Le
candidat FN du canton d’Algrange a bénéficié, c’est le moins que l’on puisse
dire, d’une large couverture médiatique pour sa campagne des cantonales. Il a
défrayé la chronique en se portant candidat d’extrême-droite alors qu’il était
secrétaire du syndicat CGT des agents territoriaux de la mairie de Nilvange[1].
Il
est évident que la communauté ouvrière a été ébranlée par cette usurpation.
Syndicats et partis ouvriers (PCF et PS) avaient à réagir. Je vais exposer les
résultats en ne citant que ceux des trois partis concernés : PS, PCF et
FN, les autres jouant un rôle secondaire.
Le
canton d’Algrange appartient à la Moselle sidérurgique et je renvoie à ma série
d’articles sur le département de la Moselle. Il y a une tradition d’accueil des
migrants y compris des étrangers dans cette partie du département
(arrondissement de Thionville) ce qui est moins le cas dans la Moselle du
charbon (arrondissement de Forbach) le recrutement ayant été ici plus local.
L’arrondissement de Metz présentait les mêmes caractéristiques que l’espace de
la Sidérurgie avec la nuance supplémentaire qu’à Metz, il y a une tradition
réformée (calviniste) qui a subi les persécutions louis-quatorziennes et a donc
une tradition libérale de tolérance. Tout cela est très succinct et mériterait
d’être affiné, mais restons dans le cadre restreint d’un article de blog.
Les
calculs que j’ai effectués apportent les éléments suivants :
-
Dans
l’arrondissement de Thionville, l’ensemble des cantons soumis à renouvellement
donnent 6,4% des inscrits (2011) contre 5,9 en 2004. Stabilité.
-
Dans
l’arrondissement de Forbach, les cantons concernés par l’élection passent
-globalement- de 8,8 à 9,8% des inscrits entre 2004 et 2011. Aggravation.
-
Dans
l’arrondissement de Metz, les chiffres sont de 7,1 en 2004 et de 8,9% en 2011.
"Percée médiatique".
Les
résultats du canton.
Le
canton d’Algrange, qui relève de Thionville, donne 7,4% des inscrits au FN
sur-médiatisé au lieu de 7,2% en 2004 avec un autre candidat plus obscur. Même
stabilité que dans le bassin sidérurgique. Le coefficient personnel de
l’individu concerné en 2011 n’a pas été d’un poids très lourd. Avec 23,4% des suffrages
exprimés (945 voix), il fait simplement un score mosellan (23,3% pour
l’ensemble des cantons du département soumis à renouvellement). Il rétrograde
de la 2° à la 3° place. "Contre toute
attente" écrit le Républicain lorrain, "il n’a pas pu se qualifier pour le second tour, malgré une
campagne portée par le buzz de sa conversion de l’extrême-gauche au
parti frontiste"[2].
Mais
le plus intéressant est le score obtenu par les deux partis ouvriers PS et PCF[3]. Le plus émouvant est le renfort/réconfort apporté au
Parti communiste français. En 2004, sur l’ensemble du canton d’Algrange, le
candidat de ce parti arrivait en 5° position avec 4,4% des inscrits et 9,6% des
exprimés. Loin derrière le candidat PS qui obtenait 2219 voix, 17,6% des
inscrits et 38% des exprimés. En 2011, si l’on utilise le vocabulaire des
médias, le communiste Patrick Péron, fait une véritable
"percée" : il arrive second de tous les candidats, dépassant le
très médiatique FN avec 27,5% des suffrages exprimés (multiplication par
trois), 8,7% des inscrits (multiplication par deux) et 1110 voix (x 2)[4]. Le candidat socialiste recule : 31,5% et 10%
des inscrits (1273 voix). Le FN est éliminé du second tour. Le communiste
effectue le désistement républicain et le socialiste obtient 100% des exprimés
au second tour. Exit le FN.
Voilà
la meilleure réponse que l’on pouvait apporter à l’usurpateur.
Et à Nilvange ? °
Comme
le candidat du FN était employé à la mairie de Nilvange, il est évidemment
intéressant d’y scruter les résultats. Petite présentation : "Nilvange :
ville de résidence ouvrière, au cœur de l'ancien bassin sidérurgique, qui a
culminé à 9.300 hab. en 1962 ; elle poursuit sa décroissance, perdant 240 hab.
de 1999 à 2005. 5.300 hab. aujourd’hui". La baisse de la
population est toujours le signe d’une crise économique grave. Inutile
d’insister.
A
Nilvange, le candidat socialiste reste largement en tête (43,9%). Le candidat
du FN passe de 12,2 à 22,2% des exprimés mais cela correspond à un gain en voix
faible : 226 v. en 2004 ; 278 en 2011. Le candidat P. Péron, PCF,
passe de 6,6 à 17,2% des exprimés -quasi triplement- avec 215 voix au lieu de
123 en 2004. Gagnant 92 voix il fait mieux que le FN qui n’en récupère que 52.
Conclusion ; la manœuvre politicienne du FN a
échoué. La réaction des électeurs a était saine et, espérons-le, salutaire. La
CGT sort confortée du scrutin.
[1] Syndicat qui vient d’être
dissous par la fédération CGT des services publics.
[2] Numéro du lundi 21 mars
2011.
[3] En Moselle, qualifier le
PS de parti ouvrier a plus de sens qu’à Paris…
[4] Cela dans le cadre d’une
abstention très forte comme partout ailleurs en Moselle et en France.