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Amérique du nord
USA : THE ORIGINAL DEPLORABLES
mots-clés : basket of deplorables, Hillary Clinton, Trump, Franklin Benjamin, Jefferson Thomas, G. Washington, T. Paine "basket of deplorables" est un mot – historique ? – de la candidate du parti démocrate à l’élection présidentielle américaine de 2016, Mme H. Clinton. Elle le regrettera. Son impact aux États-Unis semble beaucoup plus grand qu’il ne pourrait l’être en France, pays à qui a été emprunté ce mot. A lire les réactions américaines, j’ai acquis la conviction que sa traduction la plus proche du ressenti serait "bande de pauvres types". Elle parlait des électeurs blancs, pauvres, et donc souvent "petits blancs", au pouvoir d’achat bien maigre et à la tête peu pleine, qui ralliait progressivement les rangs de D. Trump. Un an après son échec, Mme Clinton évoquera publiquement ce mot malheureux dont elle pense, en effet, qu’il a eu des conséquences sur son score électoral, particulièrement dans les États de la Rust Belt. Le document ci-dessous, extrait d’un article du journal L’Humanité, montre que le parti Républicain a voulu s’en emparer et faire de l’insulte un argument offensif. Les exemples historiques sont nombreux : aux Pays-Bas calvinistes, les Espagnols qualifièrent de "gueux" les révoltés et l’aristocratie hollandaise se proclama du parti des Gueux ; en France, les sans-culottes ont donné une fortune inouïe à ce costume qui, abandonnant la culotte aristocratique pour le pantalon plébéien, qualifiait ces "gens montrant leur cul à travers leurs guenilles". Aux Etats-Unis mêmes, le mot "yankee" est un sobriquet qui voulait stigmatiser le comportement des Américains du Nord-Est, sans-gêne et envahissants, mais ces derniers l’ont parfaitement assumé contre les Sudistes. Etc… Ce couple de parfaits Américains, au bon
goût assuré, non seulement reprend à son compte cette dénomination de "deplorables" mais veut nous dire
qu’ils sont, eux et leurs semblables, les parfaits descendants, les héritiers
légitimes de leurs ancêtres Pères Fondateurs (PF). On peut
reconnaître en effet, floqués sur le tee-shirt républicain, le portrait de G.
Washington, celui de Jefferson, de Benjamin Franklin et de Thomas Paine. Voter
Trump ce serait, à les en croire, voter pour ces illustres pères de l’Amérique.
Cette mise en avant de ces personnalités, il est vrai hors du commun, montre cependant que l’Amérique, dans sa masse –je ne parle pas des universitaires ni d’intellectuels comme Michael Moore ou du courant politique incarné par Bernie Sanders – n’a pas assumé une fonction de remise en cause, une fonction de dépassement d’un héritage sur lequel il aurait fallu exercer un droit d’inventaire. Prenons, un à un, l’apport de ces PF. Mais auparavant, il faut parler d’une géographie où trois de ces noms floqués vont se retrouver : la vallée de l’Ohio. Après la guerre contre les Français et les Indiens[1], guerre atroce, les Anglais décident de fixer les choses. De quoi s’agit-il ? Les Français maîtrisaient -très mal- l’axe Mississippi-Ohio-Grands Lacs-Saint Laurent (Montréal). Les Anglais eux venaient de la côte atlantique et progressaient vers l’Ouest -la conquête de l’Ouest commence en effet dès les origines-, en l’occurrence, il s’agissait là de souder les frontières Ouest des Treize colonies à la vallée de l'Ohio. Le conflit avec les Français était inévitable, avec les Indiens également, puisque progresser vers l’Ouest cela veut dire, pour les pionniers, éjecter les natives un peu plus loin : la terre est si grande… Les Anglais gagnent. Mais ceux de Londres décident de FIXER une ligne de démarcation définitive, Nord-Sud, entre les Treize colonies à l’Est et les territoires indiens à l’Ouest. Ce sera la Proclamation line, signée par le roi anglais Georges III, en 1763. "La proclamation, cependant, a consterné les colons britanniques pour deux raisons. D’une part, cela signifiait que des limites étaient fixées aux perspectives de colonisation et de spéculation sur les terres occidentales, et cela enlevait le contrôle de l'ouest des mains des coloniaux. D’autre part, les hommes les plus ambitieux des colonies voyaient ainsi la Proclamation comme la perte du contrôle sur leur propre fortune". Fureur indescriptible des pionniers, en effet, qui voient leurs ambitions s’éteindre, fureur des spéculateurs à la G. Washington et B. Franklin qui ne pourront plus revendre à hauts prix aux pionniers les terres qu’ils auront volées aux Indiens. Cette Proclamation line, "l’armée ne pouvait pas la faire respecter, les colons n’en tenaient souvent pas compte et des spéculateurs fonciers comme Benjamin Franklin et George Washington, qui avaient espéré devenir riches en vendant des terres au-delà des Appalaches à des pionniers allant vers l’Ouest, faisaient pression pour qu’elle soit modifiée". "La milice du Kentucky traversait la rivière Ohio presque chaque année pour mettre le feu aux villages et récoltes des Shawnees. Thomas Jefferson voulait que ces derniers soient exterminés ou expulsés de leurs terres et il préconisait de retourner d’autres tribus contre eux"[2]. Il y a là une des causes les plus nettes de la guerre d’Indépendance. Une victoire des Insurgés -c’est-à-dire des Indépendantistes américains- serait -et d’ailleurs sera- une grave défaite pour les Indiens. Le chemin de l’extermination des Indiens. Et voilà comment on retrouve nos compères associés dans une entreprise d’enrichissement via la spoliation des Indiens.
Benjamin Franklin Que peut-on reprocher à ce brave homme, débonnaire, inventeur du paratonnerre et qu’une improbable tournée diplomatique a rendu si populaire, en France même ? A la vérité, Franklin était
devenu à la fin des années 1740, l’un des colons les plus riches du continent
nord-américain". Il acquit un blason, acheta plusieurs esclaves et
s’installa dans une nouvelle maison plus spacieuse dans une partie plus calme
de la ville de Philadelphie. Avant 1748, cependant, son service politique le plus important
fut d’organiser une milice pour la défense de la colonie contre une éventuelle
invasion par les Français et les Espagnols, dont les corsaires opéraient sur la
rivière Delaware. Il devint membre du conseil municipal de Philadelphie en 1748,
juge de paix en 1749 et, en 1751, conseiller municipal et membre de l’Assemblée
de la Pennsylvanie. En 1753, Franklin devint officier royal, sous-maître général des
postes, chargé du courrier dans toutes les colonies du Nord
En 1755, il a alors 49 ans, il participe à l’expédition Braddock qui a pour objectif de détruite le Fort Duquesne, bastion français de l’Ohio. Il participe comme logisticien qui fournit moult chariots et provisions à l’expédition. L’échec le pousse à devenir colonel de la milice[3] de Pennsylvanie chargé de la défense de la frontière occidentale de la colonie. Il prend en charge les fournitures de l’artillerie. Je rappelle que Franklin était très intéressé – au sens le plus matériel du terme – par la guerre contre les Français et leurs alliés indiens : il était actionnaire de la Ohio Company et deviendra l’un des 72 actionnaires de la Grand Ohio Company, créée après la victoire contre les Français et la création de la Proclamation line. Sa considération à l’égard des Indiens était minime : Benjamin Franklin, dit dans son autobiographie de 1750 : "Si tel est le désir de la Providence que d’extirper ces Sauvages afin de faire de la place pour les cultivateurs du sol, il n’est pas improbable que le rhum soit un moyen tout désigné." (Franklin, 2006, 15)[4]. Morale très inspirée par le calvinisme selon lequel Dieu fait tout et l’homme n’est qu’objet entre Ses mains. On a vu cela avec Cromwell vis-à-vis des Irlandais. Dès 1758, Il s’est senti en droit d’écrire The Way to Wealth, (la voie vers la richesse)[5]. Dans les décennies suivantes, il est devenu le héros d'innombrables artisans du début du XIXe siècle et d'hommes d'affaires autodidactes qui cherchaient une justification à leur ascension et à leurs activités lucratives. Ils ont été les créateurs de l'image folklorique moderne de Franklin, l'homme qui a fini par personnifier ni plus ni moins que le rêve américain. Thomas Jefferson. Un monument de l’histoire des Etats-Unis. Stricto sensu : il est gravé dans le granite du Mont Rushmore ! Deuxième président des Etats-Unis. Et pourtant on lui doit des sentences terribles comme : "les Indiens, ces sauvages sans pitié, dont la manière bien connue de faire la guerre est de tout massacrer, sans distinction d'âge, de sexe ni de condition" (extrait de la déclaration d’indépendance rédigée par lui-même). Trente-sept ans plus tard, il n’a pas changé d’avis : dans The Papers of Thomas Jefferson, le 29 décembre 1813, on peut lire : "Cette malheureuse race, que l’on a eu tant de peine à sauver et à civiliser, a par sa désertion inattendue et ses féroces actes de barbarie justifié de sa propre extermination et attend désormais que nous décidions de son sort."[6] Plus tard, Jefferson, devenu président des Etats-Unis, finança l’expédition de William Clark et Meriwether Lewis qui eurent à reconnaître l’itinéraire qui, remontant le cours du Missouri, traverse les Rocheuses pour aboutir au Pacifique. Le président discuta longuement avec Clark du problème posé par l’existence des Indiens et évoque carrément, nous dit Jonathan Kirsch, journaliste au L.A. Times, « ce qui serait qualifié aujourd’hui de génocide. ‘We must leave it to yourself to decide [whether] the end proposed should be their extermination or their removal’», ajoutant que « The same world would scarcely do for them and us »[7]. Un historien américain d’aujourd’hui peut écrire : «There was no room for Indians in Jefferson's empire of liberty»[8] manière de répéter/adapter "la loi (anglaise) ne suppose pas l'existence d'une personne telle qu'un Irlandais catholique romain". Cela annonce la sentence terrible de la Cour Suprême des Etats-Unis : « Les Indiens sont aujourd'hui sous tutelle. Leurs relations avec les Etats-Unis ressemblent à celles qui existent entre un pupille et son tuteur ». Georges Washington Dans l’été 1779, G. Washington envoie trois armées détruire le camp des Iroquois. Les deux armées indiennes sont défaites. Washington investit la capitale de la ligue des tribus iroquoises. Pratiquant la "scorch-earth tactics" comme disaient les Anglais en Irlande ou en Écosse - ou terre brûlée - les Américains, en dignes héritiers, détruisirent tout sur leur passage, brûlant quarante villages. Il est vrai que le mot d’ordre de G. Washington était clair, dans ses Écrits (1779) on peut lire les instructions suivantes : "The Iroquois villages (have) not (to) be merely overrun, but destroyed »[9]. « You have to carry the war into the Heart of the Country of (the Iroquois) nations ; to cut off their settlements, destroy their next Year’s crops, and do them every others mischief of which time and circumstances will permit. (…). It will be essential to ruin their crops now in the ground and prevent them planting more"[10]. Les Iroquois ne se relevèrent jamais de ce désastre. Maisons détruites et récoltes dévastées, les survivants passèrent l’hiver dans le froid près des chutes du Niagara et la faim au ventre. Washington gagna ses galons de Caunotaucarius ce qui, en langue iroquoise, signifie «destructeur de villes» (Town Destroyer, Stannard)[11]. J’ai évoqué son statut de principal actionnaire de la Ohio company. Quant à l’esclavage, nulle ambiguïté là aussi. Son domaine de Mount-Vernon s’étend sur 8000 acres (soit plus de 3200 hectares) dont 3500 (1400 ha) sont en culture et la propriété longe le fleuve Potomac sur 10 miles (16 km). G. Washington est un propriétaire tourné vers l’innovation agronomique. Il possède un grand nombre d’esclaves (317 à la fin de sa vie) comme toutes les first families de Virginie (dont le famille Jefferson). 41 esclaves pour sa seule demeure principale. Ces esclaves travaillent soit comme ouvriers agricoles, soit comme ouvriers des ateliers, soit comme domestiques de maison. Mount-Vernon est en effet aussi un centre de production de cidre, de whisky, de tonneaux. On y fabrique la charpente et les briques pour les nombreux bâtiments d’exploitation. Des esclaves filent et tissent la laine et le lin produits in situ mais aussi le coton importé des West Indies[12]. Cette valorisation des productions, ce mixage agriculture/industrie ne sont pas sans rappeler l’activité de la gentry anglaise ou des hobereaux prussiens. Washington est également actionnaire de sociétés capitalistes : la Ohio land Company, la James River Company, la Bank of Columbia, la Bank of Alexandria. Lorsqu’il prit la direction de l’Armée
continentale – dénomination qui sera changée en Armée des Etats-Unis après l’indépendance – Washington refusa toute
entrée de Noirs dans ses effectifs. Fussent-ils libres. Son adjoint, H. Gates,
envoie les instructions (juillet 1775) : « n’enrôler aucun déserteur de l’armée anglaise, ni aucun nègre ou
vagabond ». Décision surprenante et grave : Washington ajoute le
racisme à son esclavagisme. Les deux notions ne se recoupent pas
totalement : on peut être esclavagiste, à cette date, et accepter la
présence de Noirs libres par ailleurs. En manque d’effectifs, l’Armée
continentale devait accueillir ces soldats. elle le fera, pais APRÈS l'armée anglaise qui, la première, enrôla des Noirs. On oppose fréquemment le testament de G. Washington aux accusations d’esclavagisme qui lui sont portées. G. Washington s’est comporté sur ce point comme un Virginien ordinaire, achetant et vendant des esclaves à sa convenance. Il écrit le 9 septembre 1786 : "there are two debts which press hard upon me. One of which, if there is no other resource, I must sell land or Negroes to discharge"[13]. On est en droit d’attendre autre chose de la part de cet homme politique éminent qui a produit l’histoire. Or, il avait un moyen de faire avancer les choses. Durant ses deux mandats présidentiels d’abord. Ensuite par sa Farewell Address, son discours d’adieu. Devant toute l’opinion américaine, il aurait pu poser les termes du problème de l’esclavage et poser des jalons pour le résoudre. Précédemment, dans une lettre privée – mais ce n’est qu’une lettre privée – il disait son souhait de voir adopter un plan par lequel "slavery in this Country may be abolished by slow, sure & imperceptible derges"[14]. Son discours d’adieu n’en fait nullement état. Rien. Et cela seul compte chez un homme d’Etat : ses déclarations publiques. Lors de la quasi-guerre de 1798 entre la France et les Etats-Unis - aspect singulier du conflit maritime plus grandiose entre la France et l’Angleterre - Washington écrit à son successeur à la présidence : "avec les Français, nous devrons attaquer sans cesse - G. Washington envisage un débarquement français avec tête de pont, JPR - pour leur ôter la facilité de soulever les mécontents et les esclaves qu’ils chercheront sans doute à armer"[15]. On observe que l’ex-président n’envisage toujours pas d’abolir "l’institution particulière" et que sa lettre est un hommage du vice à la vertu : à cette date, la France vit encore, officiellement, sous le régime de l’abolition de l’esclavage votée par la Convention jacobine en 1794[16]. En réalité, le principal Père fondateur des Etats-Unis d’Amérique est très "anglais". Lorsqu’il déclare en 1779 : "Notre cause est noble, c’est la cause de l’humanité", son humanité exclut les Indiens et les Noirs. Il parle du droit des Anglais, devenu en l’occurrence le droit des Américains. Le droit des vrais Anglo-saxons protestants. Lorsqu’il évoque "la pureté de (sa) conduite durant tout le cours de (sa) vie" (sic) on constate que sa formation intellectuelle, morale et religieuse, lui ferme l’accès à la réalité. Cela relativise beaucoup l’élection divine, le choix de Dieu : "Aucun peuple, plus que celui des Etats-Unis" dit Washington dans son discours d’inauguration "n’est tenu de remercier et d’adorer la main invisible[17] qui conduit les affaires des hommes. Chaque pas qui les a fait avancer dans la voie de l’indépendance nationale semble porter la marque de l’intervention providentielle". Dieu peut-il ainsi oublier les Indiens et les Noirs ? Le Dieu des Américains, oui. Thomas Paine C’est sans doute celui de ces quatre PF qui mérite le moins de critique(s)[18]. N’oublions pas qu’il a été député du Pas-de-Calais à notre Convention nationale… Si le parti de Donald Trump veut se l’accaparer, c’est pour continuer R. Reagan et G. Bush sr. "Ce mouvement de récupération par la droite est très ponctuel : Dans le grand mouvement de récupération des héros américains par la droite à partir du bicentenaire de 1976, Paine est, encore, l’objet d’une tentative d’appropriation par l’aile dite "libertarienne" du parti républicain. On décontextualise la méfiance républicaine vis-à-vis du pouvoir central et on tente de faire de Paine un précurseur libéral des partisans du "moins d’État". Le summum fut atteint quand Ronald Reagan cita Thomas Paine dans son discours du 17 juillet 1980 pour appeler à sa contre-révolution conservatrice et quand des députés de son parti proposèrent d’ériger une statue de Paine dans la capitale fédérale. Georges Bush sr y alla également de sa petite citation lors de la première guerre du Golfe, mais ces tentatives restent assez ponctuelles et Paine reste une icône de la gauche progressiste"[19]. Le même auteur rappelle que lors des deux guerres mondiales c’est "le Paine de l’enthousiasme patriotique d’American Crisis qui est, à chaque fois, ressorti du placard pour légitimer l’union nationale dans les moments de danger. (…)". Cet enthousiasme communicatif de Paine a été exploité pour enfanter une "foi américaine, toute de mouvement, (qui) ne se connaît que dans la mobilisation patriotique en vue de la guerre ou de la réalisation d’une promesse de progrès qui implique lutte, conquête, apothéose. Hier pour le Nouveau Monde. Demain pour le monde entier" (Robert N. Bellah, sociologue américain cité par Colosimo[20] (p.104)). Concernant les Indiens et les esclaves, les positions de Paine sont très timorées : "Malgré des condamnations répétées de la traite des esclaves et de l’esclavage, Thomas Paine ne s’insurge jamais du fait que la constitution américaine, dont il fait l’éloge, pérennise l’esclavage. Comme le note Ann Thomson, "Les sentiments abolitionnistes de Paine ne donnent pas lieu à des publications, au contraire, il semble très réticent à toute expression publique de son opinion à ce sujet" et N. Caron ajoute "Certains auteurs ont cherché à faire de Paine un champion des droits de tous ; les femmes, cependant, sont largement exclues du projet révolutionnaire painien et les populations noires ou amérindiennes ne sont que rarement évoquées dans ses écrits publics"[21].
