"On remarquera que, dans tous ces écrits, et notamment dans ce dernier, je ne me qualifie jamais de social-démocrate, mais de communiste... Pour Marx, comme pour moi, il est donc absolument impossible d'employer une expression aussi élastique pour désigner notre conception propre...". F. Engels, 1894.
Le libellé des programmes de certains examens et concours fait démarrer la question sur le socialisme allemand en 1875, c'est-à-dire au congrès d'unification de Gotha (Thuringe), du 22 au 27 mai. Danger ! Il faut savoir la préhistoire de ce courant AVANT 1875 sinon on ne comprend rien à la suite. Marx étant une figure incontournable beaucoup peuvent croire que le socialisme allemand est "son produit". Il n'en est rien. La figure dominante est celle de Lassalle qui n'est pas marxiste et dont le courant d'idées sera MAJORITAIRE à Gotha en 1875. Le parti socialiste allemand est marqué de façon définitive par ces idées lassalliennes qui sont grosses de danger. Il
faut aussi poser une problématique : quand vous regardez un dessin comme
celui de Cabu ci-dessous que comprenez-vous ? Rien ? OK. Vous êtes-là
pour apprendre. Il y a une différence entre un socialiste et un social-démocrate
- au moins en France aujourd’hui -. (NB. : depuis le coming out de F. Hollande lors de sa conférence de presse de janvier 2014, ce dessin de Cabu n'a plus lieu d'être ). La social-démocratie est une forme de
gestion du capitalisme, les profits qu’il dégage devant être redistribués aux
travailleurs. Le chancelier social-démocrate allemand Helmut Schmidt aimait à
dire, pour justifier sa politique favorable au patronat, "les profits d’aujourd’hui sont les
investissements de demain et les emplois d’après-demain". Par conséquent,
un social-démocrate se fixe sans vergogne comme objectif chronologiquement
premier, la croissance des profits des entreprises. Un socialiste est, en
principe, plus à gauche. En théorie, il s’attaque au principe de la propriété
privée des moyens de production et cherche à avoir une propriété publique et/ou
coopérative qui lui permette de contrôler la machine économique nationale dans
l’intérêt du peuple. Son inspiration est encore marxiste. Au XIX° siècle, les
partisans de Marx ont adopté la dénomination de social-démocrate qui, à l’époque
avait un contenu révolutionnaire. Même Lénine, en Russie, était à la tête du
POSDR : parti ouvrier social-démocrate russe. Notez qu’il n’y avait pas d’appellation
contrôlée : des partis s’appelaient "parti ouvrier", d’autres "parti socialiste", le plus souvent c’était "social-démocrate"[1]. J’en entends dire "mais le PS français n’est plus marxiste ! " C’est vrai. Il garde son nom de "socialiste" uniquement pour ne pas ouvrir un boulevard au parti communiste et au Front de Gauche. Mais DSK et Moscovici ne font pas mystère de leur orientation social-démocrate. Bref, au XIX° siècle, le socialisme
allemand porte le nom de "social-démocrate" et est encore officiellement
marxiste (congrès d’Erfurt, 1891) même si de fortes tendances révisionnistes apparaissent
avec Bernstein, en particulier, mais pas seulement, hélas. C’est après la
catastrophe de la guerre de 1914-1918 (que les partis socialistes ou sociaux-démocrates
ont approuvée -sauf Jaurès en France ou le POSDR de Lénine-) que le mot "social-démocrate"
a pris une connotation péjorative chez les communistes en particulier. Le parti
allemand offrant le plus bel exemple de parti complètement intégré dans la
gestion du capitalisme, qui vota les crédits de guerre, qui massacra les spartakistes
de Berlin en 1919, etc… Beaucoup plus tard en 1959, le SPD abandonna
définitivement dans son congrès historique de Bad-Godesberg toute référence au
marxisme. Cette période 1860-1890 voit l’unification du courant socialiste allemand avec le congrès de Gotha en 1875. L’unité est fortifiante -électoralement parlant- et Bismarck, violemment hostile au socialisme, persécute le parti et ses militants. Illustration : le droit de coalition avait été reconnu légalement en 1869, mais le libéral Lujo Brentano donna un jour une définition restée célèbre de ce droit: "Art.1er. Le droit de coalition est reconnu en Allemagne ; art.2. L’exercice de ce droit est un délit". On ne saurait mieux dire. Mais le retour à la légalisation est irrémédiable et, en 1890, naît le parti social-démocrate d’Allemagne : SPD.
