaires financiers, de la présidentialisation qui concentre et confisque les pouvoirs, tout doit être reconstruit. Nous voulons le pouvoir partagé des citoyens, et non le présidentialisme qui concentre tous les pouvoirs ; nous voulons la démocratie sociale, les droits des travailleurs et l'appropriation sociale de nos métiers, de notre travail, des richesses créées ; nous voulons la mondialisation de la coopération, l'Europe de la solidarité et de la mise en commun, et non plus de la concurrence. Le respect de la parole donnée devient une grande question politique – qu'il s'agisse de la renégociation du traité européen promise par le candidat du Parti socialiste, et abandonnée par le président élu ; qu'il s'agisse de l'annonce à l'Assemblée nationale d'un repreneur pour Florange et de sa nationalisation, abandonnée en moins de deux jours sans qu'aucune explication ne soit donnée aux salariés, ni au pays, ni à la représentation nationale. La République que nous voulons vivre, c'est celle d'une citoyenneté pleine et entière. C'est celle qui accorde le droit de vote des étrangers. On nous dit : « Les Français n'en veulent pas. » Je récuse cette affirmation. De quoi parle-t-on ? Les étrangers votent aux élections locales en France quand ils sont issus de pays de l'Union européenne et cela ne choque aucun Français. Dans de très nombreux pays européens, étrangers communautaires et non-communautaires votent sans problème. Alors, quel est donc le problème ? Notre système institue une discrimination entre étrangers. Et ceux qui sont discriminés sont « les plus Français » de tous, si l'on peut dire, car ils sont issus de pays colonisés par la France, travaillant depuis des années pour notre pays, des parents d'enfants et de petits-enfants français. Autrement dit, l'absence de droit de vote des étrangers non-communautaires organise une insupportable discrimination à l'égard de citoyens actifs et résidents de notre pays. Et cela n'est plus supportable. De quelle égalité parle-t-on quand des étrangers contribuant à produire les richesses de notre pays se voient refuser ce droit mais qu'un citoyen français comme Gérard Depardieu garde la jouissance de ses droits civiques alors qu'il déménage pour ne pas avoir à payer d'impôts en France ? La République, ce n'est pas cela. Alors oui, il faut adopter cette loi, maintenant. La République que nous voulons vivre, c'est celle qui bannit le contrôle au faciès. Ces contrôles sont injustes et discriminatoires, et ne sont d'aucune efficacité dans la lutte contre l'insécurité ou la criminalité qui sont présentés comme leur raison d'être. Rien ne rend acceptable de telles pratiques en République. Voilà pourquoi le PCF mettra toutes ses forces dans la campagne pour le droit de vote des étrangers que viennent de lancer plus de 50 associations et organisations avant les élections municipales de 2014, et dans la campagne pour la mise en place de récépissés lors des contrôles d'identité. La République que nous voulons vivre, c'est celle qui refuse le discours : « La France ne peut plus être unie, parce qu'elle est devenue trop multiculturelle ». L'identité de chacun est une alchimie toujours en mouvement. L'autre est toujours en nous. Le métissage est en chacun de nous. Nous refusons l'assignation des identités figées. La culture est une construction partagée que nous voulons en toutes circonstances mettre au cœur de notre combat émancipateur. Montaigne le disait déjà dans cette France du XVIe siècle où l'Église catholique cherchait à exclure les protestants : «Un honnête homme est un homme mêlé».  Quand on nous dit aujourd'hui : « L'islam en France, ce n'est pas notre histoire », nous récusons cette réécriture de notre histoire nationale, européenne, méditerranéenne qui est l'histoire d'un brassage ininterrompu. Nous combattons l'islamophobie du FN et de l'UMP qui cache mal les mentalités coloniales et néo-coloniales revendiquées par ces droites revanchardes et nostalgiques.

Et c'est parce que la République dans laquelle nous voulons vivre, c'est plus que jamais la République laïque. La laïcité, redisons-le, haut et fort, ce n'est pas l'uniforme d'une pensée quelle qu'elle soit. C'est au contraire la liberté de conscience pour tous, et donc la liberté de culte et de le pratiquer, c'est en même temps et indissociablement, le refus de la domination sur l'État et ses lois d'une religion quelle qu'elle soit. Finissons-en avec l'instrumentalisation de la laïcité pour mieux en trahir l'esprit. Sachons au contraire faire vivre la laïcité dans la France telle qu'elle est réellement aujourd'hui. La République dans laquelle nous voulons vivre, c'est au fond celle qui place par-dessus tout le respect de la dignité, de la dignité de chaque femme, de chaque homme, de chaque membre de notre société.

Aucun argument, aucune situation, aucune contrainte, aucune crise ne justifiera jamais à mes yeux l'acceptation que certains doivent se voir déclassés, niés dans leur dignité d'homme, comme les familles Roms rencontrées ce matin dans le quartier de la Belle de Mai et les habitants de Maison-Blanche qui sont en butte aux marchands de sommeil depuis tant d'années. La République s'élèvera et nous nous élèverons tous en cherchant à répondre toujours par le haut à cette ambition d'égalité et de dignité.

Alors, sommes-nous impuissants ? Je le répète, nous sommes en réalité divisés. En reconstruisant une société solidaire, nous serons plus forts tous ensemble. Nous pouvons mettre fin aux divisions et, si nous y arrivons, il n'y aura ni maîtres, ni esclaves mais une société d'hommes et de femmes libres et égaux. La République est notre bien commun, c'est pour la refonder que nous voulons refonder l'égalité, sans laquelle il ne peut y avoir ni liberté, ni fraternité. Ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous différencie. Il est temps de décréter à nouveau le salut commun. Oui, le temps est venu de mettre l'égalité au pouvoir, le temps est venu de proclamer à nouveau la Conjuration des Égaux en marche.

 

Vive la Liberté, vive l'Égalité, vive la Fraternité ! Vive la République, vive la France !

Et vive le Parti communiste français !

 

Un Front de Gauche d’ampleur nationale

publié le 29 mai 2012, 10:51 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 8 avr. 2015, 13:39 ]


    Les résultats du Front de Gauche (FdG) à la présidentielle diffère beaucoup de la carte habituelle que donnaient les résultats du PCF et de l’extrême-gauche NPA(LCR)-LO. Je rappelle que le Front de Gauche est constitué de trois forces rassemblées : le PCF, la Gauche unitaire -créée à partir des adhérents du NPA qui ont suivi le dirigeant national Ch. Piquet qui quitta son parti pour faire l’union, et le PG -parti de Gauche- constitué, lui, par les adhérents du PS-Solferino qui suivirent J.-L. Mélenchon qui fit scission avec son parti d’origine après la campagne pour le « non » au TCE (traité constitutionnel européen). Ce sont donc trois formations de "la gauche de la gauche", de la gauche révolutionnaire, de la gauche radicale. Ces trois partis fondateurs ont été rejoints par quatre autres organisations dont une issue du courant chevènementiste, deux autres du NPA et last but not least la FASE (alternative, socialisme, écologie). On ne peut pas dire que ce soit "l’extrême-gauche" dans la mesure où le FdG envisage parfaitement la possibilité de gouverner en cas de victoire électorale. Selon nous, le vocable "extrême-gauche" doit être réservé à ce qu’il reste du NPA et à Lutte ouvrière (LO).

    Le FdG est donc le successeur électoral du PCF et d’une partie du NPA qui obtint derrière son leader médiatique Besancenot des scores non négligeables -explicables le plus souvent par le vote d’électeurs communistes déçus par l’attitude de la direction de leur parti trop liée selon eux au PS-Solférino-. Le journal Le Monde publia cette carte, le 24 avril 2007, qui montre bien, selon moi, les zones de force de ce qu’il appelle négativement "la gauche hors PS".


 




  Cette carte est fort semblable à celle des résultats PCF de 1978, année où il obtient pour la dernière fois, le score supérieur à 20% des suffrages exprimés (élections législatives).


