Dans un article d’une lumineuse clarté, Me R. Weyl, nous rappelle que le texte de la constitution n’est qu’une marche dans l’édifice constitutionnel qui structure la vie politique de notre pays. Il rappelle ainsi que la France est tenue de respecter ses engagements internationaux comme sa signature au bas du Pacte des Nations Unies de 1966 sur les droits économiques, sociaux et culturels. On peut aussi rappeler que le préambule de la constitution de 1946, cité dans le préambule de celle de 1958, fait partie de notre droit positif, en principe fait pour être respecté c’est-à-dire appliqué. Que dit ce préambule ? « Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tente d'asservir et dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinct de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits et les libertés de l'homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. Il proclame, en outre, comme particulièrement nécessaires à notre temps, les principes politiques, économiques et sociaux ci-après : La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme. Tout homme persécuté en raison de son action faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires la République. Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions de ses croyances. Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui les réglementent. Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises. Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité. La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence. La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'Etat. (…). » Ce préambule est aussi une règle d’or. Mais la signature de certains hommes d’Etat est dévalorisée par leur action concrète. Je rappelle que le principe d’un déficit des dépenses publiques non supérieur à 3% du P.I.B. figure déjà dans le traité de Maastricht. Qu’est devenue cette obligation ? face à ces devoirs le gouvernement l’a pulvérisée. Et surtout en diminuant massivement ses recettes et cela de façon unilatérale en faveur des plus riches, l’Etat ne pouvait qu’aggraver la situation, c’est-à-dire aggraver le déficit. Pourquoi et au nom de quoi cette règle d’or : La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement devrait-elle passer après la règle d’or du budget ? l’Etat se démunit au profit des riches et vient ensuite réduire les droits fondamentaux du reste des citoyens. Oui, il faut s’indigner ! (avant de passer à l’action). J.-P. R.
UN PROJET DE RÈGLE D’OR OU PLUTÔT DE RÈGLE DU VEAU D’OR.
par Me Roland WEIL, avocat.
Le projet de « règle d'or » à inscrire dans la Constitution mérite bien son nom, puisqu'il s'agit de la règle du veau d'or. On peut être profane en sciences économiques et comprendre cependant la simplicité de l'évidence. On ne peut pas habiller Pierre sans déshabiller Paul, ni nourrir le privé sans affamer le public. Le rôle de l'Etat est d'assurer les besoins publics, mais si ses moyens de les assurer sont soumis aux profits du privé et si les bénéficiaires de ces profits privés sont dispensés de contribuer aux besoins du public, il est clair que la chandelle est brûlée des deux bouts. Limiter les déficits publics, certes, mais en coupant dans quoi ? Ce devrait être dans les bénéfices faits sur notre dos, dans ceux que procurent à certains les aventures militaires extérieures. Mais c'est dans les dépenses d'utilité publique, l'éducation, la santé, que se font les coupes. C'est bien sa réforme du système de santé qu'Obama sacrifie. La recette n'est pas nouvelle : ceux qui ont vécu ces années se rappellent les décrets Laval, du nom de celui qui allait devenir le bras droit des nazis en France occupée, et qui, en 1935, avait institué la «politique de la hache», coupant dans les traitements des fonctionnaires (-10%, JPR) et les dépenses publiques. Aujourd'hui il s'agit simplement d'officialiser et de constitutionnaliser le désengagement social de l'État, de ce que les « libéraux » appellent abominablement « l'Etat providence ». Mais il y a maintenant une autre « règle d'or », mondialement obligatoire, conquise et consacrée par les progrès de la conscience universelle. C'est celle proclamée par l'article 11 du pacte des Nations unies de 1966 sur les droits économiques, sociaux et culturels, aux termes duquel « Les États parties au présent pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu'à une amélioration constante de ses conditions d existence. Les États prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit... ». Et l'article 12 proclame le droit à la santé, et la liste continue dans les articles suivants. Et ce n'est pas une simple déclaration d'intention, car l'article 2 a déclaré : « Les États parties au présent pacte s'engagent à assurer le droit égal qu'ont l'homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels qui sont énumérés dans le présent pacte ». Cette obligation est d'ailleurs telle que dans un arrêt de 2008 la Cour de cassation faisait application de l'article 7 garantissant le droit au travail. Le désengagement social de l'État est donc contraire aux obligations contractées internationalement par la France, et que le peuple de France dans sa souveraineté sur ses institutions peut rappeler à ses gouvernants et autres institutionnels qui les violent. L'association Droit Solidarité se propose d'inviter dès la prochaine rentrée ses associations partenaires à lancer ensemble une grande campagne pour le respect de l'article 11. Et il peut ne pas être inutile, à l'approche des éventuels débats constitutionnels, de rappeler que la réforme proposée est tout simplement un défi à des règles fondamentales consacrées par des textes internationaux qui constituent une obligation pour la France qui s'est engagée à les respecter et que cet argument pourra être rappelé lors des débats parlementaires. |
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