Naissance et progrès de la social-démocratie
Avec le développement de l'industrie va de pair l'accroissement numérique du prolétariat allemand. Ses conditions de vie étaient misérables, ses droits fort limités. En 1862, la direction de l'association ouvrière de Leipzig s'était adressée à Ferdinand Lassalle en le priant de formuler les tâches et les objectifs du mouvement ouvrier. Sur les conseils de Lassalle, qui en assuma la présidence, fut fondée à Leipzig, en mai 1863, "l'Association générale des travailleurs allemands" (Allgemeiner Deutscher Arbeiterverein : ADAV). Les débuts furent modestes. Au bout d'un an, l'Association ne comptait que 5.000 adhérents. Mais la classe ouvrière allemande avait créé sa première organisation politique autonome et "l'Association générale" ne tarda pas à gagner du terrain.
Ferdinand Lassalle. Avocat d'origine juive ambitieux, F. LASSALLE (1825-1864) était un orateur et polémiste de grand talent. Ses conceptions ne tardèrent pas à l'opposer à Marx et Engels. Il fut tué en 1864, en duel, par un prince roumain qui lui disputait l'amour d'une jeune Allemande, Hélène de Doenniges. Ce prince-roumain figurait parmi les nombreux sponsors de l'ADAV. Curieuse façon de financer un parti ouvrier. Disons-le illico le rôle de Lassalle est plus que trouble et ses compromissions avec Bismarck, champion de la réaction contre-révolutionnaire, sont patentes. Déjà, en 1859 à Berlin, il avait publié un libelle Der italienische Krieg und die Aufgabe Preussens [2], dans lequel il conseillait à la Prusse d'utiliser la guerre pour mettre la main sur le Schleswig-Holstein - alors danois - et pour faire l'unité allemande aux dépens de l'Autriche. C’est là la politique stricte de Bismarck. Il alla même jusqu’à entreprendre d’organiser des manifestations d’ouvriers exigeant le rattachement du Schleswig-Holstein à la Prusse ! La mort empêcha cette monstruosité mais K. Marx s’en fait l’écho[3] : "Il s'avéra très vite ‑ nous en eûmes bientôt les preuves en main ‑ que Lassalle, en fait, avait trahi le Parti. Il avait conclu un véritable contrat avec Bismarck [4] (et naturellement sans avoir entre les mains la moindre garantie). Il devait se rendre à la fin de septembre 1864 à Hambourg, et là (avec ce fou de Schramm et le mouchard prussien Marr) forcer Bismarck à annexer le Schleswig-Holstein, c'est-à-dire proclamer cette annexion au nom des « ouvriers », etc. En compensation, Bismarck avait promis le suffrage universel et quelques charlataneries socialistes. Dommage que Lassalle n'ait pu jouer cette comédie jusqu'au bout ! Elle l'aurait sacrément ridiculisé et montré combien il avait été mystifié !"[5] A mon avis -JPR- Lassalle pensait établir une stratégie très en vogue au Moyen-âge : l’alliance de la noblesse et du populo minuto contre le populo grosso. La Bourgeoisie, force montante, ambitieuse mais exploiteuse du petit peuple, pouvait être contrée par cette alliance entre le Seigneur - menacé dans sa domination ancestrale - et le peuple des villes exploité sans vergogne par l’égoïsme des parvenus. Comme en Flandre par exemple. Bismarck, l’homme des hobereaux, partageait cette analyse : en 1863-64, dates de la correspondance avec Lassalle, il n’a pas réglé son conflit avec la bourgeoise allemande malgré les évènements de 1848-49. L’idée d’une absorption de la classe ouvrière encore récente dans les rets de la monarchie lui paraît valable et Lassalle, une bonne carte à jouer. L'objectif premier de Lassalle était la conquête du suffrage universel. La nécessité d'éliminer la propriété privée capitaliste ne s'imposait pas à lui. Il voyait le salut dans des coopératives ouvrières de production, qui seraient financées par l'État, qu'il concevait comme un organisme neutre, au-dessus des partis et des intérêts privés. Sa théorie de la "loi d'airain", selon laquelle le salaire ouvrier ne pouvait jamais s'élever au-dessus du minimum indispensable à la subsistance du travailleur, aboutissait pratiquement à nier l'intérêt de la lutte revendicatrice. Ces