[1] "French et Indian war",1754-1763, c’est le nom donné à cette guerre dans les pays anglophones. En France, nous disons « guerre de sept ans ». [2] Colin G. Calloway, « La révolution américaine en territoire indien », Annales historiques de la Révolution française [En ligne], 363 | janvier-mars 2011, mis en ligne le 01 mars 2014, consulté le 21 novembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/ahrf/11950 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ahrf.11950 [3] Grade bien inférieur au grade de colonel dans l’armée de sa Majesté aux célèbres tuniques rouges… [4] Source : Du génocide «éprouvé» à l’ethnocide affirmé. Les Indiens d’Amérique aux confins des définitions, par Garrait-Bouvier Anne, http://memories-testimony.com/notice/du-genocide-eprouve-a-lethnocide-affirme-les-indiens-damerique-aux-confins-des-definitions/ et n’est-il pas dit dans les Saintes Ecritures : « Vous ne les craindrez point : c’est Yahvé votre Dieu qui combat pour vous ». Dernières dispositions de Moïse, Deutéronome 3- 22… [5] Traduit et publié en France sous le titre "Conseils pour faire fortune". [6] Cité par Anne GARRAIT-BOUVIER, ouvrage cité. [7] « Nous vous laissons décider si la solution à proposer doit être leur extermination ou leur déportation » et « Le même monde n’est pas fait pour être à la fois à eux et à nous ». [8] Landon Y. JONES, compte-rendu (par Jonathan Kirsch précédemment cité) de son livre William Clark and the Shaping of the West dans le LOS ANGELES TIMES du 6 juin 2004. « Il n’y avait pas de place pour les Indiens dans le pays libre de Jefferson ». Cf. également http://www.bluecorncomics.com/genocide.htm . [9] « Les villages iroquois ne doivent pas être simplement investis mais détruits ». [10] Writing of Washington, vol. 14 (p.199) et vol.15 (pp. 189-193) ; cité par CALLOWAY, page 51. Traduction possible : Vous devez porter la guerre dans le cœur du pays Iroquois. Démolir toutes leurs installations, détruire les récoltes de l’année prochaine, et faire tous les dommages que le temps et les circonstances permettront. (…). Il est capital de saccager leurs récoltes dès maintenant, celles qui sont dans la terre et celles qui sont à venir. [11] David E. STANNARD (University of Hawaii), American Holocaust, the conquest of the new World, Oxford University Press, New York, 1992, 360 pages. Cf. page 120. [12] L’égreneuse à coton n’est pas encore inventée et le coton américain n’est pas encore la monoculture du Sud qui exigera les millions d’esclaves que l’on sait. Le coton travaillé à Mount-Vernon vient alors de l’importation à partir des Antilles anglaises (West Indies). [13] « Deux dettes pèsent actuellement lourdement sur mes épaules. Pour l’une d’elles, si je n’ai pas d’autres possibilités, je devrais vendre des terres ou des nègres afin de l’honorer ». C’est également pour ‘honorer’ des dettes que le propriétaire de « l’oncle Tom » décide de le vendre. [14] « Où l’esclavage serait aboli par degrés, de manière lente, sûre et imperceptible », lettre à J. F. Mercer, 9 septembre 1786. [15] Lettre au président John Adams, datée du 25 septembre 1798. [16] Il sera rétabli légalement par Bonaparte (qui incarne une autre tendance de la Révolution). [17] La « main invisible du marché » serait donc aussi d’essence divine ? Comment dès lors oser l’embrigader par des mesures politiques ? C’est impossible… [18] Consulter, par exemple, https://www.ploutocraties.com/angleterre-radical-paine-wollstonec mais aussi https://www.humanite.fr/node/422321 [19] Marc Belissa, "La légende grise des dernières années de Thomas Paine en Amérique, 1802‑1809", Annales historiques de la Révolution française [En ligne], 360 | avril-juin 2010, mis en ligne le 01 juin 2013, consulté le 21 novembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/ahrf/11657 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ahrf.11657. [20] J.-F. Colosimo (Institut Saint-Serge, Paris), "Dieu est américain, De la Théodémocratie en Amérique". [21] Nathalie Caron, « Thomas Paine et l’éloge des révolutions », Transatlantica [En ligne], 2 | 2006, mis en ligne le 07 juillet 2006, consulté le 02 décembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/transatlantica/1145 ; DOI : https://doi.org/10.4000/transatlantica.1145 |
Géorgie (USA) « Sans nous, l’administration Biden ne pourra pas avancer »
Le travail de terrain de Stacey ABRAMS profite à Biden en Géorgie (Le Monde).
Je publie cet article paru dans « le MONDE » de Dimanche/lundi 8-9 novembre 2020 qui montre le rôle important de Mme Stacey Abrams dans la victoire historique de J. Biden dans l’État de Géorgie. Je le publie avec un peu de vanité parce que j’ai publié, après les mid-term élections de 2018, une série d’articles sur la Géorgie dont le quatrième était entièrement consacré à Mme Abrams qui avait failli remporter le poste de gouverneur. Article intitulé LE COMBAT DE STACEY ABRAMS QUI A BOULEVERSÉ LA GÉORGIE. Géorgie : études électorales (mid-term 2018) 4ème partie. C’est Christophe DEROUBAIX, grand reporter à l’Humanité, qui avait signalé à ses lecteurs ce grand combat qui se déroulait dans cet État du sud, acquis aux Républicains depuis des lustres. PS. les mots en gras sont soulignés par moi-même. Jean-Pierre
RISSOAN
En Géorgie, Joe Biden récolte les fruits du travail de terrain de Stacey Abrams Elle a repris un des principaux combats du mouvement des droits civiques, celui pour le droit de vote, et a fédéré les minorités empêchées d’exercer le leur. « Il est prévu quand, le défilé en l’honneur de Stacey Abrams ? », a tweeté, vendredi 6 novembre, l’éditrice Lisa Lucas. « Les républicains lui ont pris son poste de gouverneure, en retour, elle a pris l’État », a écrit un certain @u2_randy. Plusieurs figures du Parti démocrate – Hillary Clinton, Alexandria Ocasio-Cortez ou Jon Ossoff, candidat à l’élection au Sénat en Géorgie – n’ont pas manqué de souligner son apport crucial dans la campagne de 2020. Samedi 7 novembre, alors que le nom du 46e président des Etats-Unis n’était pas encore connu, un constat s’imposait : Joe Biden et l’ensemble du camp démocrate devaient une fière chandelle à Stacey Abrams. En effet, si Joe Biden a pulvérisé les records de participation chez les électeurs démocrates, obtenant plus de 2,4 millions de voix le 3 novembre, contre moins de 1,9 millions pour Hillary Clinton quatre ans plus tôt, c’est sans doute en partie grâce à l’extraordinaire travail de fond de cette avocate fiscaliste, diplômée de Yale, romancière, militante et femme politique, âgée de 46 ans. En 2002, elle devient procureure générale adjointe de la ville d’Atlanta. En2006, elle se présente et est élue par les électeurs démocrates à l’Assemblée de Géorgie. De 2011 à 2017, elle prend la tête du groupe démocrate à l’Assemblée de Géorgie. En2016, lors de la convention démocrate de Philadelphie, elle se fait remarquer, parlant de sa passion pour le service public. Mais c’est en 2018 qu’elle émerge vraiment sur la scène nationale. Soutenue par Bernie Sanders, elle devient la première candidate noire à un poste de gouverneur. Elle perd de peu face au républicain Brian Kemp. Elle dénonce des irrégularités lors du scrutin, évoque des bulletins rejetés, des pannes de machines à voter. Son équipe y voit une tentative de restreindre l’accès au vote, notamment celui des électeurs noirs. En 2013, elle lance le New Georgia Project, qu’elle dirigera jusqu’en 2016. Cette organisation pousse les personnes non blanches à s’inscrire sur les listes électorales, afin qu’elles prennent leur destin en main. Lorsque le New Georgia Project a été lancé, 1,2 million de non-Blancs et de femmes non mariées avaient le droit de vote, mais ne l’exerçaient pas, faute d’être inscrites sur les listes électorales, expliquait, à la chaîne ABCNEWS, Nse Ufot, qui lui a succédé à la tête de l’organisation. Elle enclenche une dynamique : au cours des trois dernières années, elle a permis l’inscription de 500.000 électeurs supplémentaires sur les listes électorales. EN 2018, CANDIDATE AU POSTE DE GOUVERNEUR, ELLE DÉNONCE DES IRRÉGULARITÉS, ÉVOQUE DES BULLETINS REJETÉS, DES PANNES DE MACHINES À VOTER En 2018, après sa défaite face à Brian Kemp, elle repart en croisade avec, comme objectif, l’élection de 2020. Elle lance Fair Fight. Cette fois, il s’agit de lutter contre les techniques destinées à décourager ou à empêcher les électeurs – qui appartiennent en général à des minorités – d’exercer leur droit de vote, en limitant, par exemple, le nombre de bureaux de vote dans une circonscription, ce qui les oblige à choisir entre faire la queue pour voter ou ne pas aller voter. Elle reprend un des principaux combats du mouvement des droits civiques : celui pour le droit de vote. Elle fédère des organisations afro-américaines, latinos et asiatiques. En partie grâce à ses efforts, plus de 4,95 millions d’électeurs ont participé à l’élection de 2020 (contre 4,1 millions en 2016), apportant un soutien décisif à Joe Biden. La Géorgie passe du rouge au bleu. «La Géorgie a acquis ce statut de swing state (État pivot) grâce à l'arrivée de Latinos, d’Asiatiques et au retour de milliers de Noirs - un mouvement inverse de la grande migration afro-américaine (du Sud vers le Midwest, le Nord-Est et l'Ouest, à partir de 1910) - favorables aux démocrates mais aussi grâce au travail de fond de ces organisations qui sont parvenues à mobiliser les minorités», confirme Bernard Farga, professeur de sciences politiques à l'université Emory d’Atlanta. Vendredi matin, Stacey Abrams n'a pas cherché à tirer la couverture à elle. Dans un Tweet, elle a remercié toutes les organisations ayant contribué au changement en Géorgie et a inscrit sa démarche dans celle des grands défenseurs des droits civiques. Après avoir été brièvement considérée comme une possible colistière du candidat démocrate, elle est de plus en plus perçue comme la nouvelle porteuse du flambeau du mouvement incarné par deux Géorgiens emblématiques et figures majeures de la lutte pour les droits des Afro- Américains : Martin Luther King Jr et le représentant John Lewis. Liz Garbus, l'une des réalisatrices du film All In. The Fight for Democracy (Amazon. Prime), qui évoque les combats de Stacey Abrams, résume, dans The Hollywood Reporter : « Elle a permis aux habitants de Géorgie d'être représentés par des élus qui leur ressemblent vraiment. ». Refus d'admettre la défaite Chez les républicains, en revanche, elle fait figure d'épouvantail. Certains des partisans du président Trump, comme Byron York, commentateur de Fox News, ont critiqué, en 2018, le refus de Mme Abrams d'admettre sa défaite face à Brian Kemp. Aujourd'hui, il affirme que cette attitude a créé un précédent permettant à Donald Trump de refuser d'accepter les résultats de 2020. A ceci près que Stacey Abrams a déclaré qu'elle mettait fin à sa campagne, avant de conclure : « La démocratie a laissé tomber les Géorgiens. ». Si la Géorgie offre la présidence à M. Biden, celui-ci devra trouver une manière de remercier Stacey Abrams. La tweetosphère n'est pas en manque de suggestions. Comme celle consistant à lui confier les clés du Parti démocrate, comme le tweetait jeudi soir Rachel R. Gonzalez, une militante du Parti.