 










1. Les bastions

    Fussent-ils détériorés par les désastres électoraux successifs du PCF, les départements-bastions demeuraient les suivants :

Le Nord lato sensu : région Nord-Pas de Calais bordée au sud par la Somme, l’Aisne et les Ardennes plus la Seine-Maritime à l’ouest ;

Les Côtes d’Armor et la Sarthe dans l’ouest

La Meurthe&Moselle pour le Grand Est

Le croissant nord-ouest qui enveloppe le Massif central de la Nièvre à la Dordogne.

Dans les Pyrénées : l’Ariège et le département des Hautes-Pyrénées.

    Enfin tous les départements du littoral méditerranéen, y compris le Var et les Alpes-Maritimes en 1978, mais sans ces deux départements en 2007. Les Alpes de haute-Provence et le Vaucluse ont été des bastions du PCF, ce n’est plus le cas du Vaucluse en 2007.

 

2. Les zones de faiblesses

    Les lecteurs les plus assidus ont remarqué comment la carte du chanoine Boulard s’insérait presque parfaitement dans celle du PCF 1978. lien. CHANOINE BOULARD : LA RELIGION, VARIABLE POLITIQUE MAJEURE.(atlas) La Haute-Savoie donnait au PCF un score inférieur à sa moyenne nationale. Seule les Alpes-Maritimes avaient un comportement différent de celui que l’on pouvait attendre.

Autrement, sans surprise, on trouve comme départements peu favorables au PCF :

L’ouest armoricain et sa bordure orientale élargie aux Deux-Sèvres, à l’Orne et au Calvados

L’est alsacien, lorrain et franc-comtois.

La Côte d’or

Les quatre compères catholiques du cœur du Massif-central : Cantal, Haute-Loire, Aveyron et Lozère.

Les Pyrénées-Atlantiques, la Corse, les deux départements savoyards.

    De cette inégalité d’influence ressort un écart très fort entre les départements les plus "rouges" et ceux qui le sont le moins. En 1978, de nombreux départements donnaient entre 30 et 35% de leurs voix au PCF (38% en Seine-St-Denis) alors que ce parti dépassait timidement les 6% dans d’autres départements, soit une distorsion de 1 à 6 à peu près. Même en 2007, où quelques lignes ont bougé, on peut parler d’une régionalisation, et pourquoi pas d’une "régionalité" de l’influence de la gauche révolutionnaire. L’historien Martelli a écrit un livre qu’il a intitulé "l’archipel communiste" voulant signifier par là que la carte électorale du PCF ressemble aujourd’hui à un semis d’îles et îlots au milieu d’un océan déserté par les révolutionnaires.

 

3. La carte électorale du Front de Gauche

    Je publie ici la carte des résultats du Front de gauche en avril 2012.


Vous avez pris connaissance de son analyse détaillée par Jérôme Fourquet LIEN "Le vote Front de gauche à la loupe" par Jérôme Fourquet (IFOP). Évidemment, l’élaboration de la carte vise à amplifier les écarts afin de lui donner une lisibilité plus grande. De plus, la cellule de base choisie est le canton et non pas le département, ce qui donne des résultats plus fins et aiguise les amplitudes : ainsi un canton a donné un score de 2,11% à J.-L. Mélenchon et un autre 31,74%. Je vais en rester au niveau du département. 

    Le fait marquant est celui-ci : aucun département ne donne un score -en suffrages exprimés- inférieur à 7,22% (cas du Bas-Rhin). Et le département le plus "mélenchoniste" est la Seine-St-Denis avec presque 17%. Autrement dit, la fourchette des résultats oscille de 1 à 2,5 environ. Il y a comme une homogénéisation nationale de l’influence du FdG. Il est certain que le damné "vote utile" a écrêté les résultats dans les départements les plus ancrés à gauche. En revanche, dans nombre de départements réfractaires au PCF de naguère, les scores sont -relativement- très élevés.

  






 Le Front de Gauche a élaboré un tableau des résultats lisible par le lien suivant :

http://issuu.com/placeaupeuple_2012/docs/evolution_des_scores_du_front_de_gauche_par_d_part

    Parfois, les résultats sont meilleurs que ceux obtenus par le PCF en 1978 lorsqu’il obtenait plus de 20% au plan national, alors que le FdG de 2012 dépasse à peine les 11%. C’est le cas de la Manche, de la Mayenne et des deux départements alsaciens (liste non exhaustive).

 

 

% exprimés

Indice national

 

Départmt.

FdG

PC/78

2012

1978

NDA

France

11,1

20,6

100

100

1,8

Manche

9,9

8,3

89,2

40,3

2,3

Mayenne

8,3

6,1

74,8

29,6

2,1

Maine&Loir

9,4

10,2

84,7

49,5

2,2

Vendée

8,5

9,5

76,6

46,1

2,3

Bas-Rhin

7,2

6,6

64,9

32,0

1,7

Haut-Rhin

7,4

6,7

66,7

32,5

2,1

 NB. : NDA = votes exprimés en faveur de Nicolas Dupont-Aignan.

    Il est intéressant de relever que ces départements rétifs à la gauche révolutionnaire en 1978 se rapprochent de la moyenne nationale en 2012. Grosso modo, ces départements n’atteignaient guère que le tiers ou la moitié de l’influence nationale du PCF en 1978. Aujourd’hui, en progressant en voix et en pourcentage, ils se situent entre les 66% et 90% du score national FdG. D’où le choix du mot homogénéisation pour qualifier le développement de l’influence du FdG en France.

    De cela il résulte que l’influence du FdG ne saurait être réduite à celle d’un PCF ragaillardi. J.-L. Mélenchon a obtenu des voix qui ne se seraient pas portées sur un candidat affichant la seule étiquette PCF. Les départements où l’apport personnel -via son parti néophyte- de J.-L. Mélenchon est le plus évident sont, à mon avis, les départements "droitiers" : ceux du tableau ci-dessus plus le Morbihan, l’Ille-et-Vilaine et l’Orne ainsi que les départements "socialistes" c’est-à-dire où le PS -y compris la SFIO autrefois- est puissant avec un PC relativement faible : Aude, Nièvre, Gers, Haute-Garonne…

    Il n’est pas interdit également -litote- de voir dans les bons résultats du FdG dans certains départements, un retour au bercail de l’électorat communiste qui avait suivi un temps l’étoile du berger socialiste (après 1983 notamment)[1].

    Il est difficile, au jour d’aujourd’hui, de donner une explication à ces bons résultats dans les départements "droitiers". Il m’est apparu que ces départements ont également donné un bon résultat -tout est relatif- à Nicolas Dupont-Aignan. Ses résultats figurent dans une des colonnes du tableau[2]. Dupont-Aignan représente la droite dite souverainiste, il est le dernier représentant de la tendance gaulliste. Est-ce que les électeurs de ces départements ont été sensibles au discours patriotique de Jean-Luc Mélenchon ? C’est une hypothèse.

 

    Je termine provisoirement en disant que la géographie électorale change profondément. La France électorale d’aujourd’hui n’est plus celle de 1978. Ce sera l’objet d’un prochain article : FRANCE 2012, géographie électorale : ça bouge ! (atlas)

 


[1] En réalité, ce transfert a eu lieu dès 1981 où, grosso modo, 5% de l’électorat est passé du PCF (Marchais) au PS (Mitterrand).

[2] Le cas du Bas-Rhin s’explique par le vote de l’agglomération de Strasbourg où le vote NDA n’a pas convaincu.        

"Le vote Front de gauche à la loupe" par Jérôme Fourquet (IFOP)

publié le 9 mai 2012, 03:55 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 4 nov. 2012, 05:44 ]

    Voici une analyse de Jérôme FOURQUET, un expert de l’analyse politique. Je partage entièrement son point de vue. Je me permettrai parfois un complément d’information. Et -chose importante - les intertitres sont de moi, intercalés pour aérer le texte et faciliter la lecture.