compromissions ne cessèrent pas. Après sa mort en 1864, Lassalle fut remplacé
par son ami intime B. Becker lequel dut démissionner à cause des soupçons qui
en faisaient un agent de la police. Le nouveau président de l’ADAV, Schweitzer,
publia des articles favorables à la politique de Bismarck (Marx dixit, cf. note5) et fut exclu
en 1872 lorsque ses relations avec le gouvernement prussien furent rendues
publiques. Cela fait beaucoup. Noter que c’est une vieille méthode des
gouvernements en place : investir les organisations subversives. Ainsi que
l’écrit K. Marx dans sa lettre à Kugelmann ; "les
(journaux) ouvriers et le mouvement ouvrier en Prusse (et par conséquent dans
le reste de l'Allemagne) ne subsistent que par la grâce de
la police"
(celle de Bismarck, JPR). Dans son roman
dont la publication a débuté en juillet 1914 [6], Der Untertan, Heinrich Mann met en scène
un patron fanatique de l’empereur, qui a une mentalité de sujet, ennemi des sociaux-démocrates, qui, pour obtenir un siège au
conseil municipal, magouille pour éliminer un adversaire du parti démocrate et
se met secrètement d’accord avec le leader local du parti…social-démocrate
lequel est également élu contre le candidat démocrate. On sait que ce livre,
outre ses qualités littéraires, a aussi une grande valeur documentaire. Il y eut un revival -renaissance - du lassallianisme dans ces années fin de siècle et Bernstein - dont nous reparlerons - publia les œuvres complètes de Lassalle en 1891. Dans sa présentation, Bernstein critique vivement Marx de n’avoir pas compris les thèses de Lassalle. Le professeur F.-G. Dreyfus écrit : "Lassalle, dont les premiers efforts avaient été estimés (appréciés, JPR) par les milieux catholiques comme par les conservateurs prussiens (Bismarck, JPR), gardera toujours une audience certaine dans l'opinion allemande. Il est assez extraordinaire de constater l'influence de ce penseur juif jusque sous le national-socialisme". Mais la judaïté de Lassalle ne pose aucun problème aux nazis quand on peut lire sous sa plume dans une lettre à Bismarck (juin 1863) : "This miniature will serve you as a convincing proof that the workers do in fact instinctively feel themselves drawn towards a dictatorship, if it were only possible to convince them in a suitable manner that this dictatorship will be realised in their interests, and show you the extent to which therefore they would be inclined, in spite of republican convictions, or rather owing to the latter, to see in the crown the natural bearer of a social dictatorship, in opposition to the egoism of bourgeois society, if the crown for its part could at some time decide to take the naturally rather improbable step, viz., of genuinely proceeding along the revolutionary and national path, and of converting itself from a monarchy of the privileged strata into a social and revolutionary monarchy". L'influence de Lassalle sur le mouvement ouvrier allemand, malgré les efforts de Marx et d'Engels, qui combattirent ses théories à boulets rouges, fut considérable. Décisive. De longue portée. Rôle messianique de l’État : l’État c’est Dieu ! Rôle missionnaire de la Prusse Rôle exclusif du Suffrage Universel Rôle des coopératives de production sous contrôle de l’État.