PIERRE BOUVIER
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août 2019 ; Deux Amériques idéologiques et sociologiques
La dérive « nativiste » de Trump et le virage à gauche des prétendants démocrates reposent sur les évolutions des citoyens eux-mêmes. Un fossé abyssal se creuse entre les deux électorats. Des électeurs républicains de plus en plus à droite, des électeurs démocrates de plus en plus à gauche : voilà la donnée majeure qui permet de comprendre la nature du débat politique outre-Atlantique. Ce mouvement d’éloignement des deux blocs s’accélère (voir l’infographie ci-contre). S’il n’est pas récent (on peut même le faire remonter au début des années 1970), il s’est accentué sous les présidences de W. Bush et Barack Obama, et encore plus depuis l’élection de Trump. Chaque exercice du pouvoir par l’un des présidents cités « radicalise » son opposition, ce qui prépare une alternance plus marquée au scrutin suivant. La « réaction » conservatrice à l’élection de Barack Obama avait pris la forme des Tea Parties, puis du « trumpisme ». Depuis l’entrée en fonction de Trump, les idées du socialisme démocratique gagnent en popularité, notamment au sein de la jeunesse. Avec 55 %, le bloc démocrate est le plus puissantCette polarisation idéologique et politique irrigue l’ensemble de la société. Elle divise les habitants du pays jusque dans leur mode de vie. L’électeur républicain type est plus enclin à vivre en dehors des villes à être adepte des barbecues et de la bière, à se passionner pour le football américain, tandis que son concitoyen démocrate en pince pour l’urbain, les déplacements doux, le bio, le vin blanc et le « soccer » (le football). Une étude a montré que les repas de famille sont écourtés lorsque les membres ont des votes différents. L’identité sociologique des deux montagnes « bleue » et « rouge » diffère tout autant : l’électorat démocrate est plus jeune, plus féminin et plus « multicolore » tandis que celui des républicains s’inscrit en négatif : blanc, masculin, plus âgé. Dernière information utile : les « quantités » ne sont pas égales. Une fois que le Pew Research Center, auteur de cette enquête, a demandé aux « indépendants » de choisir le candidat qu’ils choisiraient en dernier ressort, le rapport de forces est net : 55 % pour les démocrates, 45 % pour les républicains. Pour Bernie Sanders, la clé de l’élection réside plus dans la mobilisation des électeurs « naturels » du Parti démocrate que dans une tentative vaine de convaincre des républicains modérés. Pourquoi le pays se trouve-t-il dans un état de division qu’il n’a pas connu depuis les années 1920, voire depuis la fin de la guerre de Sécession ? Trois politologues (McCarty, Poole et Rosenthal) ont établi que la polarisation allait de pair avec l’explosion des inégalités et un fort taux d’immigrés. Les inégalités sociales ont retrouvé leur niveau des années 1920, soit avant le New Deal et la mise en place de l’État providence et de politiques de redistribution. Depuis plusieurs décennies, l’imposition sur les revenus et patrimoines des plus riches – le fameux 1 % – ne cesse d’être allégée par les députés et sénateurs des deux partis. La grande réforme fiscale de Trump a encore ajouté un coup de rabot supplémentaire sur la contribution des millionnaires et milliardaires dans un pays qui poussa, dans les années 1950, son taux d’imposition jusqu’à 93 %. Quant à la proportion d’immigrés et d’enfants d’immigrés, elle a également rejoint sa toise des années 1920, après les grands apports migratoires des années 1880-1910. Le pays est engagé dans un processus de diversification démographique qui crispe une partie importante de la population blanche. Le mouvement de polarisation a enclenché une réorganisation des deux grands partis selon un clivage gauche-droite, traditionnel en Europe, mais relativement étranger aux États-Unis. Christophe Deroubaix Grand reporter à l'Humanité, 2 août 2019 and now ... voir aussi : Etats-Unis : la révolution SANDERS (1ère partie)Etats-unis : la révolution Sanders (2ème partie) |
La Géorgie et Atlanta
L"élection du gouverneur de Géorgie, à l'occasion des mid-terms élections de novembre 2018, a failli défrayer la chronique car, pour la toute première fois dans l'histoire des États-Unis , une femme noire pouvait triompher. Il s'agit de Ms Stacey ABRAMS. Je me suis attaché à comprendre le phénomène, à suivre les résultats électoraux et cela m’amena à remonter très loin. Ce n'est qu'au quatrième article que j'aborde les chiffres de l'élection. j'ai d'abord étudié la géographie de l’État de Géorgie et les apports de l'histoire du temps long : puis j'ai étudié l'histoire récente : celle du combat des Noirs pour leurs droits civils et politiques : Les
luttes pour l’égalité, la dé-ségrégation, les droits civils. Ensuite, j'ai abordé l'étude la de la vie économique contemporaine en ciblant le travail sur l'extraordinaire croissance de la métropole de Géorgie : Atlanta : ATLANTA, MÉTROPOLE D’UNE GÉORGIE MONDIALISÉE Enfin, l'analyse du résultat de l'élection LE COMBAT DE STACEY ABRAMS QUI A BOULEVERSÉ LA GÉORGIE avec la présidentielle 2020, la liste s’agrandit : |
Georgie : études électorales (mid-term 2018) 4ème partie
LE COMBAT DE STACEY ABRAMS QUI A BOULEVERSÉ LA GÉORGIE "La course au poste de gouverneur de Géorgie n’a jamais
été aussi serrée. La réputation conservatrice de l’État sudiste
d’Autant en emporte le vent est pourtant presque proverbiale. Le mérite
en revient à Stacey Abrams, 45 ans, ancienne présidente du groupe
démocrate à la chambre d’État, avocate, romancière et progressiste
assumée. Soutien de Bernie Sanders lors des primaires 2016, sa stratégie
est claire : pas de louvoiements centristes, un programme à gauche
(avec notamment l’opposition à la peine de mort et la réforme du système
de justice criminelle) ; pas de tentatives de récupérer des
républicains modérés, mais la mobilisation des électeurs « naturels » du
camp démocrate (jeunes, femmes et minorités). La Géorgie est un État en plein changement démographique
avec l’arrivée de jeunes Africains-Américains en provenance des grandes
villes du Nord-Est et du Midwest, où leurs aînés étaient allés chercher
du boulot entre les années 1910 et 1950. Cette « nouvelle grande
migration » favorisera-t-elle l’élection historique d’une gouverneure
africaine-américaine au pays de Scarlett O’Hara ?", Christophe DEROUBAIX, grand reporter. "Stacey Abrams, the Democratic nominee, is hoping to become the first African-American woman to be elected governor anywhere in the United States. Brian Kemp, the Republican nominee and the secretary of state, wants to keep his party in power in the Capitol. The race has been among the country’s most expensive and vitriolic, and it is a test of whether sophisticated efforts to attract and mobilize new voters can help Democrats win in a fast-changing Georgia". Voici comment le New York Times présentait les enjeux de l’élection du nouveau gouverneur de l’Etat de Géorgie lors des élections de milieu de mandat de novembre 2018. Les résultats officiels définitifs montrent que cet évènement qui eût été historique était d’abord réalisable :
Il
s’en est fallu de 54.723 voix soit 1,4% de différence. Et Mme Abrams a mis dix
jours à reconnaître ces résultats, nous verrons pourquoi. Dans les travaux
préparatoires précédents, nous avons vu ce que représente historiquement la
Géorgie. Nous avons vu son formidable dynamisme, incarné par sa métropole
Atlanta. Nous allons voir maintenant le comportement électoral des Géorgiens
devant cette échéance dont le résultat, décevant pour les Démocrates et les
démocrates[1], n’est, espérons-le, que
partie remise. Après avoir présenté les
aspects généraux de la confrontation, j’observerai les points forts des
Démocrates puis… les autres. NB. la couleur traditionnelle des Démocrates est le bleu, rouge pour les Républicains.
I. UNE ÉLECTION AIGUISÉE
Généralement, la participation
électorale est faible lors des élections de mi-mandat et sensiblement plus
élevée pour la présidentielle. En 2018, elle fut exceptionnellement forte dans
tous les Etats-Unis et notamment en Géorgie. Malheureusement, les chiffres dont
nous disposons (tirés du New York Times, de Wikipédia, de publications internet) ne donnent
jamais le chiffre des électeurs INSCRITS. Seules les comparaisons des
élections, d’une convocation à l’autre, permettent de saisir les évolutions. Voici les résultats des trois
dernières élections du gouverneur de Géorgie dont le mandat, renouvelable, est
de 4 ans. Par rapport à 2014, il y eut
1.399.528 suffrages exprimés supplémentaires : plus 55% ! Stacey Abrams
progresse de 785.209 suffrages mais les Républicains se sont aussi mobilisés
progressant de 637.247 voix. Le candidat libertarien, extrême-droite, disparait
devant le "danger" démocrate (et noir), votant pour le Républicain. carte n°1. (plus bas : carte de la densité de population).
Si l’on compare maintenant à l’élection présidentielle de 2016, on a le tableau suivant qui montre que les électeurs se sont mobilisés à hauteur égale pour les deux élections qui sont pourtant de nature différente :
Trump et Clinton obtenaient respectivement 51,3% et 45,6% des suffrages géorgiens en 2016 mais Républicains et Démocrates obtenaient 50,2 et 48,8 en 2018. Mme Abrams gagne +3,2% et plus de 86.000 voix sur Clinton et Kemp ne fait pas le plein des voix du GOP. Stacey Abrams a donc fait une magnifique campagne. Les suffrages exprimés sont en nombre quasiment égal à celui de la présidentielle, ce qui, je le répète, est extrêmement rare. Les résultats par comté – la Géorgie en compte 159, ils sont l’équivalent de nos départements – indiquent 29 comtés en faveur de Stacey Abrams dont 15 urbains. Le Républicain en a par conséquent gagné 130 ! Il y a donc eu une claire concentration géographique des voix Démocrates et c’est Atlanta lato sensu qui fut derrière Stacey Abrams. Il y a une analyse encore
plus fine : la carte des comtés selon la progression des votes par rapport
à la présidentielle de 2016. Cette carte est délicate à lire : les comtés
bleus ne sont pas ceux où Ms Abrams a battu M. Kemp mais ceux où elle a
progressé par rapport au vote Clinton de 2016. C’est une carte pour les
militants Démocrates : elle leur ouvre des perspectives pour 2020 [2] . carte n°2. Les bastions Démocrates hors-Atlanta sont les vieilles villes noires cotonnières, fiefs de la NAACP : avec Albany, on a Columbus, Macon, Augusta et Savannah. Ces villes ont comme secrété leur doublet, leur doublet Blanc avec ghetto de riches (white flight ?), comme Columbia, Houston et Effingham qui figurent dans le top10 des comtés de Géorgie pour le revenu médian par ménage (Median Household Income). On y vote donc fortement Républicain. Cf. tableau ci-dessous. Le fait nouveau est que Ms Abrams a fait progresser sensiblement le parti Démocrate dans ces bastions Républicains (surlignés en jaune ; les chiffres romains renvoient à la carte). Ms Abrams fut donc une excellente candidate grignotant toujours plus l’électorat blanc.
1
= % Républicain en 2018 ; 2 = Dém. ; 3 = %White dans la population totale 4 =Median Household Income pour le comté (en $). 5 = gain Démocrate sur 2016 II. LES POINTS FORTS DES DÉMOCRATES La carte électorale de l’État de Géorgie n’a pas changé depuis des lustres. A. ATLANTA Le député de la ville
d’Atlanta – 5°congressionnel district - n’est autre que John Lewis, l’un des six
leaders historiques du Civils rights movement.
Le vote Démocrate a toujours, à Atlanta en tout cas, un parfum militant. Comparée à celle des densités
de population par comté on aperçoit immédiatement le rôle joué par
l’agglomération d’Atlanta. J’ai dit la difficulté à circonscrire cette
agglomération qui peut, selon certains, intégrer 30 comtés. Ce qui est sûr
c’est que le noyau est constitué des 5 comtés suivants : Fulton – comté
qui a pour chef-lieu Atlanta city -, Dekalb, Cobb, Gwinnett et Clayton. Avec 5
autres comtés, autour, nous avons une agglomération de dix comtés qui forment l’Atlanta
Regional Commission (ARC). C’est
le véritable cœur urbain. Plus périphériques les autres comtés sont rurbains
voire ruraux. Pour les comtés de
l’ARC les résultats sont les suivants :
* Atlanta Regional Commission * en 2011 Un simple calcul montre que Stacey Abrams obtient plus de 60% de ses voix dans ces 10 comtés ! devançant son adversaire de 530.000 voix. Kemp, lui, en obtient 31,7%. C’est donc dans les 149 autres comtés qu’il va remporter sa victoire. Les 5 comtés historiques sont nettement en faveur de Ms. Abrams alors que la "première couronne" est plus partagée, plus inégalitaire, plus âgée, plus blanche. On a déjà l’opposition classique avec Clayton vs Fayette. D’un côté, un comté noir, jeune et pauvre ; de l’autre, un comté blanc, vieux et riche. La "richesse" du comté de Fulton – il s’agit du PIC : per capita income, le revenu par tête –, au fort coefficient de Noirs, s’explique par la présence, en ses murs, de la ville de Sandy Springs, ghetto blanc au PIC de $70.000 pour près de 100.000 habitants (census de 2010). Cela influe nécessairement sur la moyenne générale de Fulton. Rajoutons qu’Atlanta a su générer une classe moyenne noire. Observons que la première couronne ne donne pas la majorité à Stacey Abrams. Un comté comme Cherokee, très blanc, riche et âgé, et très Républicain – dans un rapport de 3 pour 1 - annonce les conditions que l’on trouvera dans les seconde et troisième couronnes. B. LES AUTRES BASTIONS DEMOCRATES "Beyond Atlanta, areas of Democratic strength in Georgia are limited to the state’s midsize cities, like Augusta and Athens, and the Black Belt, a stripe of majority African-American counties running from south of Columbus in western Georgia to Augusta in the east"[3] : en dehors d’Atlanta, les zones de force du parti Démocrate en Géorgie sont limitées aux villes de taille moyenne, comme Augusta et Athens, et à la Black Belt, cette bande de comtés de majorité Afro-américaine qui va du sud de Columbus, à l’ouest, jusqu’à Augusta à l’est de l’Etat. Cette citation serait excellente si elle n’omettait pas la place-forte Démocrate de Savannah dont les pages précédentes ont montré le rôle historique dans la lutte pour les droits civiques et le rôle économique tout à fait contemporain dans la maritimisation de l’économie géorgienne. La bande de comtés carte n°1 qui va de Columbus à Augusta via Macon correspond à la région du Classic heartland, chaque ville étant un foyer de l’industrialisation textile, c’est un chapelet ininterrompu de peuplement noir –reliquat du Black Belt de Baulig -, les comtés qui votent Républicains sont roses davantage que rouges car la majorité y est faible. Mais le vote Démocrate est souvent majoritaire grâce à la vigueur et aux succès de la lutte des années 60’ qui empêchent beaucoup de Noirs d’aujourd’hui de sombrer dans l’obscurantisme évangélique. Athens est une antenne universitaire, intellectuelle et culturelle d’Atlanta. Le vote Démocrate y est ancré. La région environnant Albany est toujours majoritairement Démocrate. Malgré les efforts des charcutiers électoraux, la circonscription – les Américains disent district – de Columbus-Albany ne peut échapper au parti pour la représentation à Washington. L’agglomération de Savannah Savannah est en plein développement. Elle appartient à la Combined Statistical Areas de Savannah–Hinesville–Statesboro qui compte 544.000 hab. (estimations 2017). Je présente ici le tableau des cinq comtés qui encadre administrativement cette aire statistique avec les résultats de l’élection.
Les résultats électoraux sont bons : en 2010, le vote Démocrate représentait 71% du vote Républicain, même Chatham – le comté de Savannah – avait voté pour le GOP ! en 2016, le vote Démocrate représente 93,4% du vote adverse et, en 2018, 98,4. Progrès mais pas victoire. C’est que les Républicains sont très actifs ici aussi…
71% 93,4% 98,4% III. LES QUARTIERS RÉPUBLICAINS Les Républicains sont électoralement puissants dans les villes et comtés riches de l’agglomération d’Atlanta ; dans le nord de l’Etat de Géorgie et dans le sud. Paradoxalement, ils sont puissants aussi dans des régions pauvres. La carte du vote Démocrate (© David Leip 2016 All Rights Reserved) indique, en creux, les zones de force du parti Républicain.
A. LE NORD DE L’ÉTAT Dans le nord de la Géorgie, M. Kemp a gagné chaque comté d’au moins 30 points de pourcentage et le plus souvent avec un écart de 50 à 60 points. Les lacs et les montagnes de la région en font une destination de choix pour les maisons de vacances et les collectivités de retraités. La région est majoritairement blanche. Les Hispaniques, et non les Noirs, forment le groupe minoritaire le plus important, attirés par les emplois du nord de la Géorgie dans les petites entreprises manufacturières et agro-industrielles[4]. NB. = PVI = partisan voting index.
