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Ukraine : Porochenko, l’atout de l’extrême droite par Vadim Kamenka

publié le 21 oct. 2014, 11:01 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 5 mars 2016, 01:13 ]

    Dans l’ouest de l’Ukraine, le président Petro Porochenko essaye de faire le plein des voix pour les élections législatives en flirtant avec les thèses d’extrême droite et en se campant en chef de guerre.

Lviv (Ukraine), envoyé spécial de l'Humanité, 21 octobre 2014

En Galicie, dans l’ouest de l’Ukraine, Lviv se prépare pour les élections législatives de dimanche. Le long des rues moyen-âgeuses de cette ville fondée au XIIIe siècle, marquée par la culture polonaise et austro-hongroise, FRONTIERES PECO (5° partie). 1918-1921 : La Pologne et "la ligne Curzon" et aussi Autriche-Hongrie en 1914 (2ème partie) : nationalités & problèmes politiques  les drapeaux ukrainiens flottent sur les façades d’immeubles, dans les bars et sur les toits de voitures. Dans cette capitale régionale, bastion du nationalisme ukrainien, la défiance des citoyens à l’encontre du pouvoir s’est encore accrue samedi dernier. L’entrée en vigueur du « statut spécial » pour les régions orientales (Donetsk, Lougansk) a eu l’effet d’une bombe médiatique à Lviv, d’où partent la plupart des militaires et les volontaires qui garnissent les rangs de la garde nationale (bataillons regroupant des milices d’extrême droite). « En pleine campagne électorale, Petro Porochenko essaye de se présenter en homme de guerre et en homme de paix, capable de réunir l’ensemble de la nation. Une manière de se démarquer de ses adversaires et de leurs discours va-t-en-guerre », analyse le Kiev Times. À Lviv, une bonne partie des 800.000 habitants expriment une forte incompréhension alors qu’on leur avait promis l’unité du pays. Au nom de l’effort national, de nombreuses familles ont accepté les mobilisations militaires et les deuils, pour combattre « les terroristes » et « l’envahisseur russe ». C’est donc l’incompréhension qui domine. Sur la place Ivan Franco, à côté de l’université, Volodomir étudiant en histoire, s’emporte : « Finalement, ils continuent de nous mentir comme les précédents gouvernements. Cette élite ne nous représentera jamais. Pourquoi accepter une autonomie maintenant après des milliers de morts ? La Galicie devrait aussi avoir son indépendance. » Il ira voter pour Svoboda (parti d’extrême droite, néonazi), qui réalise en Galicie ses meilleurs scores. Cette stratégie du parti présidentiel (Bloc Porochenko), en tête dans les sondages, pourrait bien relancer les formations nationalistes et son adversaire direct, l’extrémiste Oleg Liachko, du Parti radical (13 %). Celui-ci s’oppose à toute conciliation avec les régions orientales, où il a même combattu à la tête d’une milice. « En Galicie, Liachko devrait devancer Svoboda (5 %), qui connaît un certain recul à cause de son passage au gouvernement et du nombre grandissant de partis proches de l’extrême droite ou ouvertement fascistes comme Pravyi Sektor », analyse la politologue Elena Tchaltseva.

Pour les habitants de Galicie, c’est une nouvelle désillusion

Que prévoit ce « statut spécial », accordé à la région du Donbass (est) ? Pour les représentants des républiques populaires de Lougansk (LNR) et Donetsk (LDR), « c’est l’indépendance ». Pour le pouvoir ukrainien, il s’agit « d’une autogestion » pour un certain nombre de districts du Donbass, instaurée pour trois ans depuis le 18 octobre. Si ce point faisait partie des accords de paix, signés le 5 septembre à Minsk (Biélorussie) par les représentants des insurgés et des autorités ukrainiennes, pour les habitants de Galicie, c’est une nouvelle désillusion. Le pouvoir ne tient pas les engagements annoncés au sortir de la révolte de Maïdan, déclenchée un an auparavant. Lviv a été l’un des moteurs de ce mouvement qui a débouché sur le renversement de l’ancien président Viktor Ianoukovitch (pro-russe, JPR). Ce mécontentement pourrait bien relancer les protestations. La guerre a permis de voiler, un temps, les difficultés économiques et les promesses non tenues. « Mais quelle forme prendrait ce mouvement dans une société en guerre, marquée par les divisions et la violence ? », s’interroge Elena Tchaltseva. Mardi dernier dans les rues de Lviv, des milliers de personnes sont descendues célébrer le 72e anniversaire de la création de l’UPA (milice ukrainienne qui collabora aux massacres de juifs et de Russes avec les forces nazies). Le même jour à Kiev, 4.000 d’entre elles, épaulées par des volontaires de la garde nationale, issus de bataillons Azov et Aydar (accusés de crimes de guerre), ont tenté de prendre le Parlement. Cette mobilisation effraie une partie des hommes politiques et des Ukrainiens qui assistent impuissants à la montée de forces fascistes. « Leur retour vient de la banalisation de leurs idées par les pouvoirs successifs qui ont voulu siphonner les voix de Svoboda. Le gouvernement actuel va plus loin en déposant un projet de loi qui reconnaît les combattants de l’UPA comme des héros », dénonce Anatoli Sokoliouk, du Parti communiste d’Ukraine (KPU). Ce troisième Maïdan, ne sera pas progressiste.

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