Les lecteurs
de ce site ont certainement suivi les débats de
la primaire socialiste, il est donc inutile de leur présenter Manuel
Valls.
Nous avons là un social-libéral à la Tony Blair. On sait que ce dernier
voulait
trouver le juste milieu, non pas entre le socialisme et le capitalisme,
mais
entre la social-démocratie et le capitalisme ! On connaît le résultat.
La
crise bancaire a été profonde en Grande-Bretagne, des banques ont coulé,
il a
fallu les repêcher avec l’argent public comme il se doit dans le cadre
de la
logique bien connue de la « privatisation des profits et de la
socialisation des pertes ».
Valls regarde
sur sa droite, c’est clair et il ne s’en cache
pas. Lors d’une édition du Grand journal de Canal+, il s’est exhibé avec
le
trop connu Lévy pour dire que deux dangers pouvaient venir dans cette
campagne
présidentielle : le FN et Mélenchon… Insulte systématique et indigne de
la
part d’un membre du parti socialiste.
Les primaires
qui viennent de se tenir ont donné des
résultats intéressants. Pour deux candidats, les discours étaient bien
tranchés : Valls et Montebourg. L’analyse de la géographie des votes est
féconde. Je vous renvoie à mon article sur le Rhône : lien Primaires
socialistes
: géographie électorale (cas du Rhône). Le journal Le Monde a
publié une carte étonnante qu’il faut observer et qu’il faut comparer
avec la
géographie des votes de droite à Paris.
J’ai prolongé
l’analyse en essayant de trouver les
pourcentages de Valls dans les communes les plus riches de France selon
les
travaux effectués par l’hebdomadaire L’Express, travaux qui m’ont fourni
un
échantillon que je « travaille » à l’issue de chaque élection pour
voir quel est le comportement de la bourgeoisie patronale lors des
diverses
échéances : consulter, par exemple, l’article QUI
VOTE ECOLO ?
Dans ces
communes, il y a bien sûr des militants et des
électeurs socialistes. Ces citoyens vivent au rythme des habitants de
leurs
communes. A Neuilly-sur-Seine qui a voté à 87% pour Nicolas Sarkozy, en
2007[1],
il n’est certes pas facile d’être de gauche et si on l’est, on opte pour
un
socialisme de respectabilité sous peine d’être ridiculisé par les
experts qui
courent les rues dans cette commune et qui savent mieux que quiconque
quels
sont les fondamentaux de l’économie. De l’économie capitaliste s’entend.
Il
convient par exemple d’éclater de rire lorsque Mélenchon parle du SMIC à
1.700€. Aussi bien, Valls obtient 23,3% des votes à Neuilly soit quatre
fois
plus que sa moyenne nationale.
Voici ses
résultats dans d’autres communes de mon
échantillon[2].
Communes
|
%
M. Valls
|
Marnes-la-coquette
|
13,0
|
St-Nom-la
Bretèche
|
19,0
|
L’Etang-la-ville
|
12,0
|
Le
Vésinet
|
17,0
|
Vaucresson
|
15,0
|
Croissy-sur-Seine
|
15,0
|
Les
Loges-en-Josas
|
14,0
|
Corenc
(38)
|
12,0
|
St-Cyr-au-Mt-d’Or
(69)
|
17,4
|
St-Didier-au-Mt-d’Or
|
17,4
|
St-
Ismier (38)
|
13,0
|
St-Marc
Jaumegarde (13)
|
12,0
|
Archamps
(74)
|
13,0
|
Paris
VIII°
|
16,9
|
Paris
XVI°
|
18,2
|
Paris
VII°
|
16,9
|
Lyon
VI°
|
09,3
|
France
|
06,1
|
Vaulx-en-Velin
(69)
|
02,8
|
Géographiquement,
le phénomène se retrouve partout. Socialement,
on voit quelle est la base politique du vote Valls. Les électeurs de
Vaulx-en-Velin -ville la plus pauvre de Rhône-Alpes selon l’Express- ne
s’y
sont pas trompés. Il est clair que ni Valls ni ses électeurs ne
souhaitent un
changement radical. La présence ou l’absence de ce leader dans un
gouvernement
Hollande aura une signification politique évidente.
Et cela
renvoie à la question qu’a posée Jean-Luc Mélenchon
et à laquelle il n’a pas été répondu : quelle sera la stratégie
d’alliance
-en cas de victoire, bien entendu, ne vendons pas etc…- du PS ? Le MODEM ou le FRONT
DE GAUCHE : il faudra choisir.
Le Maire de
Lyon s’est affolé en constatant le succès de
Martine Aubry -et notamment sa première place à Lyon alors que lui-même
appelait à voter Hollande- et il a déclaré : "avec le candidat le
plus identitaire de la gauche, on ne pourra pas
gagner. Si on a la volonté d’avoir un Président de la République (socialiste,
JPR) il faut choisir un candidat plus
rassembleur. Moi, on m’a dit trop centriste, trop ouvert, mais c’est la
ligne
qui m’a fait gagner"[3].
Voilà l’essentiel chez cette tendance du PS : gagner. Sur quel
programme ? Que faire de la victoire ? On verra bien. Gauche molle. En
avant vers une nouvelle déception pour l’électorat populaire.
A la veille
du second tout de ces primaires, à l’heure où
j’écris ces lignes, il est plutôt satisfaisant de constater que le vote
Montebourg a déplacé le curseur vers la gauche. C’est l’ampleur du vote
Front
de Gauche au premier tour qui forcera -démocratiquement- le choix des
socialistes. La crise est trop grave pour se contenter d’un simple
changement
de personnels politiques.
[2]
Il y a 38.000 communes et le PS n’a pas tenu 38.000 bureaux de vote.
Certaines
communes ont été regroupées et des communes de l’échantillon votaient
avec
d’autres communes plus pauvres. Le résultat du bureau de vote n’est dès
lors
peu ou pas exploitable.
[3]
LE PROGRÈS de Lyon, 12 octobre 2011.