Aujourd’hui, le nord de l’Etat est représenté par les 9° et 10° circonscriptions qui délèguent un député à la Chambre des Représentants à Washington. Ces deux circonscriptions ont des caractéristiques communes[5] : elles sont très rurales et le pourcentage de Blancs est très élevé. Les Hispaniques sont à plus de 12%, cela est corrélé avec l’industrie de l’élevage avicole[6]. NB. Le PVI signifie "Partisan Voting Index" ce que je traduis par Indice de vote partisan. C’est un indice américain original calculé en fonction des résultats antérieurs du territoire, en fonction des résultats des territoires comparables ailleurs dans l’Union, etc… L'index est mis à jour après chaque cycle électoral [7]. Avec un PVI de R+27 et de R+31, ces deux circonscriptions sont des bastions Républicains. A contrario, le 5° district – Atlanta - est un bastion Démocrate avec D+31. Avec un pourcentage de cols bleus très élevé, la 14° circonscription de Géorgie est l’une des plus ouvrières de l’ État, la 9° la suit de près. Ces districts appalachiens ont une population blanche européenne qui vient d’abord des tout premiers pionniers. Populations très fières de leurs racines récentes et très attachées au souvenir de leur participation à la Guerre de Sécession. Cela explique la longue fidélité au parti Démocrate anti-Yankees mais la direction nationale du parti de l’Âne basculant du côté des Noirs et de leur Civils Rights et penchant du côté des droits des LGBT – ce que le fondamentalisme religieux des pionniers (venus avec la Bible dans une main et l’épée dans l’autre) interdit dogmatiquement – a provoqué le passage de ces électeurs WASP dans les rangs Républicains avec armes et bagages. Le texte de Baulig (lien :Géorgie : études électorales (mid-term 2018) ) indique que la vie régionale fut vite obérée par les difficultés de communication et les Appalaches furent un isolat. Et ce fut une région aidée, subventionnée, chose rare aux Etats-Unis. Ce fut notamment le cas pour la mise en place des réseaux routier et autoroutier[8]. Une nouvelle population blanche se superpose : les upper class d’Atlanta qui viennent s’installer sur les versants des premières collines appalachiennes, boisées voire forestières. Là le vote Républicain est un vote de classe (cf. le comté évoqué de Cherokee). Nouvelle couche à partir des années 1990 surtout : celle liée à l’industrie de la volaille, la fameuse poultry belt. Cadres venus du Nord-Est des Etats-Unis, main-d’œuvre venue de l’étranger : les Hispaniques et Latinos[9]. Berceau de l’ agro-business avicole. La ville de Gainesville dans le comté de Hall est maintenant la "Poultry Capital of the World" après avoir été la Reine des cités des Appalaches… Elle est la ville de naissance de Jesse Jewell (1902-1975) qui est le créateur de l’industrie de la volaille. J. Jewell est un ancien du Georgia Institute of technology. C’est lui qui a eu l’idée de fournir des poussins aux fermiers alentour, ainsi que des aliments industriels et de récupérer le poulet à viande d’abattoir. L’abattoir et l’usine de conditionnement c’est Jewell qui les établit. "He pioneered vertical integration" écrit la New Georgia Encyclopedia[10]. Il innove en embauchant des travailleurs noirs, mal payés. D’ailleurs, il y eut un vif épisode social : la tentative de syndicalisation à l’AFL-CIO fut combattue, au sens propre, par une foule excitée au sein de laquelle on a signalé des membres de la direction de J. D. Jewell Incorporated (cf. l’article cité). C’était au début des années 50’, en pleine chasse aux sorcières. Patron de combat, il est à l’origine du syndicat professionnel de la volaille, aujourd’hui National Chicken Council, installé à Washington pour le lobbying et qui finance officiellement le parti Républicain à 88% et le parti Démocrate à 12%[11]. Comme dans un district industriel, l’initiative de Jewell a essaimé un peu partout et les entreprises de volailles industrielles pullulent. Dans les années 1990, les entreprises de transformation de la volaille et des viandes ont commencé à beaucoup recruter dans les communautés hispaniques des États-Unis, ce qui a contribué à stimuler la migration vers les zones de transformation de la volaille[12]. En 10 ans, de 1990 à 2000, les comtés de Gilmer et de Gordon sont devenus les 4° et 10° comtés des Etats-Unis pour le nombre de population hispanique, avec des augmentations de 1500%. A Gainesville, Hispaniques et Latinos représentent 40% de la population (census de 2010) et 6 sur les 10 plus gros employeurs qui ont leur siège social dans la ville sont des volaillers intégrés. Le comté de Hall–Gainesville est connecté à Atlanta par l’Interstate Highway system, il vote Républicain à 72,7% en 2016 et à 73,3 en 2018. Les éléphants font de la résistance. B. LE SUD Il
faut distinguer l’intérieur rural et le littoral atlantique.(ci-dessous : carte des densités de population par comté). a) L’intérieur Le sud de la Géorgie, où sont cultivés des cacahuètes, du tabac et du coton, est principalement voué à l’agriculture et la popu-lation y est moins dense et aussi plus dispersée. Le sud-est est presque aussi solidement Républicain que le nord (Micha Cohen).
Le tableau ci-contre donne quelques statistiques qui permettent de brosser un portrait rapide de ces comtés (les lettres en début de noms renvoient à la carte n°2) : Blancs très majoritaires, plutôt âgés sauf Jeff-Davis – qui doit héberger une industrie de la volaille -, faibles revenus par tête. Et un vote Républicain quasi unanimiste. Nous sommes ici dans le Deep South très profond. Je renvoie le lecteur à la carte qui figure dans l’article de Micha Cohen, que j’ai souvent cité, disponible sur le net, et qui donne la configuration des districts pour la Chambre des représentants à Washington. Il s’agit de l’ancien découpage mais le district n°1 de 2012 circonscrit assez bien cette partie de la Géorgie la plus obscure –sauf le littoral évidemment -. L'importance de l'agriculture "marginale" aux Etats-Unis est soulignée par G. Dorel dans son travail sur les régions des USA (GU Hachette-Belin). Il est amené à évoquer à la fois les Appalaches et le Vieux Sud. "Sur les 2 327 000 exploitations officiellement recensées, presque 7 sur 10 sont considérées comme marginales : leur chiffre d'affaires annuel, inférieur à 40 000 dollars, ne permet guère de dégager une marge notable d'investissement ; il autorise un certain mode de vie, mais non une activité économique normale, dans un pays développé. Beaucoup de ces "exploitants" sont soit des retraités, vivotant dans quelque vallée reculée des Appalaches, soit encore les derniers représentants de ces métayers noirs qui, longtemps, ont constitué le fonds de population rurale du Vieux Sud. Tous ne sont pas misérables ; ce microfundium américain soutient une classe très hétérogène de retraités, d'anciens fermiers qui ont dû se résoudre à exercer une autre activité, ou de "rurbains", ces citadins qui ont découvert les avantages, notamment fiscaux, de la petite ferme". Ce paragraphe est exploitable aussi bien pour le Nord de la Géorgie que pour son Sud où ont été transplantées les fermes d’élevage du poussin au poulet, travail effectué par le fermier rémunéré par l’industriel. Au cœur de la Géorgie évangélique Le tableau suivant (source wiki) montre que les Évangéliques sont devenus largement majoritaires, beaucoup plus encore qu’au plan de l’Union : 38% de soumis en Géorgie au lieu de 25,4% sur l’ensemble des États-Unis.
Voici de larges extraits d’un article du Monde diplomatique, toujours bien renseigné, qui rapporte les constats d’un envoyé spécial dans le Sud lors de la campagne d’Obama, en 2012[13]. Les enseignements sont les mêmes aujourd’hui. L’auteur montre que la déferlante évangélique crée un monolithe politique définitivement républicain. "(En) Géorgie — comme (en) Alabama, Caroline du Sud, Mississippi ou Arkansas (…) les démocrates ont peu de chances de s’imposer. "Mis à part Atlanta, c’est un Etat pauvre, rural, religieux", analyse M. Mitchell pour expliquer les défaites à répétition de son parti. "Les gens sont très conservateurs : il s’agit du cœur de la Bible Belt [la ceinture de la Bible] ". L’appellation n’est pas usurpée : à eux seuls, la Géorgie et ses dix millions d’habitants totalisent plus de douze mille églises (et plus de trois millions de membres actifs). Méthodistes, baptistes, presbytériens, pentecôtistes, épiscopaliens : le visiteur arpentant les villages de cet Etat n’est pas certain d’apercevoir un bâtiment public, mais il croisera à coup sûr une pléthore d’édifices religieux. Rien qu’à Darien[14], on en compte une dizaine. La plupart combattent le "péché" — l’avortement, la contraception, l’homosexualité, les paris — mais jouent aussi un rôle important dans la vie sociale, en distribuant de la nourriture aux pauvres, en s’occupant des personnes âgées, en assurant des cours de soutien scolaire pour les enfants, etc. Le tout à bas prix, grâce au travail de bénévoles et à l’argent donné par les paroissiens". b) Le littoral Le littoral
océanique de la Géorgie semble maintenant bien aménagé. A bien des égards et mutatis mutandis, bien entendu, il fait
penser au Languedoc : un littoral traversé – que l’on songe à l’I-95 - par
un flux massif de transit : les snow birds qui vont de Nlle-Angleterre/NewYork en Floride et
que l’on tâche d’arrêter par une offre touristique conséquente. Sea Island
est une île
de l'archipel
des Sea Islands
(cf. carte[15]).
Île de Géorgie relevant administrativement du comté de
Glynn, elle a accueilli en 2004 le 30e sommet
du G8. On imagine les infrastructures de toutes sortes (hôtelleries,
aéroports, internet, GPS, restaurations rapide et non rapide, services médicaux
d’urgence, j’en oublie) indispensables pour recevoir une telle conférence
d’importance mondiale.
A cela s’ajoutent les parcs naturels continentaux, la mise en valeur de l’histoire locale : Fort McAllister State Park (vestige intact de la Confédération), Savannah - Savannah fonde une partie de sa réputation sur ses parcs aménagés, ses calèches et son architecture Antebellum (cad d’avant la guerre de Sécession). Son quartier historique regorge de places pavées et de parcs comme le Forsyth Park, ombragé par des chênes couverts de mousse espagnole -, les parcs naturels maritimes (wildlife refuge). Fort Stewart est une base de l’armée américaine (11.000 habitants recensés en 2000). La région regorge de militaires vétérans au pouvoir d’achat substantiel, qui ont leur propre hôpital militaire, et certains habitent les gated golf communities [16] alimentées en leur temps par les vols blancs : l’exode devant les majorités noires de Savannah (ou des villes du Nord-Est). Ces Blancs évangéliques pratiquent la compassion avec méthode : La soupe populaire "Food for the Soul", basée à l'église méthodiste unie de Richmond Hill et gérée par dix églises séparées, se relayant toutes les semaines, distribue plus de 350 repas chauds aux familles dans le besoin à Richmond Hill. The "Way Station", un autre programme d’évangélisation dans de nombreuses églises, est en place depuis plus de vingt ans et fournit de la nourriture, des vêtements et d’autres objets qui améliorent la vie des familles de la communauté.(Wikipaédia). Brunswick (comté de Glynn Hill) is located in southeastern Georgia, approximately halfway between Jacksonville and Savannah. The city is located at the apex of the bight of the Georgia coast, the westernmost point on the Atlantic seaboard, and is naturally sheltered by two barrier islands, Jekyll and St. Simons. Après un sommet à 21.000 hab. en 1960, la ville n’a cessé de perdre de la population. On note une reprise depuis 2010…Le comté de Glynn, en revanche, est passé de 19400 à 92.620 hab. en 2017.
La fraude : je l'ai dit, Ms ABRAMS a attendu 10 jours avant de reconnaître que son concurrent "sera déclaré élu". On pourra lire cet article du Monde, écrit le jour du vote : le New York times aborde plus franchement la question : https://www.nytimes.com/2018/11/07/us/kemp-abrams-georgia-governor-elections.html la sénatrice E. Warren a carrément mis les pieds dans le plat : https://www.nytimes.com/2018/12/14/us/politics/elizabeth-warren-president.html : "Senator Elizabeth Warren, Democrat of Massachusetts and a possible contender for the 2020 presidential race, spoke to graduates of Morgan State University, a historically black college in Baltimore, about racial discrimination and wealth inequality". la seconde partie de ce travail a montré que le droit de vote pour les Noirs au Sud des États-Unis a été une vraie bataille et cela continue. à preuve cet article du Monde diplomatique écrit bien avant la bataille de 2018, en octobre 2014 : https://www.monde-diplomatique.fr/2014/10/MOCK/50886 (Retour feutré de la discrimination électorale : MD. octobre 2014). Tout cela avec des relents de racisme qui rappelle que la Géorgie demeure en convalescence... la performance de Ms Tracey ABRAMS est d'autant plus remarquable.
Voici un document que j'ai reçu (16 mai 2019) de la part de Stacey ABRAMS qui a créé une association pour combattre les discriminations exercées à l'encontre du simple droit d'inscription sur ls listes électorales en Géorgie :
[1] Par cette coquetterie, je veux distinguer les membres et électeurs du parti Démocrate américain et les démocrates de tous pays qui partagent les valeurs universelles de la déclaration universelle des droits de l’homme. [2] A blue ‘tsunami’ in Atlanta’s suburbs reshapes Georgia politics, lien : https://politics.myajc.com/news/state--regional-govt--politics/blue-tsunami-atlanta-suburbs-reshapes-georgia-politics/2ql9OSD5w2v06TEWndEDZP/[3] https://fivethirtyeight.com/features/presidential-geography-georgia/ par Micha Cohen, "Presidential Geography : Georgia" [archive], sur fivethirtyeight.com, 29 juin 2012. [4] À part le nom de Kemp qui remplace celui de McCain, ce texte est un copier/coller de celui de Micha Cohen, extrait de https://fivethirtyeight.com/features/presidential-geography-georgia/ "Presidential Geography : Georgia" [archive], sur fivethirtyeight.com, 29 juin 2012. [5] Chacune des 14 circonscriptions actuelles (reconstruites en 2013) a sa page Wikipaédia ; lien : Congressional districts of Georgia (U.S. state) [6] https://www.propublica.org/article/case-farms-chicken-industry-immigrant-workers-and-american-labor-law [7] Voir la page en français de Wikipédia Cook Partisan Voting Index. Le district congressionnel le plus démocrate des États-Unis est le 15e district de l'État de New York, situé dans le Bronx, avec un PVI de D+44. Le district le plus républicain est le 13e district du Texas à R+33. Pour les États pris comme un ensemble, le Wyoming et l'Utah sont les plus républicains à R+25 et Hawaï est le plus démocrate à D+18. [9] Les Hispaniques, selon les Américains, descendent des Européens, ce sont donc des Blancs, alors que les Latinos ont du sang mêlé. [12] D’après le site PROPUBLICA https://www.propublica.org/article/case-farms-chicken-industry-immigrant-workers-and-american-labor-law qui expose le phénomène en même temps qu’il dénonce les allures esclavagistes de ce transfert de population. [13] « Géorgie et Caroline du Nord, les deux Sud », par B. Bréville, MD, n° Octobre 2012. [14] Comté de McIntosh, littoral atlantique. 1800 habitants environ. [16] Communautés fermées recrutées sur niveau de vie, emmurées (gated) donc protégées, pratiquant l’entre-soi (comme la pratique du golf). |
Georgie : études électorales (mid-term 2018) -3ème partie-
ATLANTA, MÉTROPOLE D’UNE GÉORGIE MONDIALISÉE L’étudiant ou le jeune collègue qui veut étudier l’évolution récente d’Atlanta – et de la Géorgie - a tout à sa disposition. Les trois publications suivantes sont disponibles sur le net : Atlanta, métropole du Vieux Sud, Jacques Soppelsa (Paris-Sorbonne), Bulletin de l'Association de Géographes Français, Année 1976, 437-438, pp. 239-245 Le boom économique d'Atlanta, Charles Gachelin (U. Lille I), Hommes et Terres du Nord, Année 1990, pp. 165-179 Une métropole de l'ère globale : Atlanta, Claude Manzagol (U. Montréal), Annales de géographie, 1996, 591, pp. 516-534. On notera la logique de la titulature (non concertée) : on passe du Vieux Sud à la globalisation –vilain terme anglo-saxon pour ne pas dire mondialisation- en passant par le boom économique. On n’oubliera pas la G.U. Belin-Hachette. Sans oublier l’inépuisable Wikipédia pour le détail et les chiffres d’aujourd’hui… Ni les articles du Monde Diplomatique. Face à ce qui fut désigné comme un isolat, les Noirs émancipés – pas toujours – doivent s’adapter, une fois aux responsabilités politiques, à ce qui leur est imposé : la mondialisation. Mais, comme le New York Times le fit remarquer un jour, les Blancs n’ont jamais cessé de garder la réalité du pouvoir économique. Et si la mairie d’Atlanta est passée aux Noirs, le reste des leviers de l’État fédéré est aux mains des Républicains, héritiers politiques des Démocrates d’extrême-droite, ségrégationnistes et racistes.
*** Rien de mieux que l’introduction de Claude Manzagol (U. Montréal) : "II y a peu, la Géorgie évoquait surtout des images du passé, les demeures à colonnade parmi les magnolias, les splendeurs et misères de l'économie du coton, les contes surannés d'Uncle Remus et de Sister Jane, ou les âpretés de la Route au Tabac. De sa capitale, Atlanta, on retenait surtout le grand incendie de septembre 1864 immortalisé par Autant en emporte le vent. Même le combat et l'assassinat du pasteur Martin Luther King, et l'élection de Jimmy Carter - le premier président issu du Sud profond depuis la Guerre de Sécession - malgré (ou par) leur charge de rupture, rappelaient encore le passé". Peut-on dire que tout cela fut gone with the wind ? Ce serait aller un peu vite en besogne. Pourtant en quelques décennies, il est vrai que, ainsi que l’écrit Gachelin, cette Géorgie rurale et industrielle fut transformée en un État où l’activité des services est devenue très largement dominante – une économie basée sur la transaction - confirme Manzagol -, une Géorgie où les innombrables friches agricoles, les clairières abandonnées dans la forêt, sont le témoin de l’effondrement (sic) agricole, une Géorgie où, sous l’effet de la concurrence étrangère, les fermetures d’usines se sont multipliées, déclin concernant l’ensemble des industries implantées en milieu rural. "Les images de la Guerre du Golfe (Celle de Bush sr, JPR) ont imposé l'image nouvelle d'Atlanta. Plus encore que Coca-Cola, C.N.N. symbolise, par la magie de la technique et l’illusion de l'ubiquité, la mondialisation en cours. Les Jeux Olympiques d'été de 1996 consacrent Atlanta dans un statut de métropole effervescente dont les liens économiques s'établissent avec le vaste monde".
