plan : 1) l'ordre ancien 2) les élections de 1936 3) la permanence des comportements jusqu'en 1981 4) le "nouveau désordre électoral" 5) les oscillations des "grands partis" 6) Il reste quelques fondamentaux 7) la carte de 2012 n'a plus rien à voir avec celle de 1981. La carte des résultats de la présidentielle 2012 n’a plus grand-chose à voir avec celles de naguère. Pour expliquer le succès de l’extrême-droite, en France, des politologues ont mis en avant la "crise" voire la "fin" des idéologies. Dans les faits, cela concerne la perte d’influence de l’Eglise catholique et le recul de celle du Parti communiste français (PCF). Dans les années 80’ ne disait-on pas que Marx était mort -philosophiquement et politiquement bien sûr- ? Après la chute de l’URSS, un intellectuel américain s’est fait une pub formidable en déclarant "la fin de l’histoire", la défaite du soi-disant communisme soviétique étant la victoire définitive du capitalisme. Wall Street devenant l’horizon commun à toute l’humanité. Le devin en question était incapable d’imaginer qu’un mouvement authentiquement révolutionnaire allait naître chez lui avec Occupy-Wall Street. Beaucoup plus gravement, J.-F. Colosimo évoqua "le communisme (qui avait) définitivement levé le voile sur sa carrière ratée de religion séculière" poursuivant sa réflexion par la note suivante : "le double phénomène de la « foi » et de la « perte de la foi » dans l’histoire divinisée, tel qu’il aura été vécu au sein du monde communiste, phénomène brutal, collectif, irrémédiable, a marqué pour la notion de « croyance » une faillite sans égale dans aucun autre univers symbolique. Nous n’en ressentons encore que les premiers effets"[1]. Dans ces conditions tourmentées où la crise économique, sociale, financière et morale des pays capitalistes accentue tous les désordres, la vie politique change ; à l’ordre ancien -que je vais tâcher d’exposer - succède ce que les chercheurs du CEVIPOF, entre autres, ont appelé "le nouveau désordre électoral"[2]. J’en reste bien sûr au cas de la France.
1. L’ordre ancien La stabilité des comportements électoraux, jusqu’à ces dernières décennies, remonte à loin dans le temps. Dans notre démocratie représentative, ce sont les élections qui permettent d’analyser les comportements politiques des départements. Je m’en tiens à cet échelon administratif, sachant bien que l’on peut faire descendre l’analyse au niveau des cantons et mêmes des communes. André Siegfried ne s’en est pas privé. François Goguel a dressé des cartes sur l’ancienneté de l’orientation à droite ou à gauche des départements depuis l’élection de l’assemblée nationale en 1871. Goguel dresse ces cartes en prenant pour date de fin l’année 1946, année électorale décisive (referendum du 5 mai et élections législatives du 10 novembre). Au-delà, la Guerre froide tire le PS-SFIO vers la droite, les alliances ne sont plus les mêmes. Voici ces deux cartes[3]. Ces deux cartes sont évidemment complémentaires quoique certains départements manifestent une "orientation incertaine". Concernant l’orientation à droite, l’auteur rappelle que les motivations ont changé. Sous la III° république -en gros jusqu’en1914- le vote s’effectue en faveur d’une droite monarchiste puis catholique et nationaliste. Après la 1ère guerre mondiale et la naissance du PCF, voter à droite c’est voter contre "une transformation de la société selon les principes collectivistes" (Goguel dixit). Et c’est ainsi que des départements radicaux, de gauche avant 1914, passèrent à droite après 1919 et l’arrivée de l’homme au coureau entre les dents. Le lecteur s’est évidemment précipité sur la carte du chanoine Boulard. LIEN. CHANOINE BOULARD : LA RELIGION, VARIABLE POLITIQUE MAJEURE.