Le Monde, qui devient progressivement le journal de campagne du parti socialiste, publie un article sur les « primaires socialistes » : « Malgré les critiques, la primaire est bien une avancée démocratique »…Une chose est sûre : c’est un succès médiatique. Après le premier débat, le second débat a vu s’investir des sociétés privées comme Europe n°1, LE PARISIEN-Aujourd’hui en France, preuve qu’il y a quelque argent à gagner… Quant à savoir si c’est une avancée démocratique, c’est autre chose. Je renvoie le lecteur à mon article Milieux populaires et vie politique où je montre que le NON au traité constitutionnel européen a été massivement rejeté par les électeurs socialistes (55% de NON chez eux autant que l’ensemble des Français) alors que le parti en tant que tel appelait à voter OUI. Quand il y a une telle distorsion entre des dirigeants et des dirigés peut-on parler de fonctionnement démocratique ? Lors de ces primaires, qui parle de revenir sur ce désastreux traité ? Certains vont répondre Montebourg mais celui-ci n’a fait que reprendre les thèmes de Jean-Luc Mélenchon. On verra s’il est désigné candidat par les primaires. Relevons que c’est une des qualités magiques du PS de présenter - en son sein - une offre politique qui satisfait tout le monde. Déjà à l’époque de Mitterrand, on avait Rocard, très à droite, et le CERES de Chevènement très à gauche. Au dernier moment, le pêcheur ramasse tous les poissons dans son filet. Il y eut l’époque du trio de l’Essonne : Lienemann-Dray-Mélenchon, très à gauche, face à Rocard et à Strauss-Kahn qui commençait à émerger, etc…Aujourd’hui, outre le sympathique président du parti Radical de gauche, on a, de Valls à Montebourg, tout l’éventail des nuances. A la limite, un candidat UMP est superflu… Les observateurs ont relevé le caractère très technique du second débat, doutant fortement que les téléspectateurs y comprennent grand-chose. La télévision est-elle le meilleur moyen pédagogique en politique ? Où passe la démocratie de la cellule de quartier, de la section, du débat local entre les gens de l’immeuble et un militant venu apporter autant la bonne parole que sa faculté d’écoute ? Je me souviens du mot de Chevènement après le congrès de Rennes du PS -congrès qui est resté dans les mémoires- et qui disait : « je suis pour un parti de militants, un parti de supporters à l’américaine me fait horreur ». On y file tout droit avec les primaires. Pour bientôt les Pom-pom-girls… Fatalement, si on ne comprend pas tout au débat, on regarde autre chose. Du style : « elle a une jolie robe la chanteuse ». Le must est atteint avec l’émission de PublicSénat qui s’intitule, démocrates retenez-vous, « déshabillons-les ». Le but de cette émission est de « décrypter le discours et l’image des candidats ». On fait venir un philosophe, un linguiste, un spécialiste du langage corporel (si, si…), etc... et on analyse le ou la candidate qui devient un animal de laboratoire. Le monsieur spécialiste du langage corporel est très fort. Il arrive à analyser le rôle de l’épaule droite d’un candidat, chez Martine Aubry, il observe le mouvement de la main droite, puis celui de la main gauche et conclut que les deux hémisphères cérébraux de la candidate fonctionne de conserve et correctement... Quant vous parlez d’un candidat concurrent et que vous donnez en même temps un coup de tête en arrière, c’est que vous êtes TOTALEMENT opposé à l’argument de ce candidat. Ah ! on n’en apprend des choses lors des primaires socialistes ! Je vais donc tenir un discours hautement politique suscité par ces primaires. Pourquoi Hollande a-t-il suivi une cure d’amaigrissement ? Les dessins de Plantu le représentant avec de bonnes joues roses lui ont déplu ? Un président doit-il être sec ? Le bon Edouard Herriot avait une panse qui faisait honneur à la gastronomie lyonnaise. Je trouve qu’entrer dans un personnage de futur Président cela fait un peu artificiel. Je ne suis pas sûr que Hollande soit très bien dan sa peau. Les gros plans lui sont défavorables. Il fronce les sourcils pour se donner un air sévère, adapté à la situation et à la tâche mais quelqu’un doit lui souffler « tu en fais trop » alors il retrouve un sourire large et ainsi de suite… Est-ce bien convenable ? Il n’a pas trouvé un bon équilibre psychologique. Je ne voterai pas pour lui. Voilà de la politique. Primaire ? Mais tout cela était pourtant prévisible. En 1962, lors de la campagne du referendum sur l'élection du Président de la République au suffrage universel -projet qu'il combattait - un homme politique éminent pouvait affirmer : "choisir un homme sur la seule base de son talent, de ses mérites, de son prestige (ou de son habileté électorale), c'est une abdication de la part du peuple, une renonciation à commander et à contrôler lui-même. C'est une régression" (2). Une chose est sûre : plusieurs candidats ne changeront rien. Désastre assuré. D’autres ont choisi la ligne « plus à gauche que moi tu meurs », comme F. Mitterrand qui, au congrès d’Epinay, voulait la RUPTURE avec le capitalisme[1]. On dirait les discours de Jean-Luc Mélenchon il y a quelques mois. Mais à l’époque ce dernier était un dangereux populiste. A gauche plus qu’ailleurs on doit se méfier des promesses. Rien n’est possible si le « peuple de gauche » reste dans son fauteuil à regarder la télé. Après la « victoire » de 1981, on est passé à la rigueur. Et je me souviens d’une émission avec Lionel Jospin, alors secrétaire du PS, émission que l’on pourrait intituler « on n’avait pas prévu »…Jospin énuméra toute une série d’évènements graves -comme la faillite d’une grande entreprise allemande- , évènements «qu’on n’avait pas prévus » pour justifier le tournant de la rigueur et l’abandon des promesses. Le PS révolutionnaire d’Epinay était enterré. Un an plus tard, 1984, le FN faisait irruption. La vérité est qu’il faut un vote massif pour le FRONT DE GAUCHE afin de montrer la volonté des Français de casser ce système où les banques privées peuvent mettre tout un peuple à genoux ; où des agences de notation, sorties on ne sait d’où, se permettent de juger et de noter un gouvernement -qui représente un peuple, une nation devant le monde entier- et de lui dire : tu as mal travaillé, on baisse ta note…Mais où allons nous ? Indignation. Révolte. Révolution citoyenne.
[1] Voir Le coin du bachotage, « La vie politique en France, avant et après 1981 », son discours à Epinay. (2) Il s'agissait de Pierre MENDES-FRANCE. Cité par L'Humanité des débats du vendredi 30 septembre. |
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