Le premier aspect visible du changement est le croît démographique de l’État de Géorgie mais comme cela est contemporain de l’intense exode rural, ce sont donc les villes et, en réalité, Atlanta surtout, qui ont connu cette expansion incroyable. Et cela perdure. En ce début de XXI° siècle, sur 3 nouveaux habitants de Géorgie, 2 sont d’Atlanta. Voici un tableau qui donne un aperçu du phénomène.
*Ce sont Fulton et Dekalb, Cobb et Gwinnett, Clayton. La région urbaine a sans cesse évolué dans sa définition. 12, 15 ou 20 comtés ? on ne sait plus très bien. En 1970, on comptait 15 comtés, en 2010, il y en a plus de 20. La carte ci-contre dessine une Atlanta metropolitan Area – dite metro Atlanta – de 28 comtés (mais, hélas, le texte de Wikipédia correspondant nous parle de 30 comtés). La structure de l’agglomération a changé, nous n’avons plus affaire à une agglomération unipolaire comme l’agglomération parisienne mais à un organisme qui évolue vers le multipolaire, quasiment une conurbation. Avec des Edge cities dont nous reparlerons. Notons qu’avec 6 millions d’habitants sur plus de 10 pour l’Etat, Atlanta lato sensu –Metro Atlanta- constitue 60% de la Géorgie. Gachelin disait déjà que "pour certains, le risque est grand de voir se créer une agglomération ingérable, un nouveau Los Angeles ; la très rapide expansion spatiale de l’agglomération, le mitage de la forêt n’apparaissent pas contrôlés". NB. Ce mitage est le fait de l’expansion urbaine cossue, vers le Nord, à l’assaut des premières collines du High country (cf. carte de la 1ère partie), comtés de Dawson et Pickens, surtout Cherokee county. Mais attention ! nous sommes aux Etats-Unis. Cette macrocéphalie au niveau géorgien n’en est plus une au niveau de l’Union… Je vais
reprendre en les modulant quelque peu, les trois tendances du développement
distinguées par Gachelin, évolution dont la synergie a fait d’Atlanta un modèle
de développement. 1. La réponse nodale à la multiplication des flux, l’emprise spatiale sur l’État fédéré. Comme les ports maritimes, les nœuds ferroviaires et les complexes autoroutiers, les aéroports participent de la mécanique de la mondialisation. Atlanta est né du rail, a su géré la révolution du camion en prenant immédiatement (1933) l’avion. Le flux des informations télétransmises est maitrisé dès son apparition. Voici une présentation par flux. Elle n’est pas
satisfaisante, mais une présentation par mode ne le serait pas non plus. Car un
mode peut véhiculer plusieurs types de flux - Le flux des personnes. Il est consubstantiel à la croissance d’Atlanta et il est focalisé sur le joyau économique de la ville : l’aéroport Hartsfield et Jackson International. L’aéroport est situé à proximité du croisement de l’I-85 et de la rocade I-285. - Atlanta ne serait pas si célèbre sans son aéroport international connu du monde entier (du monde qui prend l’avion, bien sûr). C’est le premier ! et notamment le premier pour les passagers en transit : c’est le hub le plus célèbre. Hartsfield-Jackson Atlanta (Géorgie) reste sur la première place du podium pour l'année 2017 avec 104 millions de passagers, devant Pékin (96 millions) et Dubaï (88 millions). Malgré un recul de son trafic de 0,3 % par rapport à 2016, Hartsfield-Jackson doit à son atout "proximité" de conserver son titre pour la vingtième année d'affilée. Première pour les vols intérieurs, la plate-forme aéroportuaire géorgienne présente en effet la particularité d'être à moins de deux heures de vol pour 80 % de la population américaine. Parmi ce total de 104 millions, figurent 93 millions de voyageurs empruntant des liaisons intérieures, et plus de 11 millions prenant des vols internationaux ; Delta Air Lines a transporté 76,4 millions de passagers à Atlanta, soit 73,35 du total toutes lignes confondues. Le nombre de mouvements d’avions - 898.356 - reste le plus élevé aux Etats-Unis. - Le flux des marchandises -Au plan ferroviaire, historiquement le plus important, les trains partent d’Atlanta ou y accèdent grâce à la plaque tournante formée par le croisement des lignes fédérales Cincinnati (Ohio) – Jacksonville (Fl) / Washington (DC) – News-Orleans (Louisiane). La Géorgie est au cœur d’un réseau fortement maillé. (image) -
Les intégrateurs de fret express (FedEx, UPS à Atlanta, TNT, DHL) prennent en
charge toute la chaîne d’acheminement : depuis le pré-acheminement par
camion ou taxi jusqu’à la livraison terminale par camion ou taxi en passant par
l’avion (qui peut être un long courrier prolongé par un petit appareil après
passage par le hub aérien).
Gachelin nous donne la genèse du hub aéroportuaire géorgien (p.179) : "La présence du carrefour et la dynamique de l'économie géorgienne a provoqué partout le développement de la fonction logistique. Si elle est omniprésente une localisation spécifique doit retenir l'attention. Il s'agit de l'Atlanta Tradeport. Ce parc d'activités d'un type nouveau associe des investisseurs américain (Wilma Southeat) et japonais (Mitsui Company et Shimizu Land Corporation). II a comme objectif développement du fret aérien grâce à celui de l'inter-modalisme air-route et air-rail. Sa localisation est à l'intersection de la I-285 et de l'autoroute I-75 et le parc est directement relié avec les installations cargo de l'aéroport. L'Atlanta Tradeport est l'un des premiers exemples de «port intérieur» fondé sur l'intermodalisme air-terre". - au plan routier. Pour en rester au niveau supérieur des INTERSTATE HIGHWAYS[2], Atlanta est au croisement de l’I-85 (Richmond (Vi) à Montgomery (Al) avec une bretelle vers Columbus (Ga) et de l’I-75 (Détroit (Mi) à Miami (Fl)). Ce croisement est renforcé par la I-20 qui va de Fort-Worth (Texas) à Florence (Caroline du sud). L’autoroute I-16 est un embranchement de l’I-75 qui part de Macon et se termine à Savannah. La seule INTERSTATE HIGHWAYS qui ne soit pas centralisée sur Atlanta est l’I-95 qui longe la plaine côtière atlantique du Maine à la Floride. Au sud, on peut longer la frontière géorgienne en empruntant l’I-10 qui va de Jacksonville (Fl) à Mobile (Alabama). L’encombrement eût été tel dans Atlanta que l’on a très tôt conçu et réalisé une vaste rocade qui croise toutes ces autoroutes et qui est la I-285.Au total, écrivait déjà J. Soppelsa, "82 gares routières desservant directement 36 États avec 192 compagnies de transport" . - Le flux d’informations -Concernant les flux d’informations, Atlanta est un gigantesque téléport recevant et émettant les infos mondiales. Surtout avec CNN (Cable News Network) ! En 2007, Atlanta était dans le top30 des villes mondiales qui bloguaient le plus[3]. (Manzagol p.520). La Foire de l’informatique accueillait 100.000 personnes dès 1990 selon Manzagol. - Le flux des capitaux 31 banques internationales ont implanté des succursales dans la ville d'Atlanta. près du tiers d'entre elles (10) étaient japonaise à la date où Gachelin publie son article. Le Canada, le R.U., l'Allemagne avaient chacun 4 banques. Toutes les grandes banques américaines sont évidemment présentes. -Mais
il faut dire un mot sur une réalité qui a émergé depuis une décennie : la "maritimisation" de l’économie
géorgienne. Manzagol donne un bref aperçu historique : "les villes importantes du Sud étaient les ports : Charleston, Memphis, New-Orleans. Avec l'effondrement du système commercial des plantations en 1865, Atlanta, carrefour intérieur, accapare les fonctions d'approvisionnement et de distribution et devient le plus important centre de transaction du Sud (p. 520). Avec la révolution de la massification et du conteneur, le transport maritime est le vecteur de la mondialisation matérielle contemporaine. La Géorgie n'y échappe pas grâce à Savannah. Le port de Savannah et l’ouverture maritime de la Géorgie Après une chute à 2,3 millions de TEU (ou EVP) transbordés en 2009, chute liée à la crise financière de 2008, le trafic de Savannah est remonté à 3,6 millions d’EVP en 2016. Savannah a dépassé les ports concurrents de Charleston et Hampton Roads pour devenir le port le plus important de la Côte Est après New York. Cependant, il convient de souligner que le port de New York est un port local qui dessert son aire métropolitaine, immense mais spatialement limitée. Au contraire, Savannah est un port avec un hinterland qui s’étend sur plusieurs États des Etats-Unis. Le port s’équipe pour satisfaire les besoins de son arrière-pays. Source de la carte : https://www.researchgate.net/figure/Charleston-Savannah-Gateways-Corridor_fig2_317423368
L’immédiat hinterland de Savannah comprend le Piedmont atlantique des Appalaches avec Atlanta, Charlotte (Caroline du Sud) soit une zone de chalandise de 15 millions d’habitants. https://transportgeography.org/?page_id=8490. Soit l’exemple des exportations de bois des forêts du Highland country de la Géorgie. Dans le comté de Murray, la Georgia port authority[4] a aménagé l’Appalachian Regional Port (août 2018) où des conteneurs remplis de grumes passent de camion sur wagon puis le train complet est acheminé directement sur Savannah via Atlanta. Ce "port appalachien" dessert des sites forestiers en Alabama et Tennessee. Les importations de Savannah. Au cours de l'exercice financier 2017, le secteur des biens de consommation au détail était la principale source de marchandises importées via Savannah. Les importations de machines, d'appareils électroménagers/électroniques, de meubles, d'automobiles, de quincaillerie et d'articles ménagers viennent compléter ces importations. Dans son étude, Gachelin souligne le fort développement du marché de consommation d’Atlanta et sa région. Cela ne peut que croître avec sa population et l’élévation du niveau de vie moyen. Le port de Savannah a conçu des ports privatifs pour des clients particulièrement importants : IKEA et Heineken-USA. Les exportations de Savannah. Le port de Savannah traite près de 40 % des exportations américaines de volailles conteneurisées, l'une des principales marchandises d'exportation du port. Au cours de l'exercice financier 2017, les aliments, y compris la volaille fraîche et congelée, les aliments pour animaux de compagnie et les fruits à coque comestibles, étaient le principal groupe de produits d'exportation via Savannah. La pâte de bois, le papier/carton, les produits de consommation au détail et l'argile complètent les 5 premières exportations (par TEU). Les États-Unis sont le 1er producteur mondial de volailles avec 20,3 millions de tonnes en 2014, en progression constante depuis les années 2000 et + 1,5 % par rapport à 2013[5]. Dans les années 1990, les entreprises d’emballage de volaille et de viande ont commencé à recruter massivement dans les communautés hispaniques des États-Unis, contribuant ainsi à accélérer la migration vers les zones de transformation de la volaille. Les cartes ci-dessous comparent les pays à forte production de volaille - qui sont restés pratiquement inchangés au fil des ans - avec la part de la population hispanique, qui a considérablement augmenté.[6] Sur la carte, les comtés où sont produits plus de 1 million de poulets vivants chaque année sont de couleur jaune. Les comtés appalachiens de Géorgie se sont unanimement tournés vers cette nouvelle spéculation. Pour ce qui concerne le Piedmont et la plaine côtière, c’est plus différencié. Columbus et Albany sont réfractaires. Ainsi que les comtés de la région de Savannah et de la frontière avec la Floride.Conséquence de ce dynamisme – de l’économie géorgienne et de son port principal – la compagnie MAERSK Line[7] a décidé (avril 2017) de faire de <= Major Poultry Producing Counties, 2012Savannah un de ses ports principaux avec cinq services hebdomadaires. Les navires desserviront outre-Atlantique la Méditerranée et, après le canal de Suez, le Moyen-Orient et le monde indien. .
2. La révolution informatique Pour reprendre une terminologie connue, Atlanta est devenue une technopole avec moult technopôles. Un technopôle unit un établissement d’enseignement supérieur, des laboratoires de recherches, des usines innovantes souvent appelées start-up. La technopole est une collectivité locale qui a une politique délibérée en faveur du développement des sites technopôlitains, elle fournit l’écrin dont les cadres ont besoin. L'université Georgia School of Technology ouvrit ses portes à la rentrée 1888. Elle est née d’initiatives atlantiennes qui visaient à combler le retard de la Géorgie avec le Nord-Est victorieux. En 1948, l’école changea de nom pour devenir le Georgia Institute of Technology. En 1959, un rassemblement de 2741 étudiants vota avec une majorité écrasante que les candidats soient intégrés sans qu'il soit tenu compte de leur origine. L'un des points forts entretenu par l'université reste le coût accessible du diplôme. Elle obtient régulièrement la première place des classements comparant le coût des études à la valeur du diplôme (retour sur investissement). Le site principal de Georgia Tech se situe au cœur d'Atlanta, dans le quartier de Midtown. Cet institut, écrit Gachelin, "est sans conteste l’initiateur de la poussée technologique et de la part grandissante qu’elle prend dans l’économie de la Géorgie." Il est à l’origine d’un incubateur d’entreprises : l’Advanced Technology Development Center. L’institut possède d'autres installations en Géorgie dans la ville historique de Savannah. Ainsi trois bâtiments (un d'enseignement, un d'administration, et un de recherche) sont implantés à proximité de l'aéroport International de Savannah. Georgia Tech a essaimé également à Augusta et Macon. Atlanta compte d’autres universités. Cette
"révolution" a créé de
nouveaux emplois, ouverts aux Noirs puisque l’université n’est pas ségréguée ni
trop chère, emplois qualifiés à l’origine d’une classe moyenne de couleur en
même temps que blanche évidemment et emplois qui en génèrent d’autres (garde
d’enfants, personnels de maison, secrétariat plus les achats de services
culturels ou de loisirs…). C’est là un des points forts d’Atlanta et Gachelin
conclut son travail en disant que "la force d’Atlanta se trouve dans la puissance de son carrefour
et l’intensité des liens qu’elle a su
créer avec ses universités" (souligné par moi).