(atlas). On observera que la Lorraine, l’Alsace et la Franche-Comté sont entièrement à droite (à l’exception du territoire de Belfort). Relevons aussi que les départements garonnais et le Tarn sont passés à droite après 1919. La Haute-Normandie, malgré son importante industrie textile et ses activités portuaires est toujours de droite en 1946. Mais le pays cauchois est de forte tradition catholique. Entre Paris et le Grand Est, le Bassin parisien est droitier (s’en souvenir pour l’analyse de la carte de 2012). Le Puy-de-Dôme et la Loire, malgré leurs industries puissantes (pneumatiques pour l’un, mines et sidérurgie pour l’autre) sont de droite : les ouvriers descendent de la "montagne" catholique… Concernant le vote à gauche, on remarquera que l’orientation à gauche du Nord et du Pas-de-Calais est relativement récente : depuis l’entre-deux-guerres. Pourtant, l’exploitation du charbon est séculaire ainsi que la sidérurgie et le textile lequel se développa grâce aux épouses et filles de mineurs et grâce aux machines à vapeur dès le milieu du XIX° siècle. Mais on est en terres catholiques : la Flandre bien sûr mais aussi l’Artois qui, au XVI° siècle, préféra rester sous l’autorité du roi d’Espagne plutôt que de rejoindre les provinces calvinistes du nord qui luttèrent contre le tyran et s’émancipèrent (création des Provinces-Unies). L’Action française considérait ces départements comme « terres de mission » et y envoya des militants pour un racolage qui ne fut pas sans succès. L’arc nord-ouest qui ceint le Massif central de la Nièvre à la Dordogne est de gauche depuis… la Révolution ainsi que les départements de la Méditerranée. La Meurthe&Moselle malgré son importante sidérurgie et industrie extractive est de droite en 1946.
2. Les élections de 1936 De façon générale, on votait à droite dans les pays catholiques après le sermon de Mr le curé, on suivait les consignes du "parti" que celui-ci fût le parti radical-socialiste ou la S.F.I.O. ou le PCF. Les élections du Front populaire en 1936 montrent cette "rigidité" des comportements. Contrairement à ce qui a pu être dit ici ou là, la victoire du Front populaire ne fut pas écrasante. Elle le fut en termes de sièges (386 sièges contre 224) car la discipline républicaine joua très fort entre les trois partis : l’électeur radical n’hésitant pas -ou peu- à voter pour le candidat communiste arrivé en tête. D’où les 72 sièges du PCF. Mais, par ailleurs, le droite se mobilisa -la droite française, depuis les émigrés de Coblence et les Muscadins de la Jeunesse dorée, n’est pas du genre à laisser faire la gauche- . Voici ce qu’écrit F. Goguel : D’abord, le taux d’abstention baissa à 15%, le plus bas de la Troisième République. La crainte du Front Populaire conduisit d'autre part les modérés (sic, Goguel est incorrigible) à présenter des candidats dans un certain nombre de circonscriptions du Centre et du Midi où ils n'avaient pas pris part à la compétition électorale en 1932. C'est ce qui explique la progression du pourcentage des voix de droite dans plusieurs des départements où elles avaient été les moins nombreuses en 1932. Cependant, dans certains départements où une population industrielle nombreuse a particulièrement souffert des conséquences de la crise économique, la droite recule (Ardennes, Somme, Aisne - et Paris, où, pour la première fois depuis la guerre, la droite n'obtient pas la majorité absolue des suffrages exprimés). Mais les bastions de l'Ouest, de l'Est et du sud du Massif Central tiennent bon[4] : dans plusieurs départements - Manche, Calvados, Sarthe, Mayenne, Finistère, Loire-Inférieure, Vienne, à l'Ouest ; Doubs, Haut-Rhin, Bas-Rhin, Moselle, à l'Est ; Haute-Loire et Aveyron, dans le Massif Central - le pourcentage des suffrages de droite par rapport aux inscrits est même en progression sensible.Les élections de 1936 au Pays de Montbéliard. 