JPR.


Par Jérôme FOURQUET

directeur du Département Opinion et Stratégies d’Entreprise

IFOP.

 

    Avec 11,1% des voix et près de 4 millions d’électeurs qui se sont portés sur sa candidature, Jean-Luc Mélenchon a solidement installé la construction inédite qu’est le Front de gauche dans le paysage politique français. Les cartes présentées ici, effectuées à l’échelle cantonale 
sur la base des données du ministère 
de l’Intérieur, permettent une analyse 
fine de la géographie de ce vote.

 

A. Le Front de Gauche : une approche géographique

 

    Le premier constat qui frappe à la lecture de la carte 1, c’est qu’elle présente de nombreuses similitudes avec la géographie historique et traditionnelle du vote communiste.



Les bastions historiques du PCF

    La plupart des zones de force du candidat du Front de gauche, qui ressortent en rouge foncé sur cette carte, correspondent à des bastions communistes. C’est le cas dans la région Nord-Pas-de-Calais, avec le bassin minier, et le Valenciennois, en Seine-Maritime, en Île-de-France, avec les communes de la banlieue rouge, dans l’Est, avec la région de Longwy, mais aussi dans le Gard ou bien encore avec les fiefs communistes des Bouches-du-Rhône. Les campagnes irriguées par le communisme rural n’ont pas manqué non plus à l’appel avec un vote Mélenchon important dans le centre de la Bretagne (les monts d’Arrée), en Brière, dans le Cher, dans le bocage bourbonnais dans l’Allier, en Haute-Vienne, dans une partie de la Creuse, de la Dordogne ou bien encore dans le Lot-et-Garonne. 
Les quelques exemples présentés sur le graphique 
suivant illustrent très clairement ce constat d’un "survote" important des communes à direction 
communiste ou anciennement communiste en faveur du candidat du Front de gauche.


L’apport du courant socialiste révolutionnaire

    Mais le succès de la candidature de Jean-Luc Mélenchon a également résidé dans sa capacité à aller chercher des électeurs de gauche au-delà des rangs des seuls sympathisants communistes. La carte est éloquente de ce point de vue, avec un vote Front de gauche supérieur à la moyenne dans de nombreux cantons situés dans les départements socialistes ou radicaux du Sud-Ouest : Landes, Gers, Hautes-Pyrénées, Lot et Haute-Garonne. Le basculement d’une partie de l’électorat socialiste (d’après une enquête IFOP réalisée le jour du premier tour, 12% des électeurs de Ségolène Royal ont voté pour Jean-Luc Mélenchon)[1] s’est également produit dans la plupart de la région Languedoc-Roussillon, mais aussi dans une bonne partie de l’Ardèche, de la Drôme, des Hautes-Alpes et des Alpes-de-Haute-Provence. Dans ces régions rurales et/ou de montagne, très sensibles notamment à la question du maintien des services publics (et où, pour ce qui est du Sud-Est, Arnaud Montebourg avait obtenu de bons résultats lors de la primaire socialiste), l’écho significatif rencontré par le discours de Jean-Luc Mélenchon est venu concurrencer celui de François Hollande.

Distinguo France du nord, France du sud.

    Si le vote Front de gauche est donc assez élevé et homogène dans toute la moitié sud de la France (à l’exception de quelques isolats très ancrés à droite : Cantal-Aubrac, littoral varois, Beaujolais et sud de la Bresse), la situation est beaucoup plus contrastée au nord de la Loire. À l’instar de ce que l’on constatait lors des précédents scrutins pour le Parti communiste, de nombreux territoires ont été très réfractaires au vote Mélenchon. C’est le cas de Champagne-Ardenne et d’une bonne partie de la Meuse, de l’Alsace et de la partie orientale de la Moselle ainsi que des hauts cantons jurassiens[2]. À ces places fortes conservatrices de l’est de la France s’ajoutent d’autres zones de droite traditionnelles (Beauce, Perche, bocages normand et vendéen) dans la partie ouest du pays. Dans cette dernière, le Front de gauche a néanmoins su trouver des points d’appui dans la plupart des grandes agglomérations : à Cherbourg, à Caen, au Mans, à Angers, à Nantes ou bien encore à Rennes. Jean-Luc Mélenchon a obtenu dans ces villes-centres[3] et dans leurs immédiates périphéries des scores non négligeables et en tout cas sensiblement supérieurs à ceux enregistrés dans les espaces péri-urbains et ruraux les entourant. Ces villes de l’Ouest constituent les principales places fortes du PS dans cette région. Le développement du vote Front de gauche s’est donc effectué ici aussi (comme dans le Sud-Ouest et la vallée du Rhône) sur la base d’un électorat majoritairement socialiste (et également d’un apport de voix d’extrême gauche), le Parti communiste étant très peu implanté dans ces villes, à l’exception du Mans. La différence avec la poussée observée dans le Sud réside dans le fait qu’elle s’est principalement concentrée dans l’électorat socialiste urbain alors qu’elle a concerné les cantons ruraux comme les villes dans le Sud-Est et le Sud-Ouest.

     Au regard de cette implantation en milieu urbain, certains commentateurs ont d’ailleurs qualifié le vote Mélenchon d’un vote de «bobos». Le candidat du Front de gauche enregistre certes des résultats élevés dans des territoires hyper-urbains où le mode de vie «bourgeois bohème» est très répandu. C’est le cas des arrondissements de l’Est parisien : 17, 4% dans le 20e arrondissement, 15,7% dans le 19e, 15,3% dans le 18e et 14,9% dans le 10e, le long du canal Saint-Martin.  Lien à Paris, en avril 2012...  On retrouve le même phénomène dans le 1er arrondissement de Lyon[4] (19,9%) ou bien encore à Grenoble (15,4%), ville où les Verts réalisent régulièrement des scores élevés. Les sondages réalisés le jour du vote confirment d’ailleurs que Jean-Luc Mélenchon a su capter une fraction (14%) du vote écologiste. Mais, à la lecture de la carte, on voit que ces espaces de centre-ville gentrifiés[5] ne représentent somme toute qu’une très faible proportion des zones de force du Front de gauche, au sein desquelles les communes urbaines populaires, à tradition communiste notamment, et les cantons ruraux pèsent bien plus lourd. L’analyse 
de la sociologie de l’électorat du Front de gauche va d’ailleurs dans le même sens. Jean-Luc Mélenchon a ainsi obtenu 18% des voix des ouvriers s’étant déplacés aux urnes, 14% auprès des professions intermédiaires contre 9% parmi les cadres supérieurs.

 

B. Le FDG : évolution relative 1995 - 2008

 

    Pour compléter cette analyse, nous avons dans un second temps comparé le vote Mélenchon avec le vote en faveur de Robert Hue en 1995 (carte 2) . À l’époque, le représentant du Parti communiste avait obtenu 8,6% des voix et il nous semblait intéressant de pouvoir observer la structuration spatiale de ces deux votes à dix-sept ans d’intervalle.


    Si, comme on l’a dit précédemment, la géographie du vote Front de gauche, dans ses creux et dans ses pleins, rappelle assez fortement la géographie traditionnelle du vote communiste, un phénomène assez marquant apparaît néanmoins à la lecture de cette seconde carte. Le Front de gauche est aujourd’hui en dessous des niveaux qu’avait atteints Robert Hue en 1995 dans quasiment toutes les zones de force du PC et il progresse en revanche, parfois de manière significative, dans des terres où l’influence communiste était très faible. Ce mouvement avait déjà été observé lors des dernières élections cantonales où la «plus-value» de l’appellation Front de gauche s’était surtout fait sentir dans des «terres de mission» du PC à forte tradition socialiste.