3. La fonction d’accueil. C’est la troisième tendance de l’évolution de la ville qui se mêle aux autres pour en faire une world-town. Il y a d’abord l’accueil des fonctions administratives : Atlanta reçoit les fonctions déconcentrées de l’Union, mais aussi celles de capitale de l’Etat fédéré, de chef-lieu du comté de Fulton et bien sûr l’hôtel de ville de la cité. Ensuite,
citons la fonction d’accueil touristique au sens banal mais surtout le tourisme d’affaires. Cela génère la
construction d’hôtels de luxe avec l’avenant (restaurants, services divers – coiffure
- loisirs, cinémas, etc…) et surtout le Georgia World
Congress Center. Atlanta est une ville de congrès nationaux et internationaux. Snow birds est le surnom - ils arrivent par avion - qui a été donné aux états-uniens du Nord qui viennent passer l'hiver en Géorgie (et Floride aussi) quittant la neige pour davantage de soleil. Ces
parcs d’affaires immobiliers,
véritables villes nouvelles, ont trouvé des localisations de prédilection. La
carte montre qu’Atlanta est grosso modo au carrefour des autoroutes fédérales
I-75, I-85 et I-20. Le CBD se trouve au centre géométrique. Mais pour éviter les
encombrements inhérents à la notion de carrefour, a été construite une vaste
rocade, la I-285, qui enserre un noyau de 35km nord-sud et 25km ouest-est. Les croisements
de cette rocade avec les radiales sont stratégiques. Ainsi, le Cumberland-Galleria offrit 2,5 millions de m2 de bureaux au croisement de 285 et
75. Perimeter-Georgia 400 c’est 2,1 millions de m2 au croisement de 285
avec 400 (il s’agit d’une route de l’Etat de Géorgie, radiale). Ces deux
ensembles offrent chacun plus de superficie que le CBD – Downtown
– avec ses 1,6 million m2. Mais le Downtown a été doublé par le Midtown : la ville d’Atlanta n’entend pas tout abandonner aux edge-cities.. [4] En charge des ports de Savannah et de Brunswick. [5] https://www.paysan-breton.fr/2016/01/usa-2e-exportateur-mondial-de-volailles/ Lire aussi l'article suivant. [6] https://www.propublica.org/article/case-farms-chicken-industry-immigrant-workers-and-american-labor-law [7] Une des toutes premières compagnies maritimes mondiales, née de la fusion de Maersk-Danemark et de APL-USA (American President Line). |
Georgie : études électorales (mid-term 2018) -2ème partie-
Les
luttes pour l’égalité, la dé-ségrégation, les droits civils. La Géorgie est un ancien État esclavagiste qui compta jusqu’à 44% de Noirs, on disait "Nègres" jusqu’après la WWII. Après la Guerre de Sécession, l’esclavage a disparu mais le racisme est demeuré. Et de quelle manière ! Les Blancs, dans leur immense majorité, ont voulu adopter une stratégie : celle du "separate but equal", politique du développement séparé, apartheid officiel, racisme institutionnalisé : la vie des Noirs dans le Sud, en Géorgie comme partout, était rude et dure. Gare à celui qui allait se laver les mains dans un lavabo réservé aux Blancs ! La situation s’est aggravée quand la Cour Suprême des Etats-Unis elle-même a déclaré conformes à la constitution de l’Union, les différentes constitutions racistes des États du Sud et les lois avenantes, les fameuses Jim-Crow laws dont je vais évoquer quelques aspects. Les Noirs ont réagi. Les Blancs ont furieusement contre-attaqué avec une acmé des lynchages au tournant du XX° siècle. Le grand tournant se situe en 1954 où la Cour suprême – à l’unanimité, ce qui avait une grande signification politique – a modifié toute la législation et où la présidence et le Congrès des Etats-Unis ont appliqué sans retour en arrière, ont fait appliquer doit-on dire par les Etats sudistes récalcitrants, ô combien ! la dé-ségrégation[1] raciale puis le droit des Noirs à être inscrits sur les listes électorales, à voter, à être élus. Pourquoi ce retournement ? parce que la Guerre froide sévissait et les Communistes du monde entier avaient beau jeu de montrer le caractère fallacieux du discours/slogan de Liberté ! dans un pays où la plupart des Noirs n’avaient aucune liberté. Il fallait ôter cet argument de la bouche des "Rouges". L’enjeu était de taille et c’est pourquoi les pouvoirs États-uniens – judiciaire, législatif, exécutif – furent unanimes et persévérants. Le but de cette page est de montrer la lutte des Noirs - aidés de Blancs courageux, quelques fois - en Géorgie, en détectant les localités où les actions ont été les plus fréquentes ce qui pourrait expliquer la force du vote démocrate ici ou là, aujourd'hui. Le but de cette série étant de montrer la force du courant qui a failli porter Stacey Abrams sur le fauteuil de gouverneur de la Géorgie. Ce que Scarlett O’Hara n’aurait jamais ni compris ni admis. NB. J’ai choisi le mode Chronologie parce que j’avais un solide point d’appui [2]. Mais j’ai largement augmenté cette donnée Wiki...[3] NB. 2 : Pour un aperçu sur la réalité de la ségrégation raciale aux États-Unis aux débuts des années 60' : GREEN BOOK, oscar 2019 *** 1881 : la grève des washerwomen d’Atlanta (lavandières) concerne jusqu’à 3.000 travailleuses, noires pour la plupart. Les hommes noirs s’arment contre le KuKluxKlan. 1883 : 15 octobre, la Cour suprême des États-Unis déclare que la loi sur les droits civils de 1875, interdisant la discrimination raciale dans les hôtels, les trains et autres lieux publics, est inconstitutionnelle. Fureur de Henry McNeal TURNER, noir, évêque de l’Église méthodiste noire, élu du comté de Bibb – chef-lieu : Macon – à l’assemblée législative de Géorgie. Il déclara : Le monde n'a jamais été témoin de lois aussi barbares imposées à un peuple libre que la décision de la Cour suprême des États-Unis, rendue le 15 octobre 1883. Cette décision est la seule à autoriser et à perpétuer toutes les discriminations injustes, les proscriptions et les vols qualifiés perpétrés par des transporteurs publics sur des millions de défenseurs les plus fidèles de la nation. Il est le père de tous les "bus Jim-Crow" dans lesquelles les gens de couleur sont entassés et obligés de payer autant que les Blancs, à qui sont attribués les meilleurs places. Cela a rendu parodique le vote du Noir, nulle sa citoyenneté et burlesque sa liberté. Il a engendré le sentiment le plus amer entre les Blancs et les Noirs et a entraîné la mort de milliers de personnes qui auraient vécu et profité de la vie aujourd'hui. Turner fait allusion aux lois Jim-Crow qui matérialisent à elles seules toutes les discriminations dont sont victimes les Noirs aux Etats-Unis. Deux exemples : 1877 : des écoles séparées doivent être prévues pour les enfants blancs et noirs. 1899 : Les passagers blancs et de couleur ne sont pas autorisés à occuper le même compartiment. Les entreprises ne sont pas obligées de transporter des Noirs dans des wagons-lits ou des voitures de salon… Au total, vingt-sept lois Jim-Crow ont été appliquées en Géorgie ! pour les détails cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_exemples_de_lois_Jim_Crow_par_%C3%89tat[4] 1887 : William Edward Burghardt Du Bois prend un poste de professeur d'histoire et d'économie à l'université "traditionnellement noire"[5] d'Atlanta, Clark Atlanta University. Noir, marxiste puis communiste, diplômé de Harvard, Du Bois fut le premier noir à obtenir le titre de Docteur (Ph.D.) (sociologie). Prix Lénine de la paix. 1895 : Booker T. Washington était l'architecte du compromis d'Atlanta, un accord tacite qu'il conclut en 1895 avec les chefs blancs du Sud. Les Noirs acceptent les lois Jim-Crow, en échange, ils peuvent s’éduquer, ester égalitairement en justice… Du Bois s’opposa énergiquement à ce "compromis" et créa le Niagara Movement. 1899 : lynchage de Sam HOSE, à Coweta, banlieue d’Atlanta. Hose fut torturé, brûlé et pendu par une foule de 2.000 Blancs. Avant 1914 : c’est l’apogée du lynchage. En fait, cette période déborde jusqu’en 1920 environ. Extrait de l’encyclopédie Wikipédia : "À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, un nombre significatif de lynchages ont lieu dans les États du sud-est des États-Unis principalement contre les Afro-Américains dans les États du Mississippi, de la Géorgie et du Texas. Entre 1890 et 1920, environ 3.000 Noirs sont tués par des foules, principalement en représailles de supposés crimes contre des Blancs. Les partisans du lynchage justifient la pratique comme un moyen d'assurer la domination sur les Afro-Américains, à qui ils attribuent une nature criminelle". Howard ZINN, quant à lui, écrit (p. 395): "Pendant ces toutes premières années du XX° siècle, que des générations d'universitaires blancs s'obstinent à appeler la "période progressiste", des lynchages avaient lieu toutes les semaines. Au Nord comme au Sud, la situation des Noirs était au plus bas, (…). Les gouvernements américains (dont les présidents successif, entre 1901 et 1921, furent Théodore Roosevelt, William Howard Taft et Woodrow Wilson), républicains ou démocrates, assistèrent aux lynchages de nègres, furent témoins d’émeutes meurtrières contre les Noirs à Statesboro (Bulloch county, Géorgie) Brownsville (Texas) ou Atlanta, et se turent".[6] 1910 : Création de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) dont Du Bois est le seul dirigeant noir. Les sections locales de cette NAACP sont la formation structurante des luttes d’émancipation. 1916 : Lynchage de Jesse Washington à Waco (Texas). Du Bois, horrifié, écrit : "tout discours sur le triomphe du christianisme ou les progrès de la civilisation ne sont que des fadaises vaines tant que le lynchage de Waco est possible aux États-Unis". C’est la fin du "compromis d'Atlanta" de B.T. Washington et l'avènement de la vision pour l'égalité des droits défendue par Du Bois. 1929 : 15 janvier : naissance à Atlanta de Martin Luther KING. 1932 : Angelo Herndon, mineur de fond, devient responsable communiste à Atlanta[7]. Il y organise les chômeurs. Cinq ans de prison. (cf. Zinn, page 507-508). Les Noirs de Géorgie ont fourni les premières troupes au parti communiste américain (d’après Stephen Tuck, Oxford, R.U.). 1942-1950 : From 1942 to 1950, Reverend Ralph Mark Gilbert served as president of the Savannah Branch of the NAACP. 1944 : Le Dr Brewer créateur de la section NAACP de Columbus, soutien politiquement et financièrement l’action du militant noir Primus E. King qui veut participer aux primaires du parti démocrate (et qui obtient gain de cause devant la Justice). Brewer est assassiné par un blanc qui est acquitté. Columbus s’est donné A. J. McClung comme maire, premier maire noir, leader du mouvement des droits civils, ami du Dr Brewer.[8] LE TOURNANT DE 1954 1954 : 17 mai : avec l'arrêt Brown v. Board of Education, la Cour suprême des États-Unis prend une des plus importantes décisions de son histoire. Décidé à l'unanimité des neuf juges, l'arrêt invalide les lois instaurant la ségrégation raciale dans les écoles et établit que l'application de la loi revient au gouvernement fédéral et non plus aux États fédérés. Cette décision entraîne d'importantes réactions hostiles dans les États du Sud et de violentes critiques de la part des journaux conservateurs. 1955 : 11 juillet, le Bureau de Géorgie pour l’éducation (équivalent du ministère pour un État fédéré) ordonne le licenciement de tout enseignant qui se prononce en faveur de l'intégration raciale et le même bureau ordonne le licenciement de tous les enseignants noirs de Géorgie membres de la NAACP. - La Commission du commerce entre États fédérés (ICC) interdit la ségrégation dans les autobus lors des déplacements entre États (décret Sarah Keys contre Carolina Coach Company). Le même jour, la Cour suprême des États-Unis interdit la ségrégation dans les parcs et les terrains de jeux publics. Le gouverneur de la Géorgie déclare s’y opposer. - Rosa Parks refuse de se lever au profit d’un passager blanc dans le bus qui la ramène du travail. Son arrestation marque le début du Montgomery Bus Boycott.[9] Dans son "Histoire populaire des États-Unis", l’historien américain Howard Zinn souligne que "Montgomery allait servir de modèle au vaste mouvement de protestation qui secouerait le Sud pendant les dix années suivantes : rassemblements religieux pleins de ferveur, hymnes chrétiens adaptés aux luttes, références à l’idéal américain trahi, engagement de non-violence, volonté farouche de lutter jusqu’au sacrifice" (p.512, chapitre XVII). Lien : 1955, Montgomery (Alabama - USA) : la lutte pour les droits civiques commence 1956 : Les gouverneurs de Géorgie, du Mississippi, de Caroline du Sud et de Virginie se mettent d’accord pour bloquer l’intégration raciale dans les écoles. Puis, le Southern Manifesto (Manifeste du Sud) est rédigé et signé par des membres du Congrès des États du Sud, dont 19 sénateurs et 81 membres de la Chambre des Représentants, notamment l'ensemble des délégations des États de l'Alabama, de l'Arkansas, de la Géorgie, de la Louisiane, du Mississippi, de la Caroline du Sud et de la Virginie. Le 12 mars, il est publié dans la presse. 1957 : -création de la SCLC, Southern Christian Leadership Conference, présidée par M.L. King. -Le Sénat géorgien vote pour déclarer nuls et non avenus les 14ème et 15ème amendements à la Constitution des États-Unis relativement à l’État de Géorgie. - En 1957, William Berry Hartsfield, Sr. gagne l’élection au poste de maire d’Atlanta contre Lester Maddox, un Démocrate ségrégationniste, raciste, anti-communiste qui sera néanmoins élu Gouverneur de la Géorgie ultérieurement (en 1967). Hartsfield aura son nom associé à celui de son successeur noir à la mairie pour la dénomination de l’aéroport international de la ville (Hartsfield-Jackson international airport). 1958 : le ministère fédéral de la Justice intente une action en justice en vertu de la loi sur les droits civils pour contraindre le comté de Terrell, en Géorgie, à inscrire les Noirs sur les listes électorales. 1959 : Un juge fédéral condamne et annule la ségrégation raciale dans les bus d'Atlanta tandis qu'un autre juge ordonne aux bureaux d'enregistrement des électeurs de Montgomery de se conformer à la Commission des droits civiques. 1960 : M. Luther King et cinquante autres personnes sont arrêtés pour leur participation au sit-in du Rich’s Store d'Atlanta. 1961 : Les émeutes provoquées par l'admission - ordonnée par la justice - des deux premiers Afro-Américains (Hamilton E. Holmes et Charlayne Hunter-Gault) à l'Université de Géorgie entraînent leur radiation, mais ils sont réinscrits sur ordre. -Le procureur général de l’Union, Robert F. Kennedy prononce un discours devant les étudiants de la faculté de droit de l'Université de Géorgie à Athens, comté de Clarke, dans lequel il promet d'appliquer la législation sur les droits civils. C'est la première fois que l'administration Kennedy approuve officiellement les droits civils THE ALBANY MOVEMENT Le mouvement d' Albany est une coalition de mouvements en lutte contre la ségrégation raciale formée le 17 novembre 1961 à Albany en Géorgie par des militants locaux, par le Student Nonviolent Coordinating Committee (SNCC) et la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP). (D’après Wikipédia) - 1er novembre : Tous les bus entre États sont tenus d'afficher un certificat portant la mention suivante: "Les sièges à bord de ce véhicule sont sans distinction de race, de couleur, de croyance ou d'origine nationale", sur ordre de la Commission de commerce inter-Etat (ICC). Immédiatement, ce même 1er novembre, les militants de la SNCC, Charles Sherrod et Cordell Reagon, ainsi que neuf membres du Conseil de la jeunesse Chatmon, testent les nouvelles règles de l’ICC à la gare routière de la compagnie Trailways à Albany, comté de Dougherty. - 17 novembre: Les militants de SNCC entreprennent d’encourager et de coordonner le militantisme noir à Albany, aboutissant à la fondation du Mouvement d’Albany en tant qu’association officielle 22 novembre : Trois lycéens du Chatmon’s Youth Council sont arrêtés après avoir effectué des "actions positives" en marchant dans des sections réservées aux Blancs à la gare routière d'Albany. 22 novembre : Bertha Gober et Blanton Hall, étudiants à l’Albany State College sont arrêtés après être entrés dans la salle d'attente réservés aux Blancs à la gare routière d’Albany. -10 décembre : Freedom Riders from Atlanta, Les Freedom Riders d’Atlanta, Charles Jones, dirigeant de la SNCC [10], et Bertha Gober, étudiante à Albany, sont arrêtés au terminal de la compagnie de chemin de fer Albany-Union, ce qui suscite de nombreuses manifestations. Des centaines de manifestants sont arrêtés au cours des cinq jours suivants : du 11 au 15 décembre, 500 manifestants sont arrêtés à Albany, en Géorgie. NB. Les Freedom Rides sont les actions de militants du mouvement des droits civiques aux États-Unis qui utilisaient des bus inter-États afin de tester l'arrêt de la Cour suprême Boynton v. Virginia qui rendait illégale la ségrégation dans les transports. Wikipédia -15 décembre : M.L. King arrive à Albany en réponse à un appel du Dr W.G. Anderson, leader du Albany Movement, pour participer à la lutte contre la ségrégation raciale dans les établissements publics. Le 16 décembre, King est arrêté lors d'une manifestation à Albany. Il est accusé d'avoir obstrué le trottoir et d'avoir défilé sans autorisation. 18 décembre - Trêve d'Albany, y compris un report du procès de King de 60 jours; King quitte la ville. LA LUTTE POUR LE DROIT DE VOTE 1962 : Juin - Les travailleurs du SNCC lancent un projet d'inscription des électeurs noirs sur les listes électorales dans la zone rurale du sud-ouest de la Géorgie, considérée comme particulièrement représentative du Deep South. Le 28 août, deux églises fréquentées par les Noirs sont incendiées (ville de Sasser, comté de Tarrell. -Juillet - 28 août: Le SCLC renouvelle ses manifestations à Albany ; Martin Luther King est emprisonné du 10 au 12 juillet puis du 27 juillet au 10 août. (H. Zinn, 515) – le FBI commence ses enquêtes visant à dévoiler les infiltrations communistes (COMINFIL) au sein de la SCLC, suspectant ML King. 1963 : printemps. Le jeune James Crawford, adhérent du SNCC accompagne une jeune femme noire pour qu’elle s’inscrive sur les listes électorales de la petite ville de Leesburg, comté de Lee, SW de la Géorgie. C’est le début d’une véritable épopée. Lisible sur le net.