3. La permanence des comportements jusqu’en 1981 Plus étonnant encore, les cartes de l’élection présidentielle de 1981 confirment cette fidélité apparemment intangible de l’électorat aux options des Anciens. On a un panel de cartes de l’élection de 1981 à l’adresse suivante : http://www.france-politique.fr/resultats-election-presidentielle-1981.htm Mais la carte du second tour est la plus intéressante. http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/archive/e/e8/20070420212947!Carte-presidentielle-1981.png
Sur cette carte le chanoine Boulard retrouve tous ses petits. Le Massif armoricain, les « quatre » du Massif central, le Grand Est - à l’exception notable de la Meurthe & Moselle où, comme disait Maurice Thorez, la "percée" a eu lieu. Autres inséparables : les Pyrénées-Atlantiques, la Haute-Savoie et les Alpes maritimes. Peu de changements : pour la droite, la perte du Calvados et de la Sarthe, le gain du Var. 4. le nouveau désordre électoral Ainsi que je l’ai écrit par ailleurs, LIEN, La vie politique en France, avant et après 1981. deux nouvelles forces politiques apparaissent : les Verts et le Front national. La carte LePen de 1988 montre que "l’attaque" frontiste a commencé par l’Est avec les départements de tradition luthérienne d’Alsace et de Moselle. Les ouvriers qui ont voté Giscard ou Chirac dans ces régions sont passés à l’extrême-droite avec la crise. L’ouvriéro-lepénisme, je l’ai écrit dans mon livre paru en 2007, s’explique par ces 30% d’ouvriers qui ont voté Giscard en 1974 ou 1981 alors que l’Union de la Gauche leur proposait des augmentations de salaires, une diminution de la durée du travail, etc... et que Giscard était responsable de l’avoir-fiscal, de l’emprunt d’Etat qui porte son nom et ruineux pour le Trésor public, j’en passe. A ces 30%[5], il faut ajouter les pourcentages difficilement quantifiables d’ouvriers déçus par la politique Mitterrand, par la rigueur de 1983 et qui se sont tournés vers le FN puisque le PCF n’était plus une solution (agonie de l’URSS, stratégie du Programme commun ayant conduit à la rigueur Mitterrand, …). La carte LePen 1988 montre également que rejouent les vieilles fractures : le Bassin parisien entre la capitale et la Lorraine est anciennement à droite (Seine &Marne, Aube, Yonne, Haute-Marne). De même réapparaît la vallée de la Garonne ainsi que le Tarn, où les paysans -devenus agriculteurs- sont passés avec armes et bagages à la Coordination rurale avant de voter FN. Le littoral méditerranéen est lepéniste dès 1988. Les éléments d’explication sont nombreux. J’en parle dans mon livre. Provence et Languedoc ont été terres de la Contre-Réforme, des terreurs blanches contre-révolutionnaires, de l’Algérie française et des Pieds noirs nostalgiques, du poujadisme. Aujourd’hui, ils sont terres d’immigration pour les rentiers du nord du pays. Feux de forêts et désindustrialisation conjuguent leurs effets pour multiplier les terrains à construire. La sociologie est bouleversée et la tradition républicaine périclite lentement mais sûrement.
La carte Waechter montre que les régions de droite (Ouest
armoricain et
Grand Est) ne sont pas hostiles à l’écologie. D’ailleurs, les
écologistes ne
relèvent pas de la tradition républicaine, ils n’hésitent pas à se
maintenir au
second tour CONTRE un candidat de gauche mieux placé, acceptant par
conséquent
de se faire élire par des voix de droite (cf. les cantonales de 2011).