Le courant marxiste, Bebel et Liebknecht. A côte des lassalliens se trouve l'Union des associations des travailleurs allemands. Lassalle se préoccupait essentiellement du mouvement ouvrier allemand. Or, en 1864, avait été fondée à Londres la première Internationale, au sein de laquelle Marx et Engels combattirent les théories proudhoniennes et anarchistes fort répandues dans le mouvement ouvrier. L'Internationale préconisa la formation d'une section de l’Association dans chaque nation/pays. Grâce aux efforts de Bebel et de Wilhelm Liebknecht [7] fut créé, en 1869 à Eisenach (Thuringe), le parti ouvrier social-démocrate d'Allemagne (Sozialdemokratische Arbeiterpartei Deutschlands : SDAP), section de l’Internationale. Il comptait 10.000 membres à sa fondation et son programme s'inspirait des statuts de l'Internationale. Le nouveau parti se donnait pour tâche la conquête du pouvoir politique. Opposé à Bismarck, hostile à tout compromis avec les classes dirigeantes, il envisageait la transformation révolutionnaire de la société, seule capable de mettre fin à l'exploitation du prolétariat. Il était internationaliste (Bebel et Liebknecht le montreront en condamnant l’annexion de l’Alsace-Lorraine, payant cet acte de la prison). La classe ouvrière se sentant mieux défendue, se rassemblait toujours plus autour de "ceux d'Eisenach". Cependant, la création de l’empire allemand en 1871, la politique réactionnaire de Bismarck, la répression des grèves de 1871-72, favorisaient l'éclosion d'un mouvement d'unité au sein du prolétariat. Les lassalliens en profitèrent pour faire des ouvertures à Liebknecht et tenter de sauver ainsi leur association (l’ADAV) de la déconfiture. Le 11 octobre 1874, Liebknecht écrivait à Bebel, alors détenu à la prison de Zwickau, l’attitude de divers dirigeants lassalliens : "Tölcke était ici hier ; il veut l'union avec nous. Fritsche m'a écrit hier dans le même sens. D'après Fritsche, Reimer et Hasselmann veulent, eux aussi, au moins une liaison constante : la fusion n’est pas possible pour le moment. Je t'en dirai davantage oralement ; j'irai te voir huit jours avant l'ouverture du Reichstag. Une chose est certaine : L'Association générale allemande (l’ADAV) est en déroute" [8]. Avec l'écrasement de la Commune de Paris et le développement du prolétariat allemand, le centre de gravité du mouvement ouvrier international se déplace vers l'Allemagne. La majorité des ouvriers allemands sentait bien que l'existence de deux organisations ouvrières était une cause de faiblesse et l'idée de l'unification gagnait du terrain.
Le congrès d'unification eut lieu à Gotha en mai 1875.
Les Lassalliens étaient représentés à ce congrès par 73 délégués, les Eisenachiens par 56. La direction du nouveau parti (parti ouvrier socialiste d'Allemagne : SAPD) comprenait trois Lassalliens et deux Eisenachiens. Ses organes de presse centraux étaient Der neue Sozialdemokrat et Der Volksstaat. Malgré les conseils de Marx et d'Engels, Liebknecht surtout, fasciné par l'idée de l'unité, était prêt à de larges concessions sur le plan théorique. Effectivement, le programme de Gotha accueillit un certain nombre de thèses lassalliennes (conception de l'État, loi d'airain) ; le texte ne parlait ni de la nécessaire solidarité internationale, ni de la nécessité pour le prolétariat de s'emparer du pouvoir et il suscita, de la part de Marx, la vive critique que l'on sait [9]. Mais cette critique ne fut pas publiée. En 1891, seulement. Lien.Socialisme allemand : Gotha 1875, le congrès, son programme, la critique du programme. 1ère partie.
Deux ans après le Congrès de Gotha, aux élections générales de 1877, les socialistes recueillaient 500.000 voix et avec leurs douze élus, devenaient par ordre d'importance le quatrième parti politique du Reich. Dans une lettre d'Engels à Enrico Bignami (membre de la 1ère Internationale, correspondant en Italie) que celui-ci reproduit dans son journal La Plèbe, Milan, 26 février 1877, on peut lire : "Nous avons obtenu en outre de fortes minorités aussi bien dans les grandes villes qu'à la campagne; à Berlin 31.500, à Hambourg, Barmen [10], Nuremberg, Dresde : 11.000. Nous avons obtenu un nombre important de voix d'ouvriers agricoles non seulement dans les villages du Schleswig-Holstein, de Saxe et du Brunswick, mais aussi dans le Mecklembourg, Cette citadelle du féodalisme". Pour la localisation des zones "rouges" comme disent les Italiens, voir la carte de l’article : L’empire allemand et ses nationalités en 1914. Carte des premiers suffrages socialistes dans l'empire allemand (1877) A cette époque (décembre 1877) sont édités 75 journaux et revues socialistes en langue allemande, dont 62 dans le Reich et, sur ce chiffre, 15 sont des organes syndicaux. C'est-à-dire qu'on édite plus de journaux socialistes en langue allemande que dans toutes les autres langues du monde ensemble.