[11] ZINN, page 515. -Savannah : le leader charismatique de la section locale de NAACP, W.W. Law est licencié de son poste de titulaire à l’US Postal. Le scandale est tel qu’il est réintégré sur intervention du président Kennedy et de la NAACP de l’Union. 1964 : dans son message du nouvel an, ML King présente Savannah comme "la ville au sud de la Mason-Dixon line où la dé-ségrégation est la plus aboutie" : Hommage à W.W. Law. -2 juillet : signature du Civil Rights Act par le président Lyndon B. Johnson, en présence de M.L. King. -Barry Goldwater est le premier républicain à remporter la Géorgie (54,12 %) contre le président sortant Lyndon B. Johnson (45,87 %) à qui les électeurs blancs font payer les lois sur les droits civiques. 1965 : -7 mars 1965: Bloody Sunday : les militants des Droits civils de Selma, Alabama, organisent la "Selma To Montgomery Voting Rights Trail" que l’on peut traduire “la route du droit de vote de Selma à Montgomery”, celle-ci étant la capitale de l’État. La manifestation est stoppée par un imposant barrage de police montée et de miliciens de l’Etat fédéré. La police montée charge sans ménagement. De nombreux marcheurs sont blessés, 17 sont hospitalisés dont Amelia Boynton Robinson -native de Savannah (Géorgie)- initiatrice, avec son mari, des Marches de Selma à Montgomery. Les photos d’Amelia Robinson, gisant inconsciente et ensanglantée sur le pont ont fait le tour du monde. Le retentissement est considérable. La NAACP déclare : "si les troupes fédérales ne sont pas capables de protéger les droits des Nègres, alors le peuple américain est face à une terrible alternative : comme les citoyens de la France occupée par les Nazis, les Nègres devront soit se soumettre à l’oppression soit entrer en résistance clandestinement pour se protéger eux-mêmes de la répression du Gouverneur Wallace et de ses troupes sauvages". -Stacey ABRAMS, notre candidate héroïque mais malheureuse, avait une seconde vie d’écrivaine. Elle avait adopté un pseudonyme littéraire : Selena Montgomery. 6 août, Le Voting Rights Act of 1965 est l'une des plus importantes lois du Congrès des États-Unis, interdisant les discriminations raciales dans le vote. Novembre 1967 : King et autres leaders du SCLC engagent la "seconde phase dans le mouvement des droits civiques" : la lutte contre la pauvreté fût-elle le fardeau de Blancs. Au New York Times qui l’interroge sur cette croisade des pauvres, il confie sans fard qu’il s’est "engagé dans une forme de lutte des classes". 1968 : Présidentielle : George Wallace, le candidat indépendant – mais issu du parti démocrate - ségrégationniste et raciste, responsable des violences du Bloody Sunday en tant que gouverneur de l’Alabama, remporte la Géorgie face au républicain Richard Nixon (30,40 %) et face au démocrate Hubert Humphrey (26,75 %). 1970 : Augusta (comté de Richmond), mois de mai, six Noirs sont tués au cours d’émeutes accompagnées de pillages. Les policiers tirent dans le dos, sans sommation. (Zinn, 524). 1974 : Maynard Holbrook Jackson Jr. (1938-2003) homme politique américain, membre du parti démocrate, est le 54e et premier maire afro-américain d'Atlanta. L’aéroport international d’Atlanta Hartsfield-Jackson, porte son nom avec celui du maire précédent (cf. l’an 1957). 1977 : à Tifton (comté de Tift) et Milledgeville (comté de Baldwin), Blancs et Noirs participent ensemble aux comités syndicaux de leurs usines textiles. [1] Je préfère écrire le mot dé-ségrégation avec ce tiret sinon on lit désagrégation [3] Une autre chronologie : https://www.monde-diplomatique.fr/1985/08/A/38695 [4] Lire aussi : https://www.nofi.media/2017/02/jim-crow-segregation-raciale-sud-usa/35768 [5] Cette expression a son entrée dans l’encyclopédie WIKIPEDIA [6] « Entre 1882 et 1968, 4 742 Noirs ont connu un sort semblable, dont la moitié dans le Mississippi, la Géorgie, le Texas, l’Alabama et la Louisiane (statistiques établies par l’université de Tuskegee, Alabama) ».MD. n° de juin 2000. [7] Howard ZINN, page 507. [8] In 1989 the Mayor of Columbus along with the Governor issued a Proclamation making November 19, 1989, as “Dr. Thomas H. Brewer Senior Day”. [9] Montgomery n’est pas situé en Géorgie mais l’importance de l’évènement est telle qu’il a eu un impact en Géorgie et les luttes qui suivent sont incompréhensibles dans l’ignorance de Montgomery. [10] Le Student Non-violent Coordinating Committee ou SNCC (littéralement « Comité de coordination non-violent des étudiants ») est l'un des principaux organismes du mouvement afro-américain des droits civiques dans les années 1960. |
Georgie : études électorales (mid-term 2018)
LA GEORGIE DES ANNÉES TRENTE Ceci est un tableau de la Géorgie tel qu’on peut l’établir à partir du texte de la GÉOGRAPHIE UNIVERSELLE, dirigée par VIDAL DE LA BLACHE, écrit par Henri BAULIG, professeur à Strasbourg. Ce dernier utilise les données du recensement (census) décennal de 1930 et n’évoque presque jamais le New Deal de F.D. ROOSEVELT. Ce tableau a donc une valeur historique mais comme disait un collègue de Lyon, "un bon livre de Géographie devient un bon livre d’histoire". Si la Géorgie a beaucoup changé avec Atlanta comme figure de proue, elle a gardé des enclaves, des reliques (du latin reliquiae, "restes") que le texte qui suit – dont H. BAULIG a fourni la totalité des matériaux – aide à localiser.
I Le "sud" et sa cohérence. D'abord un texte de votre serviteur. Sur la carte ci-dessous (H. Baulig), la Géorgie est limitée au Nord par les 35° parallèle (c'est donc, pour partie, un État appalachien), à l'Est par la rivière Savannah, à l'Ouest par une rivière au nom imprononçable qui arrose Columbus (la Chattahoochee) et qui, après Atlanta, correspond grosso modo au 85° méridien W, au Sud le parallèle 30°31'N passe au nord de Jacksonville. Du sud au nord (sens des vents porteurs des pluies tropicales) on a la plaine sédimentaire côtière qui monte lentement 30m puis 80m puis 130 aux Pine Hills. Cette limite avec le piémont (n°7 sur la légende : plaine côtière avec revers de cuestas) est un site privilégié pour la localisation des villes : d'ouest en est : Columbus, Macon, Augusta. Le Piedmont va de 200 à 300m, il porte Atlanta, c'est un morceau du socle (n°1 sur la légende). En Géorgie, les Appalaches (n°5) culminent à 1458m. Il y a là un château d'eau. J.-P. R. L'image d'ensemble du "Sud"
est à peu près celle-ci. Un climat chaud, presque tropical dans quelques
régions, permettant la culture du coton, du riz, de la canne à sucre, des
agrumes. Une topographie variée : plaines basses, avec de vastes étendues de
marécages et de forêts, de cultures aussi ; vallées alluviales, fertiles et
fiévreuses ; montagnes restées forestières en partie, recélant des genres de
vie anciens. Une population blanche aux trois quarts ou presque, rurale aux
deux tiers, agricole à concurrence de 57 p. 100, pauvre, ignorante, féconde, à
peu près pure de mélanges extérieurs, mais comprenant un fort contingent de
couleur, Nègres, Indiens et depuis peu Mexicains. Une agriculture généralement
arriérée et peu productive [qui a créé le black
belt, jadis fameux…] asservie au coton et au tabac, bien que susceptible de prendre par places des
formes spéciales et intensives. Une industrie textile jeune, puissante, rivale
heureuse des usines de la Nouvelle-Angleterre ; (…) des industries locales
travaillant le bois et le tabac. (…). Malgré des transformations locales, une
économie plutôt archaïque dans l'ensemble, et le plus souvent une structure
sociale fortement hiérarchisée : au sommet, les propriétaires fonciers,
survivants de l'aristocratie de planteurs, auxquels se sont joints les hommes
de loi, les financiers, les commerçants de gros et les industriels
; puis une catégorie intermédiaire de petits propriétaires exploitants, yeomanry
besogneuse[1],
et de boutiquiers ruraux; ensuite une plèbe de plus en plus nombreuse de tenanciers de rangs divers et de
travailleurs industriels ; enfin, tout en bas, parqués derrière une ligne de
couleur infranchissable, les Nègres et depuis peu les Mexicains. Tout cela lié
non seulement par les relations de la vie quotidienne, mais encore par des
traits de caractère hérités soit de la plantation, soit de la "frontière"
: dans la classe dominante, un vif sentiment de l'honneur personnel, une
disposition chevaleresque et hospitalière, le goût des choses de l'esprit, une
attitude de supériorité distante ; dans la masse, quelque chose de primitif, de
rude et parfois de brutal. Lié surtout par un fort sentiment particulariste qui
s'exprime dans une résistance inflexible aux prétentions des Nègres, dans une
défiance ombrageuse à l'endroit de l'"étranger",
c'est-à-dire, en pratique, du Yankee et de ses interventions souvent
malencontreuses dans les affaires du Sud ; dans une
fidélité plus sentimentale que raisonnée au parti démocrate (c'est moi qui souligne, JPR, mais aujourd’hui cette fidélité est rompue et les WASP de Géorgie votent en rangs serrés pour les Républicains).
Tout compte fait, l'unité du solid South est un produit de l'histoire encore plus que de la nature. Et l'on peut dire que c'est, avec sa pauvreté, le poids de son héritage historique qui a, jusqu'ici, empêché le Sud de développer toutes les possibilités contenues dans la riche diversité de sa nature physique.
II. L’économie des régions "naturelles". Cette partie du texte de Baulig peut être accompagnée par une belle carte du site internet de la Géorgie. La carte est élaborée au XXI° siècle mais elle reprend une terminologie plus ancienne. Plus au sud, la zone maritime se réduit aux îles et marais littoraux (Coastal Georgia). La pêche même languit et la navigation se concentre dans quelques ports : Charleston (SC) (62 000 hab.), Savannah (85 000 hab.)[3] et Brunswick (14.000 hab. en 1930)[4]. Ces villes ont connu, au temps de l'esclavage, une prospérité dont témoignent les résidences déchues et les jardins profonds aux grilles rouillées[5]. Mais elles ont souffert de la Guerre Civile, et plus encore de la décadence du coton et de la concurrence des voies intérieures : Savannah recevait 1.089 000 balles de coton en 1900 et 527 000 en 1930 ; Charleston (SC), 266 000 et 253 000 ; Brunswick, 94000 et zéro. Le mouvement des ports - 2020000 tonnes métriques à Charleston, 2068000 t. à Savannah, 889.000 à Brunswick) comprend surtout des sorties de bois et de naval stores[6] et des arrivages, beaucoup plus importants, de phosphates et de nitrates, de pétrole brut et raffiné. Les industries caractéristiques sont le travail du bois, la préparation de l'huile de coton et des engrais ; en outre, le raffinage du pétrole à Charleston et Brunswick, le raffinage du sucre à Savannah. Depuis l'abandon de la culture du riz et du coton des îles (de la mer Caraïbes, JPR) en Caroline du Sud et en Géorgie, on a vu se constituer aux dépens des grands domaines une paysannerie de petits propriétaires nègres. D'autre part, la culture des primeurs est en progrès. Néanmoins, la zone littorale est très peu habitée ; même les banlieues de Charleston et de Savannah sont presque désertes. La zone intérieure de la Plaine Côtière reste vouée aux staple crops, coton et tabac ; les autres cultures, pommes de terre, patates, soja, arachides même demeurent accessoires. Les deux tiers des cultivateurs sont des tenanciers et les nègres dominent dans les campagnes, surtout dans la Caroline du Sud et la Géorgie : c'est déjà l'image du deep South, atténuée dans le sud de la Géorgie par la culture des primeurs. 2. LE PIEDMONT. Séparé de la Plaine Côtière par la fall-line et plus encore par la zone ingrate des sand hills (n°7 sur la légende de la première carte), le Piedmont appalachien en diffère profondément à la fois par son peuplement et par son économie. NB. la fall-line? c'est une appellation des géographes. Elle s'observe sur toute la façade orientale des Appalaches, plus exactement à son piémont. Les fleuves dévalent une pente homogène, régulière, mais sur des terrains différenciés : le Piedmont cristallin, donc dur et la plaine côtière, sédimentaire, sols tendres. Progressivement, l'érosion a déblayé les terrains tendres et un dénivelé a été créé, une chute, des rapides, "fall" en anglais, là où l'on passe du Piedmont à la plaine côtière. Ces chutes ou rapides ont été exploités pour la production d'énergie, moulins, centrales. Puis usines puis villes, etc... Regardez la ligne Columbus, Macon, Augusta (1ère carte). . Occupé au cours du XVIII° siècle et au début du XIX° par des colons du Nord venus par la Grande Vallée, il a une population en grande majorité blanche, toutefois les nègres sont nombreux là où les plantations avaient envahi le Piedmont (cas de la Géorgie). L'économie rurale, restée longtemps fidèle au type demi-fermé de la frontière, a fait une place de plus en plus grande aux cultures commerciales, coton et tabac : d'où une extension de la tenancy. Néanmoins, les grands domaines ont toujours été rares et le faire-valoir direct domine (…). La principale innovation agricole, depuis le milieu du XIXe siècle, a été la culture du tabac blond et doux, destiné à la fabrication des cigarettes. (…). Dans le centre de la Géorgie, les ravages du weevil (ver parasite dévorant la fleur du coton) ont favorisé l'extension des cultures de fruits. Cependant, à tout prendre, le Piedmont rural n'est pas prospère : les campagnes se vident, et l'on constate que les petits propriétaires émigrent plus facilement encore que les tenanciers. Il faut en chercher la cause dans la crise agricole, qui sévit presque continuellement depuis une vingtaine d'années, et surtout dans le développement récent de l'industrie. L'industrie trouve dans le Piedmont des conditions favorables, tant physiques qu'humaines. Les forces hydrauliques ne manquent pas : les pluies copieuses et les pentes fortes des montagnes déterminent un débit fluvial abondant, mais irrégulier et qui ne peut être pleinement utilisé sans réservoirs de grande capacité. Les sites favorables à l'établissement des barrages sont nombreux, tant à la fall-line, où ils ont été construits d'abord, que dans les montagnes, où l'on exploite depuis peu des chutes de 200 mètres et plus -…). Ajoutons : un réseau de chemins de fer suffisamment dense, des exemptions fiscales au profit des industries nouvelles, un outillage moderne, la proximité, au moins relative, des grands marchés de consommation. Mais le facteur décisif est la présence dans les campagnes d'une main-d’œuvre surabondante, accoutumée à un niveau de vie bas, disposée à travailler de longues heures pour peu d'argent. Les salaires industriels du Sud se révèlent, toutes choses égales d'ailleurs, inférieurs d'un tiers au moins à ceux du Nord, et la différence n'est pas compensée, à beaucoup près, par le moindre coût de la vie, ni par les avantages en nature assurés par les patrons. La durée légale du travail, naguère encore, était, dans tous les États du Sud, supérieure à 54 heures par semaine ; les femmes et les enfants employés dans l'industrie étaient insuffisamment protégés. Mais, si le travail est peu coûteux dans le Sud, il est aussi peu productif : en d'autres termes, l'industrie du Sud, bien que disposant d'un outillage moderne, s'en tient jusqu'ici à des formes assez élémentaires de production. Encore, pour les réaliser, lui manquait-il les capitaux, le Sud dut, au début du XXe, accepter l'aide financière et technique du Nord. Ce concours lui vint des banques et des fournisseurs de matériel; puis, devant le succès, des entreprises similaires du Nord, dans le textile surtout, établirent des succursales dans le Sud, et finalement quelques-unes s'y transportèrent en bloc. Jusqu'ici, cette industrie est peu diversifiée. La fabrication des meubles, le travail du tabac et surtout le textile. Ici comme en Europe au début du XIXe siècle, c'est l'industrie cotonnière qui a frayé la route, justifiant son nom d'industrie pionnière. Petite ou moyenne, l’entreprise bénéficie d'une surveillance plus directe, du contact personnel entre patron et ouvriers ; et surtout elle est mieux placée pour drainer la main-d’œuvre rurale. D'où l'aspect ordinaire des centres textiles du Piedmont : l'usine, de dimensions plutôt modestes, se place de préférence dans les petites villes ou les villages, voire en pleine campagne ; à côté se trouve la cité ouvrière, dont les maisons, ordinairement pourvues d'électricité et d'eau courante, beaucoup plus confortables que les fermes des environs ou que les tenements du Nord, se louent à raison d'un dollar par pièce et par mois, puis l'école, les églises (sic), l'économat, les terrains de jeux, le cinéma..., tout cela groupé, sous la tutelle plus moins paternelle, plus ou moins despotique du patron, en une commune presque fermée où les bourgeois de la ville évitent de se commettre. Au total, la population des centres textiles est un prolétariat de poor whites, inférieur au physique et au moral, mal adapté à la régularité du travail quotidien, instable et pourtant résigné, sujet à des révoltes soudaines, mais jusqu'ici peu organisé et apparemment peu organisable. L’industrie cotonnière du Sud a fini par dépasser celle de la Nouvelle-Angleterre. Grâce à ses bas prix de revient, elle a pu, mieux que le Nord, résister à la crise. (…). Et voici qu'après avoir triomphé du Nord, le Sud est devenu son propre concurrent. Installée d'abord dans la zone moyenne du Piedmont, l'industrie textile a gagné la fall-line de la Géorgie (Augusta, 60 000 hab., Macon, 54000, Columbus, 43000, Athens 18000, Atlanta 270 000, Lagrange, 20 000). C’est le Classic Hearland de l’État de Géorgie (JPR). 3.