L’élargissement du vote aux terres socialistes

    Cette année Jean-Luc Mélenchon améliore très nettement le score du communiste Robert Hue en 1995 dans des terres comme les Hautes-Pyrénées (+ 9,9 points dans le canton de Luz-Saint-Sauveur, + 8,4 dans celui de Campan), l’Ariège (+ 16,5 points dans le canton de Massat, + 9,6 dans celui de La Bastide-de-Sérou, + 9,1 dans celui d’Oust), la Haute-Garonne (+ 9 points dans le canton Montesquieu-Volvestre et + 7,5 dans celui de Cintegabelle, ancien fief de Lionel Jospin). On retrouve la même logique d’une progression dans les terres socialistes de l’Aude (+ 12,7 points dans le canton de Mouthoumet, + 9,1 dans celui de Tuchan), de l’Hérault (+ 8,9 points dans le canton de Claret, + 8,6 dans celui de La Salvetat par exemple) ou bien encore de la Drôme : + 11,7 points dans le canton de La Chapelle-en-Vercors, + 10,3 dans celui du Luc-en-Diois ou + 9,4 dans celui de Die.


L’écrêtement du vote PCF

    À l’inverse, le mouvement d’érosion (par rapport au niveau de 1995) a concerné tous les types de fiefs communistes. C’est le cas dans les campagnes rouges de l’Allier (-7,8 points dans le canton de Montet, -6,7 dans celui de Bourbon-l’Archambault), du Lot-et-Garonne (-6,2 points dans le canton d’Houeillès, -5,3 dans celui de Meilhan-sur-Garonne) ou des Côtes-d’Armor : -7,1 points dans le canton de Callac et -5,6 dans celui de Plestin-les-Grèves par exemple. Les cantons ouvriers du Pas-de-Calais (-12,1 dans le canton de Douvrin, -11,9 dans celui de Rouvroy, -11 dans celui d’Auchel), du Nord (-9,6 points dans celui de Marchiennes et -7,1 dans celui de Carnières) ou de la Somme (-9 points dans le canton de Friville-Escarbotin, -8,7 dans celui d’Ault) confirment cette tendance. Cette dernière se vérifie, mais de manière plus contrastée, dans la banlieue parisienne : -12 points à Ivry, -4,7 à Bobigny,- 4,3 à La Courneuve, mais +2,1 à Saint-Denis et à Saint-Ouen.

 

    Il sera intéressant d’observer lors des prochaines élections législatives si ces tendances se confirment et si la géographie du vote Front de gauche se structure bien sur les bases de cette carte apparue au soir du premier tour de l’élection présidentielle.


L’Humanité, numéro du 30 avril 2012
à compléter par Un Front de Gauche d’ampleur nationale

[1] S. Royal avait obtenu 25% des voix exprimées. Soit 25 x 12% = 3%. Le FdG a obtenu 11,1%.

[2] Un mien article complètera ce point de vue, car si le score du FDG est en effet relativement faible dans ces régions, il est TRÈS ÉLEVÉ par rapport au score obtenu naguère par le PCF y compris lors de son apogée.

[3] La « ville-centre » est la commune qui donne son nom à l’agglomération. Ne pas confondre avec « l’ hyper-centre » qui est une partie de la ville-centre où se trouve les quartiers d’affaires, les bureaux, le grande commerce, and so on…

[4] Ce sont les « pentes » de la Croix-Rousse, l’ancien quartier des canuts.

[5] C’est-à-dire transformé par la gentryfication, mot forgé par les géographes-urbanistes pour dire la mutation sociale vécue par ces quartiers qui -abandonnés peu à peu au cours du XX° par la bourgeoisie et laissé au prolétariat et aux immigrés- ont été réhabilités, restaurés et vendus à ces CSP « supérieures » appelées « gentry » par allusion à la petite noblesse anglaise.  

Robespierre, Victor Hugo et Jean-Luc Mélenchon...

publié le 9 févr. 2012, 10:24 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 24 juin 2016, 15:22 ]

    Lors du meeting du Front de gauche, à Villeurbanne, ce mardi 7 février, Jean-Luc Mélenchon a lu cet extrait des Misérables de notre ancêtre républicain, Victor Hugo.

    « En 93, selon que l'idée qui flottait était bonne ou mauvaise, selon que c'était le jour du fanatisme ou de l'enthousiasme, il partait du faubourg Saint-Antoine tantôt des légions sauvages, tantôt des bandes héroïques.

    Sauvages. Expliquons-nous sur ce mot. Ces hommes hérissés qui, dans les jours génésiaques du chaos révolutionnaire, déguenillés, hurlants, farouches, le casse- tête levé, la pique haute, se ruaient sur le vieux Paris bouleversé, que voulaient-ils ? Ils voulaient la fin des oppressions, la fin des tyrannies, la fin du glaive, le travail pour l'homme, l'instruction pour l'enfant, la douceur sociale pour la femme, la liberté, l'égalité, la fraternité, le pain pour tous, l'idée pour tous, l'édénisation du monde, le Progrès ; et cette chose sainte, bonne et douce, le progrès, poussés à bout, hors d'eux-mêmes, ils la réclamaient terribles, demi-nus, la massue au poing, le rugissement à la bouche. C'étaient les sauvages, oui ; mais les sauvages de la civilisation.

    Ils proclamaient avec furie le droit ; ils voulaient, fût-ce par le tremblement et l'épouvante, forcer le genre humain au paradis. Ils semblaient des barbares et ils étaient des sauveurs. Ils réclamaient la lumière avec le masque de la nuit.

    En regard de ces hommes, farouches, nous en convenons, et effrayants, mais farouches et effrayants pour le bien, il y a d'autres hommes, souriants, brodés, dorés, enrubannés, constellés, en bas de soie, en plumes blanches, en gants jaunes, en souliers vernis, qui, accoudés à une table de velours au coin d'une cheminée de marbre, insistent doucement pour le maintien et la conservation du passé, du moyen-âge, du droit divin, du fanatisme, de l'ignorance, de l'esclavage, de la peine de mort, de la guerre, glorifiant à demi-voix et avec politesse le sabre, le bûcher et l'échafaud. Quant à nous, si nous étions forcés à l'option entre les barbares de la civilisation et les civilisés de la barbarie, nous choisirions … les barbares ! ».

    Tout est dit.

    A la lecture de ce texte - car j’y étais ! - j’ai immédiatement pensé à Maximilien Robespierre, autre grand ancêtre, qui dit à peu près la même chose au point que je me suis demandé s’il n’avait inspiré notre grand Hugo. Voici une courte citation par laquelle on le voit s’élever contre l’aristocratie d’Ancien régime - de toute l’Europe ! - qui se dresse contre la République jacobine et sans-culotte : « Toutes les associations qui nous font la guerre reposent sur le crime : ce ne sont aux yeux de la vérité que des hordes de sauvages policés et de brigands disciplinés  … Avec quelle impudeur les rois et leurs complices font des lois contre le vol, lorsqu’ils envahissent la fortune publique ! On condamne en leur nom les assassins et ils assassinent des millions d’hommes par la guerre et par la misère » [1]

http://en.wikipedia.org/wiki/Howard_Chandler_Christy

http://en.wikipedia.org/wiki/Trumbull%27s_Declaration_of_Independence

    Je me suis intéressé, par ailleurs, à la Guerre d’indépendance des États-Unis. Chacun connaît les tableaux de H.C. Christy et J. Trumbull représentant, l’un la signature du texte de la constitution de 1787 et l’autre, le "comité des Cinq" présentant son projet de déclaration d’Indépendance au Congrès des futurs États-Unis. C’est alors que les mots de Maximilien me sont venus à l’esprit. L’élite de l’élite coloniale est ici représentée. Une élite qui a massacré des milliers d’Indiens et continuera de le faire, qui entérine l’esclavage des Noirs, qui vient de réprimer durement par moult pendaisons la révolte des farmers de Shays. Qui sont les barbares comme dirait Hugo ? Tous ces personnages poudrés et perruqués relèvent parfaitement de ce que Robespierre appelle « les hordes de sauvages policés et de brigands disciplinés ».