Contrefeu : Bismarck fondateur de l’ État-providence moderne.
Une première tentative du Chancelier conservateur (Bismarck et l’unité allemande) pour faire voter des lois d'exception dirigées contre le parti social-démocrate échoua. Le Reichstag fut dissous. Plus docile, la nouvelle assemblée vota le texte proposé par Bismarck. La loi, promulguée le 19 octobre 1878, si elle ne dissolvait pas le parti, lui interdisait toute manifestation publique ; le gouvernement pouvait décréter localement l'état de siège. En huit mois, 217 associations, 127 publications furent interdites, les expulsions se multipliaient et en moins de trois mois, plus de cinq cents militants furent arrêtés. D'octobre 1879 à novembre 1880, en un an, en Prusse seulement, plus de 11.000 personnes furent emprisonnées pour motifs politiques. En même temps, alliant la politique de la carotte à celle du fouet, Bismarck fit adopter, de 1883 à 1889, une série de textes qui constituaient en Europe une innovation : loi sur l'assurance maladie, sur l'assurance accidents, sur l'assurance vieillesse. Les cotisations étaient versées à la fois par les patrons et par les ouvriers, les prestations étaient faibles. Le mouvement ouvrier accepta ces réformes et s'efforça, par sa lutte, d'en étendre la portée. Bismarck espérait qu'elles détourneraient les ouvriers du socialisme[11], il n'en fut rien. En juillet 1881, en pleine répression, Bebel était élu triomphalement à la Diète de Saxe. A partir de 1879, fut imprimé en Suisse et expédié en Allemagne un journal clandestin, le Social-démocrate dont le chiffre des abonnés finit par atteindre 12.000. Les abonnés étaient desservis par "la poste rouge" (die rote Feldpost) - c’est-à-dire, plus ou moins clandestinement, par les militants du parti eux-mêmes - sous l’habile direction de Julius Motteler. En août 1880, le parti tint près de Zurich son premier congrès illégal. Durant toute cette période, les militants socialistes firent assaut d'ingéniosité et de courage pour mettre en échec la police bismarckienne et ses mouchards.
Progrès électoraux des socialistes
Malgré les persécutions, à chaque nouvelle élection, le nombre des suffrages qui se portaient sur les candidats socialistes augmentait. De 1887 à 1890, la social-démocratie doubla ses voix et envoya au Reichstag 35 députés. De 1881 à 1890, la social-démocratie ne cessa d'augmenter le nombre de suffrages recueillis : 1881 : 311.900, 1884 : 549.900, 1887 : 763.100, 1890: 1.427.300. L'échec de la répression était patent. Quand Bismarck voulut faire proroger les lois d'exception et les aggraver, le Reichstag refusa. Au Congrès de Halle, en 1890, le parti se donne le nom de Sozialdemokratische Partei Deutschlands (S.P.D.), parti social-démocrate d'Allemagne. Redevenu légal, le parti élabora un nouveau programme qui fut adopté au Congrès d'Erfurt en 1891. Celui-ci proclamait clairement l'objectif des sociaux-démocrates : l'édification du socialisme ; il revendiquait la journée de 8 heures, le droit d'association et de grève, l'égalité des droits de la femme, il soulignait que la réalisation du socialisme supposait la conquête du pouvoir politique. Son orientation était nettement plus marxiste que le programme de Gotha.