LIEN les
élus
EELV , élus par les voix de droite et d’extrême-droite.. Relativement à la frontière est, particulièrement en vue sur cette carte, on pourra lire le paragraphe "Riches parmi les riches" rédigé par Hervé Le Bras et E. Todd dans leur livre "Le mystère français" (Seuil, 2013). Les écologistes ont ainsi pris sans vergogne la mairie de Bègles (33) et celle de Montreuil (93) au PCF avec le concours de la droite. Mais ils ont fait partie du gouvernement dit « de la Gauche plurielle » (1997-2002). Cela ne contribue pas à éclairer les esprits. Aujourd’hui, leur course aux sièges sous les lambris dorés de la République montre qu’ils n’ont pas une conception bien différente de la vie politique que les briscards de la III° ! La vraie écologie politique est au Front de Gauche avec son programme de la "planification écologique". Les Verts peuvent prendre des voix de tous côtés. Ainsi à Paris, ils ne sont pas cantonnés à l’est mais font de bons scores dans le XV° et le XVII° arrondissement. PARIS, LES ARRONDISSEMENTS, LES VOTES, L’HISTOIRE…(PETIT ATLAS). Très élastique, leur électorat peut aller de 28,9% dans le II° arrondissement en 2010 à 5,2 en 2012 dans le même arrondissement parisien. Dans le Rhône, le score des écologistes peut varier de 9,5% -régionales 2004- à 1,7% -présidentielle 2007-, 18,2% -régionales 2010- et 2,9% -présidentielle 2012. Le vote FN a, lui aussi, des aspects volatiles. J’ai montré qu’en 1984 -élections européennes- ce sont surtout les riches qui votèrent pour ce parti patronal. Ce vote des riches, "vote des villas", n’a pas disparu mais, en 2012, N. Sarkozy étant en danger, les aisés ont serré les rangs derrière celui qui, après tout, leur garantissait l’essentiel : les cadeaux fiscaux. Le FN a toujours mis en avant l’antifiscalisme dans ses propos. Ainsi Neuilly qui vota à 17,6% des exprimés pour le FN, en 1984, ne donna plus que 5% à LePen en 2012. En revanche, le vote ouvrier pour le FN semble davantage irréversible. Cela dépend cependant de la nature de l’élection. J’ai montré - j’ai pris le cas de la Moselle- dans un autre article, LIEN VI.Sénatoriales, Présidentielle, implantation locale: le cas de la Moselle que le FN n’avait qu’une poignée de grands électeurs pour les Sénatoriales, preuve qu’il n’a pratiquement AUCUN élu dans les conseils municipaux même dans les campagnes profondes alors même que, dans ce département, il obtient à la présidentielle des scores désastreux, c’est-à-dire très élevés. Le yo-yo caractérise le nouveau désordre électoral : à Lyon - neuf arrondissements - le FN obtient 16% à la présidentielle 1995, tombe à 6,9% aux municipales 2001, remonte à 15,5% en 2002 (présidentielle), chute à 4,2 aux municipales de 2008 et n’arrive pas à 10% en 2012. 5. Les oscillations des "grands partis"
Candidat de l’UMP, en 2002, Jacques Chirac arriva en tête avec 19% des suffrages exprimés. La modestie de ce score passa au second plan devant l’essentiel : la seconde place de LePen. Mais il faut savoir que l’UMP créée pour l’occasion est un rassemblement des trois grandes tendances de la droite française : gaulliste, centriste et libérale (parti des Indépendants, devenu PR). Certes Bayrou refusa ce groupement mais d’autres ténors du centrisme se rallièrent : les Méhaignerie, Barrot, et bien d’autres. Autrement dit, les trois tendances de la droite parlementaire qui d’élections en élections recueillaient plus ou moins 40% des suffrages exprimés avaient perdu la moitié de leurs voix. La droite gouvernementale était tellement discréditée que, avant la création de l’UMP, ce fut le patron du MEDEF, le baron Ernest-Antoine Sellières qui battit la campagne, organisant des meetings, jouant le rôle de bateleur, pour montrer que la droite était toujours là. Le parti socialiste (PS) refondé en 1971 à Epinay-sur-Seine a d’abord affiché une ligne politique très à gauche. Il fallait montrer que la vieille S.F.I.O. et ses compromissions de toutes sortes était morte à jamais. En 1972, le PS signe même un programme commun de gouvernement avec le PCF et les Radicaux de gauche -lesquels sont lâchés par les radicaux