    Cela n’est pas sans nous rappeler aussi le remarquable film de Tavernier « le juge et l’assassin ». On s’acharne sur un malade, certes tueur en série, mais ceux qui s’acharnent brisent les grèves ouvrières dans le sang avant de préparer la grande boucherie de 1914-1918.

 

     Quant à J.-L. Mélenchon, il appelle les ouvriers et salariés à redresser la tête. Rien, absolument rien, ne justifierait qu’ils auraient honte de quoi que ce soit. Dans mon livre, sorti en 2007, j’avais - à mon modeste niveau - stigmatisé ceux qui blâmaient les "ouvriers".

    "C'est l'époque" écrivais-je "où l’on a (F.N., médias, instituts de sondages) claironné avec les trompettes d'Aïda que le F.N. était devenu "le premier parti ouvrier de France". Ah ! Ces ouvriers, soit ils votent communiste, soit ils votent F.N… Dans les deux cas, on ne peut rien faire avec eux. Place aux élites, à ceux qui savent ! À ceux qui ne font pas grève en décembre 95 ! À ceux votent oui à l'Europe ! "

    Mais l’actualité immédiate éclaire l’univers des "enrubannés" qui nous gouvernent. D’abord, l’excellent film « les nouveaux chiens de garde » montre parfaitement ce joli monde qui nous a organisé une crise protéiforme comme jamais le monde n’en a connu. Et l’affaire Woerth est un nouveau coup de foudre dans la nuit d’orage. Woerth ! souriant, brodé, doré, enrubanné, constellé, "le chaînon clinquant" comme titre L’Humanité de ce jeudi.

    Je laisse écrire, Jean-Emmanuel Ducoin, l’une des meilleures "plumes" de ce journal :

    "Jusqu'à son arrivée à l'Élysée, Sarkozy avait toujours réussi à échapper- en apparence - au cancer des « affaires », à la corruption passive ou active, aux conflits d'intérêts. Mais l'étau s'est, depuis, resserré autour du Palais d'où se dégage une haleine fétide. Comme aspiré par sa propre logique, la Sarkozye a en effet sombré en révélant sa vraie nature, un précipité de vulgarité, de voyous en smoking, d'impudence des comportements ordo-libéraux, de fric et de strass. Ne le cachons pas. Les « affaires », elles aussi, sont emblématiques du sarkozysme et témoignent de la domination des intérêts privés sur l'intérêt général. Comme si la puissance en euros des copains et des coquins s'était imposée partout, projetant sur l'Hexagone, avec une cruauté absolue, une lumière aveuglante sur une morale publique totalement dévoyée. La République « irréprochable » vantée sur tous les tons par Sarkozy est aujourd'hui irrespirable. Que les donneurs de leçons en civilisation apprennent à se taire !

    Les mots ne résistent pas à l'énumération des signes cliniques, si nombreux qu'ils pourraient occuper toutes les colonnes de ce journal. Comment oublier toutes les « affaires ». Woerth, Bettencourt, Karachi. Takieddine, les scandales Tapie, Wildenstein, Joyandet, les voyages d'Alliot-Marie en Tunisie, la nomination de Jean Sarkozy, les condamnations d'Hortefeux... sans parler des amis placés ici et là, de l'espionnage des journalistes et autres fadettes, des tentatives de mise au pas de la justice, etc. La collusion entre les arcanes du pouvoir et les puissances de l'argent a tout simplement viré à la putréfaction idéologique, au médiocre et au somptuaire mêlés. L'explication tient en un mot. L'oligarchie. Et rien d'autre. Du Fouquet's en passant par le yacht de Bolloré, comme scènes primitives, aux liaisons dangereuses avec les milliardaires et les puissants, comme scènes quotidiennes, la Sarkozye n'est que la triste illustration d'un vieux dicton vérifiable entre tous : le poisson pourrit par la tête". Fin de citation.

    Ah ! Les barbares !



[1] Cité par LOSURDO, « le révisionnisme en histoire », Albin Michel.

Paul Jorion, économiste: «Nous vivons un désastre annoncé»

publié le 9 janv. 2012, 03:14 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 9 janv. 2012, 03:17 ]

Je publie cet entretien accordé par Paul Jorion. Le texte m’a été communiqué par J.- C. Romettino, de la revue L’Improbable. L’analyse de Paul Jorion, pour aller droit au but, est très proche de celle de Jean-Luc Mélenchon et du Front de gauche. Je vous en laisse juges. J’ai souligné - lourdement mais c’est mon réflexe de prof. soucieux de bien faire comprendre à ses interlocuteurs - j'ai souligné en rouge, les passages les plus riches d’enseignements.

On lira avec tristesse ce que rapporte Jorion sur sa discussion avec son chauffeur de taxi. Il nous reste quatre mois pour faire comprendre à ces gens -somme toute honnêtes et proches de nous -que le Front de gauche est l’issue à cette situation. Jorion, lui-même, souligne le rôle de la protection sociale en France dans l’atténuation des conséquences qui se sont abattues sur les populations lors de la crise de 2008. Croit-on que le Front national est pour la protection sociale ? lui qui veut détruire l’Etat-Providence ? qui se prononce pour la retraite par capitalisation avec baisse des impôts pour ceux qui capitalisent ? Jorion ne parle pas une seconde de l’immigration. La crise que nous vivons est une crise systémique du capitalisme et « l’arabe du coin » n’est en rien responsable des yo-yo des boursicoteurs. Le FN jour un rôle particulièrement néfaste dans la prise de conscience par les gens de la réalité du capitalisme que nous vivons.

Enfin, si son analyse est fortifiante, Jorion -je me permets de le dire - conclut de façon très contestable : « Les gens vont voter contre des candidats, pas pour des programmes ». Cela est faux en tout cas discutable. Le programme du Front de gauche s’est vendu à trois cent mille exemplaires, oui 300.000 !

Il y a un intérêt croissant pour les propositions de Jean-Luc Mélenchon.

Amis, citoyens, ne ratons pas le coche en 2012 !!

Meilleurs vœux

Jean-Pierre RISSOAN

  

L’INTERVIEW DE PAUL JORION

Paul Jorion est devenu célèbre avec la crise des subprimes de 2007 qu’il avait été un des seuls à voir venir : il travaillait aux USA dans le milieu bancaire après avoir été trader en France. Depuis, il ne cesse de mener la controverse sur son blog et par ses livres. Le 12 janvier, il sera l’invité à Lyon de la Villa Gillet, avec l’essayiste Nicolas Baverez et l’historienne Sophie Wahnich, sur le thème de la révolte[1]. En avant-première l’entretien qu’il nous accordé[2]

Le pessimisme domine, en ce début d’année. Pouvez-vous nous donner une raison d’être optimisme ?

Oui : les politiques savent ce qu’il faudrait faire… Le discours de Monsieur Sarkozy à Toulon, le 25 septembre 2008, a été à ma connaissance la seule déclaration par un politique qui non seulement prenait conscience de la gravité de la situation, mais aussi expliquait les mesures à prendre pour sauver le cadre existant. Mais ensuite, rien n’a été fait, ni en France ni ailleurs, pour mettre en œuvre ces mesures.

Vous êtes l’un des rares économistes qui ont vu monter la crise des subprimes… Pour 2012, que voyez-vous ?

Je veux préciser que, si j’ai pu en 2004-2005 faire une analyse juste de la situation, c’est parce que j’étais dans une fonction privilégiée pour la comprendre: je travaillais dans le secteur des subprimes, sur la gestion et la validation des modèles financiers. Je ne suis pas aujourd’hui dans les mêmes conditions… Il faut dire aussi que nous sommes entrés dans une période où il existe une telle multitude de facteurs, conditionnels les uns par rapport aux autres, qu’il est très difficile de prévoir ce qui pourrait se passer. Ceci posé, je dirai qu’il est assez improbable que les choses s’arrangent si on ne fait rien. Dans le cas de la zone euro, depuis l’éclatement de la crise début 2010, toutes les décisions sont prises trop tard pour être efficaces. Il faudrait renverser la vapeur, mais on ne voit pas bien comment ce la pourrait être fait... Nous vivons un  désastre annoncé.

