Articles‎ > ‎7. Histoire d'ailleurs‎ > ‎PECO‎ > ‎

Frontières PECO (4ème partie) : La Pologne et sa frontière orientale (Biélorrusie, Galicie-Ruthénie)(atlas)

publié le 19 oct. 2013, 05:13 par Jean-Pierre Rissoan   [ mis à jour : 4 janv. 2019, 08:52 ]

    Cet article qui concerne, en réalité, la "ligne Curzon" a pour objet de préparer le traitement du sujet. Il vise à mettre les idées en place, il pourrait s’intituler "l’état de la question avant 1914". La Pologne a disparu comme Etat mais évidemment pas comme nation. Les Polonais sont dispersés entre l’empire russe et celui d’Autriche-Hongrie. Aussi dans la Prusse du II° reich (Posnanie et soi-disant Prusse occidentale) mais cela ne concerne pas le thème de la frontière orientale.

LA FIN DE L’ÉTAT POLONAIS

    La carte suivante montre cet état de fait : la Pologne n’existe plus.

   

Certes, il y eut "le royaume de Pologne", créé au congrès de Vienne, 1815, dont le roi n’était autre que… le Tsar de toutes les Russies ! Mais après la révolte de 1863 et sa terrible répression, le dit "royaume" disparut et l’on ne parla plus officiellement que de la "région de la Vistule" qui, écrit Beauvois historien de la Pologne, "n’avait plus aucune autonomie". Mais on trouve encore dans nombre de documents d’époque, le mot "royaume", pour dire la Pologne.



En Allemagne, les Polonais sont nombreux dans la région appelée Posnanie ainsi que dans la Prusse occidentale, appelée ainsi par les Prussiens, par référence à la Prusse orientale, mais le fond de peuplement est polonais. Nombreux par ailleurs sont les Polonais en haute-Silésie. Du côté autrichien, c’est en Galicie qu’il faut aller pour trouver le peuple polonais. Voyez la ville de Cracovie. C’est le "royaume de Galicie" dont le roi n’est autre que l’empereur François-Joseph 1er bien connu des admirateurs de l’impératrice Sissi.


LA RECONSTRUCTION

    En 1918, la Pologne ressuscite. Son principal support est la France de Clemenceau, France nationaliste et anti-bolchevique. La nouvelle Pologne doit être la clé du système monté contre l’homme au couteau entre les dents, d’une part, et contre l’ennemi héréditaire germanique d’autre part.

    

    La carte ci-dessus montre comment le nouvel État a fait sa place contre ses voisins. La carte est mal conçue qui mêle deux thèmes : celui de la restauration territoriale et celui de l’agitation sociale/action révolutionnaire.

    Tant en Allemagne qu’en Autriche - Cisleithanie, avant 1914, il y avait des députés élus au suffrage universel. De même, il y avait des soldats et officiers polonais mobilisés, dont le corps d’armée autrichien-polonais dirigé par Pilsudski par exemple : tout cela suffit pour installer un gouvernement provisoire qui organise des élections pour une constituante. L’aide de la France est garantie.

    Beaucoup de Polonais, sans doute façonnés par le traditionalisme catholique qui coule dans leurs veines, sont vigoureusement nationalistes, et, à l’instar de notre comte d’Artois, "n’ont rien appris, ni rien oublié". Autrement dit, ils veulent ressusciter la Pologne, mais celle de 1772 ! Beauvois nous parle de la Liga polska, créée à la fin des années 1880, dans la clandestinité, "qui prônait toujours la Grande Pologne de 1772". Tous les auteurs sont d’accord sur ce point. Et ces Polonais impérialistes avaient le soutien de la France dont le ministre des Affaires étrangères, S. Pichon, disait, à la conférence de Versailles, que la Pologne était "tous les territoires qui formaient le royaume de Pologne avant le premier partage de 1772". Plus réalistes, les Anglais répliquèrent "Nous nous sommes engagés à reconstituer une Pologne composée uniquement de Polonais".

    Cette agressivité polonaise explique que l’Etat ressuscité fera la guerre, des guerres : contre l’Allemagne en Posnanie et Haute-Silésie, guerre polono-ukrainienne, guerre contre la Lithuanie, guerre russo-polonaise. 

    Concernant la frontière orientale, il faut considérer les héritages selon qu’ils se situent dans l’ancien empire russe des Romanov ou dans l’ancien empire austro-hongrois des Habsbourg.


    HÉRITAGE DU CÔTE RUSSE

  



     Feu le royaume de Pologne, dessiné au congrès de Vienne (ci-dessus), avait une frontière orientale qui le séparait du reste de l’empire russe. Déjà, on s’appuyait sur quelques frontières naturelles : ainsi la rivière Bug qui arrose la ville de Brest - Brest-Litovsk -, la rivière Narew, affluent de la Vistule, le fleuve Niémen, au Nord. On remarquera que le gouvernement[1] de Bialystok avait été exclu du Royaume de Pologne.

    Cent ans après le congrès de Vienne, des experts russes confirmeront ce peuplement biélorusse de la région de Bialystok. 


    HÉRITAGE DU CÔTE AUTRICHIEN

    Le recensement de 1910 en Autriche-Hongrie avait bien distingué les Polonais (Poles dans la légende) et les Ruthènes (dénommés Ukrainians dans la légende de la carte) du royaume de Galicie. Cette carte est très nette sur ce point.