de droite qui garde la "vieille maison" de la rue de Valois-. On sait maintenant que la signature de F. Mitterrand -premier secrétaire du PS - était chargée d’arrière-pensées : prendre de 2 à 3 millions de voix au PCF. Le PS devient peu à peu un parti attrape-tout - "catch all party" comme disent les Anglo-Saxons - et la rupture politique (mais pas les accords électoraux) avec le PCF en 1978, loin de le desservir, lui apporte au contraire des voix du centre et de droite. L’élection présidentielle de 1981 est une étape majeure : le coude-à-coude avec le PCF cesse et l’écart entre les deux partis atteint 10% (25/15). Il faut remonter à 1962 pour observer un tel décrochage de l’électorat. En 1962, le général De Gaulle LIEN : https://sites.google.com/site/jeanpierrerissoan/le-coin-du-bachotage/l/d-la-5-republique/laviepolitiqueenfranceavantetapres1981 avait dissous l’assemblée après le vote par cette dernière d’une motion de censure. Il demande aux Français de lui "envoyer" à la chambre des députés qui soutiendront son action. Le résultat est spectaculaire : le vote pour les gaullistes passe de 20% en 1958 à 36% en 1962[6]. On l’a dit : c’est la naissance du "fait majoritaire". En 1981, après son élection, F. Mitterrand dissout la chambre élue en 1978 - et qui n’avait donc pas effectué son mandat de 5 ans - et soulève la "vague rose" qui donne 36% des voix exprimés au PS -stricto sensu- lequel n’avait obtenu que 23% trois ans auparavant. C’est le début du yo-yo électoral : en 1984, lors des élections européennes, la liste menée par Lionel Jospin obtient 20% des suffrages. Baisse rapide et brutale. En 1986, renouvellement normal de la chambre, le PS remonte à 31%. A la présidentielle de 1988, F. Mitterrand obtient 34% au premier tour. Réitérant son coup de 1981, il dissout la chambre élue en 1986, mais malgré sa réélection, les Français ne lui donnent pas la majorité absolue, seulement une majorité relative. Après des gouvernements malheureux, (Rocard, E. Cresson, Bérégovoy), le PS obtient un désastreux 17% en 1993. On sait le score de 2002 : 16% et la troisième place pour Lionel Jospin mais la remontée de S. Royal à 25% en 2007. Quant au parti communiste, son histoire est celle d’une lente descente aux enfers. Surtout celle de ses candidats aux différentes présidentielles. Auparavant, il était le modèle de stabilité électorale. Après son score historique de 1946 - 28% des exprimés - il subit un premier choc avec l’arrivée de De Gaulle au pouvoir : il n’obtient que 19% aux législatives de 1958. Il se redressera à 22% en 1967. En 1973 (législatives) 21,3% ; en 1978 (législatives) 20,3% ; européennes de 1979 : 20,5%. Aux élections cantonales : 23,8 (1970) ; 22,7 (1973) ; 22,8 (1976) ; 22,5 (1979). Le second choc est la victoire de Mitterrand en 1981 : perte de 5%, G. Marchais obtient un peu plus de 15%. Il reste à ce niveau quelque temps (15,9% aux cantonales de 1982) puis c’est le début de la débâcle avec les Européennes de 1984 où la liste Marchais dépasse à peine les 10%. Le PCF présidentiel reste à 8% puis tombe à 3 (2002) et à 1,9% (2007). En revanche, il se maintient à 10% pour les cantonales : paradoxalement, ce parti révolutionnaire devient un parti de notables : ses élus locaux restent influents - près de 200 conseillers généraux - et il a un groupe au Sénat qui est plus nombreux que celui de l’Assemblée nationale ! On sait que l’élection d’un sénateur implique le vote de délégués des conseils municipaux, pour l’essentiel. L’avenir nous dira si les 11,1% obtenu par le Front de Gauche à la présidentielle 2012 relèvent du yo-yo ou de la mise en place d’un mouvement pérenne (compte-tenu que le PCF n’est qu’une des composantes du FdG). Quoiqu’il en soit, le comportement de l’électorat communiste a changé : avant 2012, le vote pour le candidat PC à la présidentielle était anecdotique mais le vote pour le candidat PC à la députation -un mois après- peut donner des scores comme celui d’ A. Chassaigne (Puy-de-Dôme) : 43% au 1er tour de 2007. Il n’en demeure pas moins que le maintien d’un groupe PCF à l’Assemblée est devenu aléatoire.
