A
l’occasion du festival de Cannes, ARTE vient de programmer
« Le vent se lève » de Ken Loach. Le film est également au programme du
festival LUMIÈRE 2012 à Lyon, en octobre. Palme d'or à Cannes.
Le film s’appuie sur des bases historiques solides, le
cinéaste amplifie le côté dramatique des évènements en faisant s’opposer deux
frères dont l’un est amené par la force des choses, par une nouvelle raison d’État, à faire exécuter l’autre.
le film débute par des scènes
d'une violence atroce qui ne laisse aucune hésitation sur l'emploi du
qualificatif de fasciste qu'on peut utiliser quant au comportement de
l'armée d'occupation anglaise. La cause ? les jeunes Irlandais ont
pratiqué un jeu de polo or les réunions publiques entre Irlandais sont
interdites... La révolution patriote contre l’occupant anglais - et K.
Loach montre avec une détermination sans égale l’atrocité de son comportement
(atrocité séculaire) - la révolution s’amplifie progressivement mais des
contradictions apparaissent : faut-il la prolonger vers une révolution
social(ist)e au risque de perdre le soutien d’Irlandais patriotes mais
« bourgeois » ? ou bien faut-il se satisfaire d’une révolution
nationaliste qui chassera les Anglais mais laissera intacts les rapports de
classes entre Irlandais ?
Faut-il accepter le
compromis proposé par le
gouvernement anglais - mais c’est accepter la partition de l’île - ou
continuer
la lutte jusqu’au bout ? mais c’est risquer de voir l’ennemi revenir
avec
encore plus de férocité. Finalement, la guerre civile entre Irlandais
s’ouvre
et l’on voit les victimes d’hier devenir les nouveaux bourreaux de leurs
compatriotes radicaux. La lutte est engagée entre les Irlandais qui
acceptent le traité de paix avec Londres (traité qui scinde l’Irlande en
deux parties, qui reconnaît le rôle symbolique du Roi d’Angleterre) et
qui laisse l’Irlande dans le même état social ; "on colore notre île du vert républicain, mais pour le reste on fait comme les Anglais"
dit un opposant au traité. Une séquence montre l'ampleur des désaccords
entre Irlandais. Un tribunal révolutionnaire - irlandais - juge le
différend entre un propriétaire et sa locataire très âgée, en gros
retard de paiement du loyer. Les intérêts cumulés sur la dette de la
locataire atteignent le taux de 500% : la présidente estime que c'est de
l'usure et condamne le propriétaire a indemniser sa locataire. C'est le
monde à l'envers ! c'est la révolution ! C'est alors que les Irlandais
nationalistes emmènent avec eux le propriétaire pour "s’arranger" parce
que celui-ci a l'immense avantage, à leurs yeux, de financer leurs
achats d'armes. Le problème est bien posé, comme disait Robespierre,
droit de la propriété ou droit à la vie ?
Ken
Loach n'y va pas de main morte pour montrer la violence de la nouvelle
armée officielle du nouvel État irlandais. Ses soldats utilisent
strictement les mêmes méthodes que les Anglais. Par exemple : ils font
monter les habitants d'une ferme sur le même banc de pierre, bras levés,
comme le firent les soldats de sa gracieuse majesté au début du film
après la partie de polo si dérangeante.
La dernière partie du
film est donc une guerre civile, appelons les choses par leur nom.
C’est une nouvelle version du mythe de Saturne dévorant ses
enfants. les Révolutions engendreraient toujours des révolutions
secondes... On sait que le révisionniste F. Furet repris ce thème avec
ferveur : "des jacobins ont tué des jacobins"…Vice
rédhibitoire de toutes les révolutions.
Les deux frères -Damien le
socialiste, et Teddy le nationaliste- sont face à face, Damien sait où
se trouve une cache d’armes mais refuse de le dire. Teddy assume ses
responsabilités et condamne son frère à mort. Scène terrible. Je trouve cependant que K. Loach s’appesantit un peu trop sur cet
aspect des choses au point de laisser chez le spectateur un goût amer, pire, de
le détourner de toute révolution.
Les révolutions ne sont pas un
long fleuve tranquille. À qui la faute ? Si l’on veut éviter les
révolutions « torrentielles », comme dirait Hannah Arendt, commençons
par donner à tous et à toutes, le travail, la justice, la liberté et l’égalité.
La révolution deviendra inutile.
Mais on en est loin.
L'occupation anglaise sur l'Irlande peut-être qualifiée de terroriste voire fasciste.