Quelles seraient les mesures à prendre, selon vous ?

La plus importante serait, au lieu de prendre des mesures qui impactent négativement les salaires, d’augmenter le pouvoir d’achat pour reconstruire une demande sur le marché…

En clair, surtout pas la rigueur ?

La rigueur est la pire des choses. Elle ne se justifie que par rapport au pacte financier européen, mis en forme sous le nom de « règle d’or », et qui est fondé sur une erreur de logique économique élémentaire. (souligné par moi, J.-P. Rissoan, nous sommes ici au cœur de la démonstration de Jean-Luc Mélenchon et du front de gauche. Je précise toutefois que Paul Jorion n’est pas membre de ce rassemblement politique).

Pourtant, la plupart des experts, à commencer par Nicolas Baverez avec qui vous débattrez à la Villa Gillet, estiment que nous avons vécu trop longtemps au-dessus de nos moyens, qu’il faut maintenant payer la facture…

C’est complètement faux. (idem, JPR) Ce qui s’est passé depuis les années 70, c’est une prédation accélérée des investisseurs financiers et des dirigeants sur les entreprises. Les salaires ont de fait  stagné, alors qu’on vivait une période d’explosion de la productivité, grâce en particulier à l’introduction des ordinateurs. Il faudrait donc plutôt dire : les dirigeants des grosses entreprises et les actionnaires ont vécu au-dessus des moyens des salariés.

Même diagnostic sur l’Etat-Providence, que ces experts veulent démanteler ?

Mais si la France, et l’Europe en général, n’ont pas encaissé le coup de la crise des subprimes aussi durement que les Etats-Unis, c’est justement grâce au bouclier que représente la protection sociale. C’est le dernier mécanisme de défense contre l’effondrement du système capitaliste, la dernière chose qu’il faudrait attaquer... Mais la crise est utilisée comme prétexte pour démanteler la protection sociale, non parce qu’elle coûterait trop cher, mais parce qu’on continue d’appliquer ce programme ultralibéral qui a pourtant été complètement contredit par les faits depuis 2008.

Dans le discours de Toulon que vous évoquiez, Nicolas Sarkozy annonçait vouloir réformer le capitalisme, le moraliser. Mais vous, vous écrivez que « Le capitalisme est à l’agonie » (Editions Fayard, 2011)…

Oui, le capitalisme est à l’agonie parce qu’on n’a rien fait.

Il était donc sauvable ?

Oui, le capitalisme était sauvable. Et la responsabilité de la disparition du capitalisme sera  entièrement à la charge des politiques et des responsables de banque centrale qui pouvaient sauver le capitalisme en 2009, mais ne l’ont pas fait.

Et pourquoi ?... Pourquoi Nicolas Sarkozy, dont vous semblez saluer la lucidité en septembre 2008, n’aurait ensuite pas agi ?

Il y a la tentation très humaine de vouloir croire que les choses pourraient s’arranger d’elles-mêmes, ce qui diminue la pression pour imposer de vraies mesures. Et puis il y a eu un rapport de force perdu entre Monsieur Sarkozy ses partenaires, par exemple une rencontre avec Monsieur Obama, qui a fermé la porte à toutes les mesures qu’il proposait.

Vous écrivez, dans « La guerre civile numérique » (Editions Textuel, 2011)), que nous sommes dans une « situation prérévolutionnaire ». N’est-ce pas exagéré ?

Non, le parallèle peut être fait avec 1788 : tout le monde a bien analysé la situation, mais la classe dirigeante reste « assise  sur ses mains », comme on dit en anglais, elle espère que les choses vont s’arranger d’elles-mêmes. C’est criminel.

Vous pensez donc que les gens vont se révolter ?

Oui… Les mouvements d’indignés sont des protestations qui restent assez domestiquées. Dans certains pays, les gens réagissent en fonction de leur degré de souffrance : ils manifestent un peu quand ils souffrent un peu, et davantage s’ils souffrent plus... Mais en France, on n’a pas cette tradition. On encaisse jusqu’à un certain seuil, et puis ça explose.

Et vous pensez que nous y sommes ?

Oui, on arrive à un seuil. Cela se manifeste de manière indirecte, dans le nombre de gens qui se disent prêts à voter pour le Front national. Je discutais l’autre jour avec un chauffeur de taxi : il m’a fait une analyse de la situation qu’on dirait d’extrême gauche, et à la fin il m’a expliqué qu’il allait voter pour Marine Le Pen… Cela n’avait pas de sens au niveau politique, mais c’était sa manière à lui d’exprimer son indignation.

La campagne présidentielle peut-elle permettre de mieux débattre et d’avancer vers des solutions ?

Les candidats « éligibles », Messieurs Sarkozy et Hollande, resteront dans le cadre défini par la Banque centrale européenne et le FMI, c’est-à-dire l’absence de mesures véritable, comme depuis 2010. Les gens manifesteront leur désaccord par des votes de protestation, par les votes blancs et nuls, et par l’abstention. Les gens vont voter contre des candidats, pas pour des programmes.


[1] Jeudi 12 janvier, 20h30, Théâtre de la Croix-Rousse à Lyon : « Quand le peuple agit : révoltes, révolutions, réformes », débat entre Paul Jorion (www.pauljorion.com/blog), Nicolas Baverez et Sophie Wahnich. Renseignements : 04.72.07.49.49 et www.croix-rousse.com.

[2] Recueilli par Francis Brochet, journaliste au PROGRES de Lyon.

Mes primaires socialistes.

publié le 30 sept. 2011, 01:09 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 30 sept. 2011, 06:01 ]

    Le Monde, qui devient progressivement le journal de campagne du parti socialiste, publie un article sur les « primaires socialistes » : « Malgré les critiques, la primaire est bien une avancée démocratique »…Une chose est sûre : c’est un succès médiatique. Après le premier débat, le second débat a vu s’investir des sociétés privées comme Europe n°1, LE PARISIEN-Aujourd’hui en France, preuve qu’il y a quelque argent à gagner…

    Quant à savoir si c’est une avancée démocratique, c’est autre chose. Je renvoie le lecteur à mon article Milieux populaires et vie politique où je montre que le NON au traité constitutionnel européen a été massivement rejeté par les électeurs socialistes (55% de NON chez eux autant que l’ensemble des Français) alors que le parti en tant que tel appelait à voter OUI. Quand il y a une telle distorsion entre des dirigeants et des dirigés peut-on parler de fonctionnement démocratique ? Lors de ces primaires, qui parle de revenir sur ce désastreux traité ? Certains vont répondre Montebourg mais celui-ci n’a fait que reprendre les thèmes de Jean-Luc Mélenchon. On verra s’il est désigné candidat par les primaires. Relevons que c’est une des qualités magiques du PS de présenter - en son sein - une offre politique qui satisfait tout le monde. Déjà à l’époque de Mitterrand, on avait Rocard, très à droite, et le CERES de Chevènement très à gauche. Au dernier moment, le pêcheur ramasse tous les poissons dans son filet. Il y eut l’époque du trio de l’Essonne : Lienemann-Dray-Mélenchon, très à gauche, face à Rocard et à Strauss-Kahn qui commençait à émerger, etc…Aujourd’hui, outre le sympathique président du parti Radical de gauche, on a, de Valls à Montebourg, tout l’éventail des nuances. A la limite, un candidat UMP est superflu…

    Les observateurs ont relevé le caractère très technique du second débat, doutant fortement que les téléspectateurs y comprennent grand-chose. La télévision est-elle le meilleur moyen pédagogique en politique ? Où passe la démocratie de la cellule de quartier, de la section, du débat local entre les gens de l’immeuble et un militant venu apporter autant la bonne parole que sa faculté d’écoute ? Je me souviens du mot de Chevènement après le congrès de Rennes du PS -congrès qui est resté dans les mémoires- et qui disait : « je suis pour un parti de militants, un parti de supporters à l’américaine me fait horreur ».