6. Il reste quelques fondamentaux. J’en vois au moins deux. 1). La géographie du vote
Bayrou reste fidèle à la carte du chanoine Boulard. On peut consulter la carte
du vote de 2007 : http://mtg.labos.univ-rouen.fr/PDF/Michel%20Bussi.pdf. Je publie la carte du vote du 22 avril 2012. http://cybergeo.revues.org/docannexe/image/25363/img-12.jpg 2). Le vote de la gauche communiste est devenu un "archipel" selon l’expression de l’historien Martelli. Elle reste, en maigrissant, fidèle à ses pôles historiques. Je renvoie à la lecture de la carte « la gauche hors PS en 2007 » publiée dans l’article : "Un Front de Gauche d’ampleur nationale". Un Front de Gauche d’ampleur nationale 7. la carte de 2012 n’a plus rien à voir avec celle de 1981. Autant la carte de 1981 est assimilable à toutes celles qui l’ont précédée, autant celle de 2012 est méconnaissable et, donc, à connaître. Les cinq départements bretons sont passés à gauche, les Côtes d’Armor ne sont plus seules. La droite garde sa guirlande périphérique : Manche, Mayenne, Maine&Loire, Vendée. Les Pyrénées-Atlantiques sont roses désormais et, surprise historique, les quatre départements auvergnats également : même le Cantal et la Haute-Loire. Si bien qu’un immense quart sud-ouest, à l’intérieur de la grande boucle de la Loire et à l’ouest du Rhône, est coloré de manière homogène. En revanche, le quart sud-est du pays réserve des surprises. Si le vote à droite des Alpes-Maritimes et du Var n’est plus une surprise, il est par contre étonnant de voir les Bouches-du-Rhône virer au bleu, le Gard aussi et la Drôme...Trois départements qui furent des fiefs du parti socialiste ainsi que des points forts pour le PCF (sauf la Drôme). Le Grand Est ne change pas, il est bleu, sauf le Territoire-de-Belfort et la Meurthe&Moselle où le travail politique en profondeur des communistes profite aujourd’hui aux socialistes. On observera aussi qu’entre l’Ile-de-France et la Lorraine, il n’y a pas de solution de continuité, en cela, la carte 2012 reste fidèle à la carte de Goguel sur « l’ancienneté de l’implantation à droite ».
[1] J.-F. Colosimo, enseignant à l’institut saint-Serge de Paris, titulaire d’un Master of divinity, auteur de « Dieu est américain, De la Théodémocratie aux Etats-Unis », essai sur le fondamentalisme américain, Fayard, 2006. [2] Titre de l’ouvrage sorti des Presses de la F.N.S.P. en 2004, publié sous la direction de Bruno Cautrès et Nonna Mayer, sous-titre : les leçons du 21 avril 2002. 414 pages, 16 chapitres. [3] Extraites du n°159 des cahiers de la F.N.S.P., "géographie des élections françaises sous la III° et la IV° république", A. COLIN, 1970. [5] 30% est la moyenne NATIONALE. Dans le Grand Est -Alsace, Lorraine, Franche-Comté- le pourcentage d’ouvriers qui votèrent à droite en 1974 et 1981 est certainement proche de 70%. LIEN II. Vote F.N. et vote ouvrier : le cas de la MOSELLE. [6] "Les élections sous le V° république", Alain Lancelot, collection Que sais-je ? n°2109. |