Cependant, déjà, un certain nombre de dirigeants sociaux-démocrates, mettant en question plusieurs points de la théorie marxiste, pensaient que l'objectif essentiel du parti était l'obtention de réformes susceptibles d'améliorer dans l'immédiat la condition ouvrière et non la suppression du système capitaliste. à suivre : Le socialisme en Allemagne de 1890 à 1914 (carte 1912)
Marx & Engels, Critique des programmes de Gotha et d’Erfurt, Éditions Sociales, 1966. Gilbert BADIA, Histoire de l’Allemagne contemporaine, volume I, (Éditions Sociales).F.G. Dreyfus, Histoire des Allemagnes, coll. U, A. Colin. Pour le tableau statistique: article wiki Sozialdemokratische Partei Deutschlands Pour la carte : atlas Westermann.http://www.marxists.org/archive/riazanov/1928/07/lassalle.htm http://www.marxists.org/francais/marx/works/00/parti/kmpc052.htm#ftnref20 où se trouve, entre autres choses, une référence de Marx à Engels, « À propos de la dissolution de l'association ouvrière de Lassalle » Demokratisches Wochenblatt, 3-10-1868. http://www.laquestionsociale.org/archives/AR_socialdemocratie.pdf : travail intitulé « la social-démocratie allemande ». [1] Cependant, avec la rigueur scientifique qu’on lui sait, Engels ne se reconnaît pas dans l’appellation « social-démocrate ». S’il accepte cette dénomination du parti, c’est par respect pour les décisions prises par la majorité. [2] "La guerre d’Italie et la mission de la Prusse", la mission de la Prusse est une vieille rengaine des Hohenzollern luthériens. Mission ayant une connotation divine. [3] http://www.marxists.org/francais/marx/works/00/kug/km_kug_18650223.htm#_ftn5 texte de la lettre de Marx à Kugelmann, datée du 23 février 1865, dans laquelle Marx "expose brièvement (ses) rapports avec Lassalle". [4] Dans une lettre du 11 juin 1863, Engels exprimait déjà la crainte que "Lassalle ne travaille actuellement tout à fait pour le compte de Bismarck". Une lettre de Wilhelm Liebknecht, antérieure au 20 janvier 1865, confirma Marx et Engels dans l'idée que Lassalle avait conclu un pacte avec Bismarck. Il semble que les deux hommes se soient rencontrés une première fois les 12 ou 13 mai 1863. Lassalle proposa à Bismarck une alliance contre l'opposition bourgeoise : en échange serait accordé le suffrage universel et l'État subventionnerait des coopératives de production. Au cours de l'été 1864 Lassalle accepta de faire, au sein de l'Association générale des travailleurs allemands, ADAV, de la propagande en faveur de l'annexion du Schleswig-Holstein par la Prusse. La correspondance Lassalle-Bismarck publiée en 1928 par Gustav Mayer confirma en tous points la lettre de W. Liebknecht. Note de marxists.org. [5] De certains débats au Reichstag, après 1870, il ressort que Bismarck et Lassalle avaient échangé quelques lettres et eu ensemble des pourparlers. Jusqu'à ces derniers temps, on ne disposa d'aucun document sur le contenu de ces lettres, mais il y a quelques années (texte écrit en 1949, réédité en 1966), on découvrit dans une armoire secrète du ministère de l'Intérieur de Prusse, la correspondance entre Lassalle et Bismarck. Ces documents montrent que Lassalle prenait très au sérieux la possibilité d'une "royauté sociale" et croyait pouvoir convaincre Bismarck que, sans son aide, il ne réaliserait pas l'unification de l'Empire allemand. L'annexion du Schleswig-Holstein "par les ouvriers" faisait partie de son plan d'alliance politique avec Bismarck. Note des Éditions Sociales. [6] Et fut donc interrompue … pour reprendre en 1918. [7] A. BEBEL (1840-1913) : tourneur sur bois, autodidacte. Il fait son tour d'Allemagne, puis se fixe à Leipzig. En 1866, il adhère à l'Internationale, et milite à l'Union des Associations ouvrières de Leipzig aux côtés de Wilhelm LIEBKNECHT (1826-1900). Celui-ci avait participé à la révolution de 1848 et avait dû émigrer. A Londres, il se lia d'amitié avec Marx et Engels. Note de Gilbert BADIA. [8] Citation et texte d’E. Bottigelli, extraits de son « avertissement » introduisant le livre « Critique des programmes de Gotha et d’Erfurt », Éditions Sociales. [9]
K. Marx & F. Engels : Critique des
programmes de Gotha et d'Erfurt. Éditions Sociales. Cf. le lien , supra. [10] Barmen est aujourd’hui intégré à la conurbation de Wuppertal dans la Ruhr. [11] Déclaration de Bismarck à Moritz Busch, journaliste : "Pour nous aussi c'est un bon placement. Nous évitons une révolution". |