On y file tout droit avec les primaires. Pour bientôt les Pom-pom-girls

    Fatalement, si on ne comprend pas tout au débat, on regarde autre chose. Du style : « elle a une jolie robe la chanteuse ». Le must est atteint avec l’émission de PublicSénat qui s’intitule, démocrates retenez-vous, « déshabillons-les ». Le but de cette émission est de « décrypter le discours et l’image des candidats ». On fait venir un philosophe, un linguiste, un spécialiste du langage corporel (si, si…), etc... et on analyse le ou la candidate qui devient un animal de laboratoire. Le monsieur spécialiste du langage corporel est très fort. Il arrive à analyser le rôle de l’épaule droite d’un candidat, chez Martine Aubry, il observe le mouvement de la main droite, puis celui de la main gauche et conclut que les deux hémisphères cérébraux de la candidate fonctionne de conserve et correctement... Quant vous parlez d’un candidat concurrent et que vous donnez en même temps un coup de tête en arrière, c’est que vous êtes TOTALEMENT opposé à l’argument de ce candidat. Ah ! on n’en apprend des choses lors des primaires socialistes !

    Je vais donc tenir un discours hautement politique suscité par ces primaires. Pourquoi Hollande a-t-il suivi une cure d’amaigrissement ? Les dessins de Plantu le représentant avec de bonnes joues roses lui ont déplu ? Un président doit-il être sec ? Le bon Edouard Herriot avait une panse qui faisait honneur à la gastronomie lyonnaise. Je trouve qu’entrer dans un personnage de futur Président cela fait un peu artificiel. Je ne suis pas sûr que Hollande soit très bien dan sa peau. Les gros plans lui sont défavorables. Il fronce les sourcils pour se donner un air sévère, adapté à la situation et à la tâche mais quelqu’un doit lui souffler « tu en fais trop » alors il retrouve un sourire large et ainsi de suite… Est-ce bien convenable ? Il n’a pas trouvé un bon équilibre psychologique. Je ne voterai pas pour lui.

    Voilà de la politique. Primaire ?

    Mais tout cela était pourtant prévisible. En 1962, lors de la campagne du referendum sur l'élection du Président de la République au suffrage universel -projet qu'il combattait - un homme politique éminent pouvait affirmer : "choisir un homme sur la seule base de son talent, de ses mérites, de son prestige (ou de son habileté électorale), c'est une abdication de la part du peuple, une renonciation à commander et à contrôler lui-même. C'est une régression" (2).

    Une chose est sûre : plusieurs candidats ne changeront rien. Désastre assuré. D’autres ont choisi la ligne « plus à gauche que moi tu meurs », comme F. Mitterrand qui, au congrès d’Epinay, voulait la RUPTURE avec le capitalisme[1]. On dirait les discours de Jean-Luc Mélenchon il y a quelques mois. Mais à l’époque ce dernier était un dangereux populiste. A gauche plus qu’ailleurs on doit se méfier des promesses. Rien n’est possible si le « peuple de gauche » reste dans son fauteuil à regarder la télé. Après la « victoire » de 1981, on est passé à la rigueur. Et je me souviens d’une émission avec Lionel Jospin, alors secrétaire du PS, émission que l’on pourrait intituler « on n’avait pas prévu »…Jospin énuméra toute une série d’évènements graves -comme la faillite d’une grande entreprise allemande- , évènements «qu’on n’avait pas prévus » pour justifier le tournant de la rigueur et l’abandon des promesses. Le PS révolutionnaire d’Epinay était enterré. Un an plus tard, 1984, le FN faisait irruption.

La vérité est qu’il faut un vote massif pour le FRONT DE GAUCHE afin de montrer la volonté des Français de casser ce système où les banques privées peuvent mettre tout un peuple à genoux ; où des agences de notation, sorties on ne sait d’où, se permettent de juger et de noter un gouvernement -qui représente un peuple, une nation devant le monde entier- et de lui dire : tu as mal travaillé, on baisse ta note…Mais où allons nous ?

Indignation. Révolte. Révolution citoyenne.      

 



[1] Voir Le coin du bachotage, « La vie politique en France, avant et après 1981 », son discours à Epinay.

(2) Il s'agissait de Pierre MENDES-FRANCE. Cité par L'Humanité des débats du vendredi 30 septembre.

"La règle d'or" : des engagements bafoués ?

publié le 10 sept. 2011, 05:04 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 6 nov. 2011, 02:11 ]

    Dans un article d’une lumineuse clarté, Me R. Weyl, nous rappelle que le texte de la constitution n’est qu’une marche dans l’édifice constitutionnel qui structure la vie politique de notre pays. Il rappelle ainsi que la France est tenue de respecter ses engagements internationaux comme sa signature au bas du Pacte des Nations Unies de 1966 sur les droits économiques, sociaux et culturels. On peut aussi rappeler que le préambule de la constitution de 1946, cité dans le préambule de celle de 1958, fait partie de notre droit positif, en principe fait pour être respecté c’est-à-dire appliqué.

Que dit ce préambule ?

    « Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tente d'asservir et dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinct de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits et les libertés de l'homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République.

Il proclame, en outre, comme particulièrement nécessaires à notre temps, les principes politiques, économiques et sociaux ci-après :

La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme.

Tout homme persécuté en raison de son action faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires la République.

Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions de ses croyances.

Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui les réglementent.

Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises.

Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité.

La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.

Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence.

La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales

La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'Etat.

(…). »

    Ce préambule est aussi une règle d’or. Mais la signature de certains hommes d’Etat est dévalorisée par leur action concrète. Je rappelle que le principe d’un déficit des dépenses publiques non supérieur à 3% du P.I.B. figure déjà dans le traité de Maastricht. Qu’est devenue cette obligation ? face à ces devoirs le gouvernement l’a pulvérisée. Et surtout en diminuant massivement ses recettes et cela de façon unilatérale en faveur des plus riches, l’Etat ne pouvait qu’aggraver la situation, c’est-à-dire aggraver le déficit.

Pourquoi et au nom de quoi cette règle d’or : La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement devrait-elle passer après la règle d’or du budget ? l’Etat se démunit au profit des riches et vient ensuite réduire les droits fondamentaux du reste des citoyens. Oui, il faut s’indigner ! (avant de passer à l’action).

J.-P. R.

  

UN PROJET DE RÈGLE D’OR OU PLUTÔT DE RÈGLE DU VEAU D’OR.

 

par Me Roland WEIL,

avocat.

 

    Le projet de « règle d'or » à inscrire dans la Constitution mérite bien son nom, puisqu'il s'agit de la règle du veau d'or. On peut être profane en sciences économiques et comprendre cependant la simplicité de l'évidence. On ne peut pas habiller Pierre sans déshabiller Paul, ni nourrir le privé sans affamer le public. Le rôle de l'Etat est d'assurer les besoins publics, mais si ses moyens de les assurer sont soumis aux profits du privé et si les bénéficiaires de ces profits privés sont dispensés de contribuer aux besoins du public, il est clair que la chandelle est brûlée des deux bouts.

    Limiter les déficits publics, certes, mais en coupant dans quoi ? Ce devrait être dans les bénéfices faits sur notre dos, dans ceux que procurent à certains les aventures militaires extérieures. Mais c'est dans les dépenses d'utilité publique, l'éducation, la santé, que se font les coupes. C'est bien sa réforme du système de santé qu'Obama sacrifie. La recette n'est pas nouvelle : ceux qui ont vécu ces années se rappellent les décrets Laval, du nom de celui qui allait devenir le bras droit des nazis en France occupée, et qui, en 1935, avait institué la «politique de la hache», coupant dans les traitements des fonctionnaires (-10%, JPR) et les dépenses publiques.