Dans les montagnes et plateaux – le High
Country - comme plus au Nord, la
vie rurale a conservé certains traits archaïques hérités de l'âge des pionniers. La
population, presque exclusivement blanche et de vieille souche américaine,
prolifique et ignorante, est restée fidèle à l'esprit de la famille
patriarcale. De petits propriétaires pratiquent sur un sol accidenté une
agriculture peu commerciale - blé, maïs, pommes de terre, fruits, un peu de
tabac -, élèvent un bétail non sélectionné, et demandent un supplément de ressources
à la pêche, à la chasse, à l'exploitation des bois, d'ailleurs en décadence, à
la cueillette des plantes médicinales, à la distillation clandestine de
l'alcool[7].
On constate pourtant des innovations : l'élevage s'oriente davantage vers
la production du lait, l'industrie textile a pris pied dans la région, la
beauté du pays et la construction récente de bonnes routes ont fait naître un
centre de tourisme réputé (Nashville, TE). Cela n'empêche pas les campagnes de
se dépeupler rapidement au profit des villes industrielles du Piedmont et de la
Grande Vallée, au profit même des plantations du bas pays, où l'on voit les
montagnards prendre la place des nègres partis pour le Nord. Les Appalaches -comme le laisse entendre ce texte- sont assez vite devenues un isolat, un problème régional au cœur des USA. en 1965, une commission des Appalaches (ARC) a été créée pour venir en aide aux habitants des comtés appalachiens des États. Le nord de la Géorgie, descendant jusqu'aux limites de Metro Atlanta, est éligible aux aides de l'ARC. ci-dessous : un aspect de la Géorgie que l'on n'imaginait pas = Ouvert au public depuis 1932, Rock City est une attraction touristique située au sommet de Lookout Mountain en Géorgie. Bien que cela ne soit pas vérifié officiellement, des promoteurs immobiliers ont longtemps revendiqué que les touristes pouvaient distinguer sept états depuis le promontoire au sommet de la colline visible sur cette photo. (Vous pouvez vraiment voir le Tennessee de cet endroit : le centre ville de Chattanooga n'est qu'à 10 kilomètres). Rock City est aussi célèbre pour ses campagnes publicitaires emblématiques que pour son parc : entre 1935 et 1969, le fabricant d'enseignes Clark Byers a peint des slogans pour l'attraction sur plus de 900 granges dans le sud-est et le mid-ouest des États-Unis. (source, texte et photo : Wikipédia) [1] De l’anglais yeoman : paysan propriétaire de la terre qu'il cultive. [2] Par-là, l’auteur entend la partie orientale du Sud, située à l’Est du Mississippi = sud-est [3] Census de 1930. Une estimation en 2017 indique 147.000 habitants. Aux mêmes dates de référence, le comté de Chatham (celui de Savannah) passe de 105.431 habitants à 290.500. [4] “Brunswick (comté de Glynn Hill) is located in southeastern Georgia, approximately halfway between Jacksonville and Savannah. The city is located at the apex of the bight of the Georgia coast, the westernmost point on the Atlantic seaboard, and is naturally sheltered by two barrier islands, Jekyll and St. Simons. Après un sommet à 21.000 hab. en 1960, la ville n’a cessé de perdre de la population. On note une reprise depuis 2010…Le comté de Glynn, en revanche, est passé de 19400 à 92.620 hab. en 2017. Sea Island est une île de l'archipel des Sea Islands, sur la côte atlantique des États-Unis d'Amérique. Île de Géorgie relevant administrativement du comté de Glynn, elle a accueilli en 2004 le 30e sommet du G8. https://roadtripusa.com/atlantic-coast/georgia/ [5] Cependant Savannah fonde une partie de sa réputation sur ses parcs aménagés, ses calèches et son architecture Antebellum (cad d’avant la guerre de Sécession). Son quartier historique regorge de places pavées et de parcs comme le Forsyth Park, ombragé par des chênes couverts de mousse espagnole. Au centre de ce pittoresque quartier se trouve la célèbre cathédrale de style néogothique Saint-Jean-Baptiste. (Wikipédia). [6] Résine, poix, goudron… [7] Texte écrit à l’époque de la prohibition !! |
Floride : une élection, un jour....
Voici un article qui
exploite un autre article publié dans LE PROGRÈS du 10 novembre après la
catastrophe que vous savez. C’est un point sur la carte des immenses États-Unis
mais il apporte des informations utiles. Après quoi je donnerai les résultats
globaux de la Floride comparés à ceux de 2012. Je saute sur l’occasion pour
vous inviter à lire l’article que j’avais écrit après cette réélection d’Obama,Quelques réflexions sur la présidentielle américaine de 2012...
il n’y a rien à ajouter quant aux tendances fondamentales du scrutin. Sauf que
cette fois c’est l’extrême-droite américaine qui a gagné. Je donne une citation prophétique (encore une...) d’André Siegfried qui écrit en 1928 : "On n'exagérera pas en disant que (...)
deux civilisations s'affrontent pour la conquête du gouvernement : la nouvelle civilisation,
industrielle et cosmopolite, des grandes cités de l'Est, et celle, plus
ancienne, plus traditionnellement américaine, des campagnes et des villes
moyennes". Trump est l'élu de cette Amérique-là, alors que les États baignés par les océans ont largement voté pour le parti démocrate (81% pour l'ensemble de la Californie qui donne 19% à Trump...). J.-P. R. Les "Villageois" de Floride qui ont choisi Donald Ce sont des immigrés intérieurs. Ils modifient la démographie d'un État : la Floride. Blancs et aisés pour la plupart, âgés de plus de 60 ans, ce sont les "Villageois" version 2016, ils ont élu domicile ces dernières années à The Villages (sic), 15 km2 aux hameaux bien gardés, 49 golfs et leurs centaines de voiturettes entre les palmiers, des commerces, des médecins, un Centre contre la perte de la mémoire et même... un McDonald's. "The place to be", le matin. Après les résultats de la nuit un seul sujet de discussion pour ces retraités encore actifs : la victoire de Trump. "On a besoin d'un vrai changement", dit Skip, entouré de trois amis aux cheveux gris sous les casquettes de base-ball, "je ne faisais plus du tout confiance à Hillary, même si j'ai déjà voté démocrate". Sur quels thèmes le discours de Trump l'a convaincu ? "il va nous ramener la stabilité, il est fort, il va soutenir les militaires !" Même sentiment chez Nancy, originaire du Kansas. "Le gouvernement est trop corrompu, il fallait le battre", soutient-elle fermement, "je suis très contente de ce qui s'est passé cette nuit, le peuple a parlé". Elle a voté Trump "Pour le business dont nous avons besoin pour remettre les gens au travail. Pas vraiment pour l'homme, qui manque vraiment de classe... ". 6O% (69% en réalité, JPR) de voix pour Trump The Villages, né d’un projet fou à la fin des années 60, accueille 157 000 personnes. C'est l'endroit des États-Unis qui connaît la croissance démographique la plus folle, et ce n'est pas fini si l'on en juge les chantiers en cours. Les règles communautaires sont strictes : un membre de la famille à plus de 55 ans, et pas de familles avec des enfants de moins de 19 ans. Le comté de Sumter est ainsi devenu en très peu de temps le plus vieux (et l'un des plus riches) des États-Unis. Il a voté à 60 % pour Trump (69% selon le NYTimes). Shirley fait partie des exceptions démocrates. "J'ai peur pour mon pays, on est la risée du monde", regrette-t-elle. Steve, lui, originaire de l'Indiana, valide les départs du golf. "Politiquement, je suis un indépendant, c'est un peu une exception ici, au milieu des Républicains", glisse-t-il. Ce passionné de photo se dit inquiet "en partie à cause de Trump". La Floride, État-clé dans le résultat de mardi, balance entre deux âges, entre deux options démographiques, ce qui en fait un "swing state" : les jeunes, souvent hispaniques, qui viennent travailler dans le cadre de l'explosion des loisirs, les retraités qui choisissent l'État du soleil pour leurs vieux jours. "Réveiller le peuple américain" Ce golfeur, Ron Howard, vêtu d'un vert chic, assume : "Avec Trump, c'est un appel au réveil du peuple américain, je suis très heureux", souligne ce robuste vétéran de l'Air Force (l’armée de l’air des USA, JPR). "On ne peut plus intervenir dans le monde avec une armée faible" (sic, jpr), poursuit-il "on ne gagne plus les conflits dans lesquels on s'engage... ". L'ancien officier adhère aussi aux projets de Trump concernant les frontières : "Il faut qu'on soit plus ferme pour faire entrer des bons citoyens, et pas de terroristes". Envoyé spécial en Floride, Xavier Frère FIN DE L’ARTICLE DU PROGRÈS. L’auteur de l’article mêle trois niveaux d’analyse : le niveau de l’État fédéré de Floride, le niveau du comté de Sumter, et le niveau tout à fait local de The Villages. Pour ce qui concerne ce dernier, il s’agit selon toute vraisemblance d’un ghetto de riches, Wiki en donne la définition suivante : Une résidence fermée ou un quartier fermé est un type de copropriété sécurisée ; on trouve également le terme de "gated community", désignant plus spécifiquement les résidences nord-américaines, disposant d'un statut spécifique. Elle se présente sous la forme d'un regroupement de demeures, entouré par un mur ou un grillage et disposant d'équipements de protection — vidéosurveillance, gardiennage — qui l'isolent du tissu urbain ou rural environnant. Son accès est réservé aux seules personnes autorisées, à savoir ses résidents, leurs invités et les services publics. Le fonctionnement des installations de sécurisation est financé par les redevances réglées par les copropriétaires. Ces copropriétés sont vendues à des retraités du nord des États-Unis –le journaliste cite seulement le Kansas et l’Indiana-. Des conditions sont posées pour y avoir accès : d’abord une pension de retraite élevée (condition non écrite mais implicite). Le prix de trois villas dépasse le million de dollars, l’échelon intermédiaire est placé à hauteur de 200.000/250.000 dollars. L’article de l’encyclopédie wiki – entrée "The Villages"[1] – nous donne plein d’informations, je vous y renvoie. Le revenu médian par famille est de $45.000. Il est de $57.000 per capita pour les hommes et de $26.000 pour les femmes. Ensuite il y a des conditions d’âge : pas de moins de 18 ans, au moins une personne de 55 ans dans la famille. Au total l’âge médian est de 66 ans. Plus de 80% des résidents sont des "couples mariés vivant ensemble"[2]. Tous ces éléments combinés font que 98,4% des habitants de The Villages sont des Blancs. 0,5% seulement sont des Noirs. Tout cela vote massivement
républicain : en moyenne 2/3 vs
1/3 pour les Démocrates (alors qu’au niveau fédéral on est dans le 50/50...). Il est fort dommage que le journaliste ne nous donne pas les résultats de The Villages intra-muros. Concernant les arguments avancés, on aura remarqué la place donnée au militaire. Il y a une demande de recours à la force, de renforcer l’interventionnisme américain. L’accusation de corruption est un peu surprenante, Obama n’a pas créé de scandales sur ce plan, alors que le républicain Bush-jr n’est pas très propre. Nancy demande une politique favorable au business censée créer des emplois. Cette politique, en France par exemple, ne donne aucun résultat si ce n’est l’enrichissement du grand patronat. L’ancien officier de l’Air force semble oublier que les massacres du type Colombine sont le fait d’Américains bien de chez eux et sont les symptômes d’une société bien malade. Nancy admet que Trump manque de classe mais vote quand même pour lui, signe que c’est la politique qu’il annonce qui l’a faite se décider et pas ses cheveux javellisés. Voici maintenant les
résultats pour la Floride et le comté de Sumter, comparés à ceux de 2012. Le parti Éléphant (R.) a la couleur ROUGE ; l'Âne (D.) a la couleur BLEUE. (sources : tableau établi à partir des statistiques du New-York times).
Éléments d'analyse : - La Floride est un État de la "Sun belt", ceinture du soleil. Ses atouts lui permettent une florissante industrie touristique, la réception de nombreuses PME/PMI hors sol, c’est-à-dire indifférentes à la présence de matières premières ou de source d’énergie mais sensibles à l’environnement pour ses cadres et dirigeants), enfin l’accueil de nombreux retraités de tous les États-Unis. C’est donc un État en perpétuel accroissement démographique. - Les statistiques américaines ne donnent pas le nombre d’électeurs inscrits et c’est fort regrettable mais ce croît démographique explique que les deux principaux candidats peuvent voir, chacun, le chiffre de leurs électeurs augmenter. Mais si l’âne gagne 250.000 voix, l’éléphant en gagne 444.000 ! Il faut donc réfléchir en termes de suffrages exprimés. (NB. Il y avait de petits candidats qui ont obtenu le pourcentage qui permet d’arriver à 100% des exprimés). - Le parti Républicain garde le même pourcentage qu’en 2012. On ne peut en aucun cas parler de raz-de-marée trumpiste. Mais Clinton perd 2,2% par rapport à Obama-2012 et cela suffit pour passer en seconde place. C’est un recul de Clinton et de la machine démocrate qui explique le succès de Trump. - Le comté de Sumter qui possède en son sein The Villages est un comté de riches retraités qui vote pour le parti du Business (même si Trump a su se rallier ailleurs des voix d’électeurs plus pauvres) : avec presque 70%, il domine de façon éclatante la vie politique de ce coin de la Floride. Les nouveaux arrivants ont voté massivement PR (+12.000 v. par rapport à 2012) alors que peu ont rallié le parti Démocrate (+3.000 v. seulement). Le PD perd 2,8% et le PR gagne 1,6% par rapport à la présidentielle 2012. Ici est justifiée la vieille opposition entre l’éléphant, parti des Affaires et de ceux qui en profitent, et l’âne, parti des minorités : noirs, femmes, latinos, natives (descendants des Indiens), LGBT… On ne pourrait pas être aussi affirmatif dans d’autres États. [1] Voir le site http://www.thevillages.com/ ; édifiant. [2] Si bien que, si les mots ont un sens et si j’ai bien compris, ces familles ont un revenu médian de (57.000 + 26.000 = ) $83.000 soit €77.000. |
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