File:Austria Hungary ethnic.svg

    

    


    En fait, il était admis que la limite linguistique entre Polonais et Ruthènes -appelés plus tard Ukrainiens - passait par la rivière San, affluent de la Vistule qui arrose la ville de Przemysl (ancienne capitale de la Galicie). Le San, c'est le versant Baltique de la région. Przemysl contrôle la ligne de partage des eaux entre Baltique et Mer Noire. Il était également admis de distinguer la Galicie occidentale dominée par Cracovie, polonaise sans discussion, et la Galicie orientale, qui est la partie supérieure, carpatique, du bassin-versant du fleuve Dniestr qui se jette dans la Mer Noire. La ville de Przemysl avait été choisie comme capitale à cause de son situation stratégique : elle commande le passage entre le Dniestr et le bassin-versant de la Vistule. Carte ci-contre. On devine bien que le Dniestr fut une voie de pénétration pour les peuples venus de l'est.

    Ultérieurement, c’est Lwów (ou Lvov) qui sera choisie -Lemberg en allemand, Lviv en ukrainien-. Au recensement de 1910 (carte précédente), elle figure comme ilot de peuplement polonais dans une mer ruthénienne. Mais cela correspond au résultat d’un processus de colonisation. La Galicie orientale est ukrainienne. Par un accord secret (1915), l’Angleterre l’a promise à la Russie impériale en cas de victoire.

 annexe : Galicie et Ruthénie rouge

Voici deux textes qui donnent un aperçu sommaire de l'histoire de la Galicie. 


La Ruthénie rouge, ou Russie rouge (en russe Червонная Русь, en ukrainien Червона Русь, en polonais Ruś Czerwona, en latin Ruthenia Rubra ou Russia Rubra) est le nom qui a été utilisé depuis le Moyen Âge jusqu’à la Première Guerre mondiale pour désigner la Galicie orientale. À l’origine, la Ruthénie rouge désignait le territoire compris entre le Bug et le Wieprz. Cette région est mentionnée pour la première fois en 981, quand Vladimir 1er le-Grand de la Rus’ de Kiev reprend cette région à la Pologne de Mieszko 1er. En 1018, Boleslas 1er le-Vaillant récupère ce territoire qui sera repris par la Rus’ de Kiev en 1031. En 1340, sous Casimir III le-Grand, la région est reconquise par la Pologne suite à l’effondrement de la Rus’ de Halych-Volodymyr. Depuis cette époque, l’appellation Ruthénie rouge (en polonais Ruś Czerwona) est utilisée pour nommer le territoire allant jusqu’au Dniestr, avec Przemyśl comme ville principale. À l’époque de Ladislas II Jagellon, la voïvodie de Przemyśl a été rebaptisée voïvodie de Ruthénie (województwo ruskie), avec la ville de Lwów qui a progressivement pris l’ascendant sur Przemyśl. La voïvodie était subdivisée en cinq territoires : Lwów, Sanok, Halicz, Przemyśl et Chełm. La ville de Halicz a donné le nom de Galicie. Entre la Première et la Seconde Guerre mondiale, cette région a appartenu à la Pologne. Aujourd’hui, cette région est partagée entre la Pologne et l’Ukraine.Source : d’après http://fr.dbpedia.org/page/Ruth%C3%A9nie_rouge

 second texte :

Halicz, Halytch (en ukrainien : Галич) ou Galitch (en russe : Галич ; en polonais : Halicz), est une ville de l'oblast d'Ivano-Frankivsk, en Ukraine. Halytch est située sur le Dniestr, à 23km au nord d'Ivano-Frankivsk. Le nom de la ville serait d'origine celte, une trace laissée par les Galice à l'époque romaine. La ville a donné son nom à la région historique de Galicie, aujourd'hui partagée entre l'Ukraine et la Pologne. Déjà au IXe siècle Halytch fut un centre important des croates blancs. La première mention écrite de Halytch date de 898 à l'occasion du séjour du prince hongrois Álmos chez un prince de Halytch anonyme lors de la migration des tribus hongroises en Pannonie. Par la suite, Halytch fut la capitale de la principauté de Galicie, et après l'union de celle-ci avec la Volhynie (également appelée Lodomérie) sous Roman le Grand, Halytch devint la capitale du royaume de Galicie - Volhynie (plus tard Galicie - Lodomérie, JPR).Le déclin de la ville commença au XIIIe siècle avec les invasions mongoles. Sous Léon 1er de Galicie, le siège des rois de Galicie - Volhynie fut déplacé à Lviv. Après le décès du dernier roi de la dynastie fondée par Roman le Grand en 1340, la Galicie appartint à la Pologne. Lors du premier partage de la Pologne, en 1772, la ville de Halytch ainsi que toute la région furent rattachées à l'Empire d'Autriche pour former le Royaume de Galicie et de Lodomérie.

Après la Première Guerre mondiale, la ville devint polonaise, puis soviétique après la Seconde Guerre mondiale, et ukrainienne après la disparition de l’URSS. Malgré son passé prestigieux, Halytch est aujourd'hui une petite ville. Elle a aussi compté des groupes religieux différenciés : Église grecque-catholique ukrainienne, Église catholique romaine en Ukraine, Juifs rabbanites, karaïtes.

Source : d’après Wikipaedia (article Halytch)

voir la carte n°11 de Frontières PECO 2ème partie. Pologne ou la République des Deux Nations. Disparition & renaissance.  où l'on voit la dénomination Rotrussland - Russie rouge - sur un atlas historique allemand.

 









[1] Division administrative de la Russie qui correspond, mutatis mutandis, à nos préfectures de région. En Pologne ce seront les voïvodies.

Commentaires