    Aujourd'hui il s'agit simplement d'officialiser et de constitutionnaliser le désengagement social de l'État, de ce que les « libéraux » appellent abominablement « l'Etat providence ».

    Mais il y a maintenant une autre « règle d'or », mondialement obligatoire, conquise et consacrée par les progrès de la conscience universelle. C'est celle proclamée par l'article 11 du pacte des Nations unies de 1966 sur les droits économiques, sociaux et culturels, aux termes duquel « Les États parties au présent pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu'à une amélioration constante de ses conditions d existence. Les États prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit... ».

    Et l'article 12 proclame le droit à la santé, et la liste continue dans les articles suivants.

    Et ce n'est pas une simple déclaration d'intention, car l'article 2 a déclaré : « Les États parties au présent pacte s'engagent à assurer le droit égal qu'ont l'homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels qui sont énumérés dans le présent pacte ».

    Cette obligation est d'ailleurs telle que dans un arrêt de 2008 la Cour de cassation faisait application de l'article 7 garantissant le droit au travail.

    Le désengagement social de l'État est donc contraire aux obligations contractées internationalement par la France, et que le peuple de France dans sa souveraineté sur ses institutions peut rappeler à ses gouvernants et autres institutionnels qui les violent. L'association Droit Solidarité se propose d'inviter dès la prochaine rentrée ses associations partenaires à lancer ensemble une grande campagne pour le respect de l'article 11. Et il peut ne pas être inutile, à l'approche des éventuels débats constitutionnels, de rappeler que la réforme proposée est tout simplement un défi à des règles fondamentales consacrées par des textes internationaux qui constituent une obligation pour la France qui s'est engagée à les respecter et que cet argument pourra être rappelé lors des débats parlementaires.

MELENCHON, PLANTU, LE ROUGE-BRUN, L’IMMONDE…

publié le 8 juil. 2011, 02:22 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 6 oct. 2019, 05:19 ]

J’ai vu le dessin de Plantu, dans l’Express, qui montre Marine Le Pen avec son brassard type 1933 à l’extrême droite, et J.-L. Mélenchon avec le même brassard, placé, lui, à l’extrême-gauche.

Ce rapprochement, cette assimilation même sont très mal ressentis par des gens de ma sensibilité.

Au fond, on retrouve la -déjà vieille- thèse révisionniste : Hitler-Staline, même combat. C’est le coup du pacte germano-soviétique. C’est la thèse de Hannah Arendt dans son livre « le totalitarisme ». C’est la thèse débile et infantile des « extrêmes qui se rejoignent », la thèse winockienne du "fer à cheval". Je ne suis pas assez âgé pour évoquer des faits de résistance en 1940-45, mais Plantu sait assez ce que les juifs de la MOI ont enduré aux côtés et au sein du parti communiste français contre la Milice de Vichy, régime que Jean-Marie Le Pen n’a jamais désavoué.

Sur quoi repose cette assimilation insultante ?

J’ai démontré dans de nombreux articles de ce blog qu’il est FAUX de dire que les ouvriers qui votaient communiste votent maintenant FN. Cette stupidité journalistique, plantuesque et Mondo-expressienne ne résiste pas à l’analyse. Qu’on relise mes articles sur la Moselle, l’Alsace, l’Ardèche, la banlieue lyonnaise…

Peut-on prendre le NON au TCE comme prétexte ? Mais a-t-on oublié que 55% de l’électorat socialiste a voté non lors de ce referendum et que Plantu doit donc les affubler de ce brassard dégradant, nouvelle étoile jaune ? que penser de ce parti qui appelle à voter OUI[1] alors que ses troupes le désertent pour voter NON ? Comment ce parti espère-t-il gouverner avec une telle incohérence essentielle entre ses cadres et son électorat ?

Il est vrai que l’on retrouve cette incohérence dans les colonnes du MONDE qui est socialement/culturellement de gauche mais économiquement résolument à droite, OMC, FMI, Commission européenne, etc….

A cet égard, il me revient un souvenir.

Dès la décision du CIO (comité international olympique) en faveur de Londres, le Monde a sorti une « une » démolissant sans détour cette France moisie, retardataire, rétrograde, qui n’avait eu que ce qu’elle méritait face à cette Angleterre de Tony au sourire qui va d’une oreille à l’autre, libéral-socialiste (sic), ouvrant délibérément une nouvelle voie non pas entre le capitalisme et le socialisme, mais entre le capitalisme et la social-démocratie ! tâche délicate mais qui réussit… Jusqu’à ce que Le Monde soit obligé de changer sans délai sa « une » parce que les attentats dans le métro de Londres modifiaient tout le contexte. Ou plutôt, ils remettaient les choses dans leur contexte. Le Monde triomphant avait oublié un détail : l’Angleterre libérale, ouverte, dynamique, resplendissante, successful était AUSSI un pays en guerre !

Et le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage.

Mais ce ne sont là que des sornettes, n’est-ce pas Plantu ? Le capitalisme c’est la Paix ! comme eût pu dire Badinguet : Irak ; Afghanistan, Pakistan, Al Quaïda…

On sait maintenant où nous conduit le modèle anglo-écossais : les banques se cassent la figure les unes après les autres et les pauvres -car il y en a aussi en Grande-Bretagne - vont payer les pots cassés : demandez aux étudiants…. La vision Attali - Plantu - Le Monde de l’Angleterre est au fond du trou… (lire à ce sujet un excellent article du MONDE DIPLOMATIQUE).

Mais tout cela n’empêche pas nos socialos de souhaiter la victoire de Strauss-Kahn qui fera radicalement… la même chose !

A la vérité, il faut être issu des classes pauvres et savoir ce qu’est la souffrance pour tenir un langage pareil, comme celui que je suis entrain de tenir. Caricatural à cet égard est cet avis donné par un lecteur du Monde après que ce journal nous a informé de la démission d’un économiste du brain-trust de J.L. Mélenchon[2]. Je cite :  

18/01/11 - 14h57

«  Rien de surprenant, comment un intellectuel peut-il rester avec Mélenchon. Mélenchon et ses discours, sont pour les classes sociales défavorisées ou ouvrières. Pas de programme, que du populisme....''la lutte des classes'' avec le P.C.F. ».

J’en reste sur le…cul ! pardonnez-moi ce cri populiste !

Oui, les intellectuels - certains en tout cas - sont à mille lieux du monde ouvrier, des classes défavorisées… comment peuvent-ils comprendre le NON à l’Europe ? L’Europe, enfin quoi, c’est la paix, c’est la coopération des esprits, c’est l’amitié entre les peuples ; vous votez NON ? mais de quelle race êtes-vous donc ? Vous voulez la guerre ? Vous détestez les Allemands ?

Quel dédain répugnant dans ce « ses discours sont pour les classes défavorisées ». Mon brave homme, dans quel discours vous reconnaissez-vous donc ? Certainement pas dans la lutte des classes. C’est mort, oublié, enterré, tout cela, n’est-ce pas ? ou plutôt cela n’a même jamais existé. C’est une invention d’un barbu allemand du XIX° siècle.

C’est bien cette incapacité à comprendre le sens des luttes sociales qui suscite dans des esprits comme celui de Plantu et de moult intellectuels des insanités pareilles.


[1] A l’exception notable de Laurent Fabius.

 

[2] A ce sujet, est-ce que LE MONDE nous a informés de la démission du MEDEF d’Eric VERHAEGHE ?


lire aussi : Fascisme et communisme, peut-on les comparer ?

révisionnisme historique : le déshonneur du Parlement européen par P. Le Hyaric

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