QUAND UN SUJET DU BAC RELÈVE DE LA
PROPAGANDE
par
Jean Ortiz,
universitaire, "cubaniste".
Le
sujet d'espagnol langue vivante 1, pour les candidats au baccalauréat
des
sections S et ES 2012, relève de la basse propagande et non de la pensée
critique, du questionnement et de l'analyse ouverte, nécessaire... Les
impétrants doivent étudier un torchon tellement anti-cubain qu'il en est
ridicule pour qui connaît l'île, mais qui bourrera le crâne de ceux qui
doivent
prétendument y « réfléchir ». Peut-on réfléchir sur un tract du Front
national?
Les réalités cubaines sont si complexes, si évolutives, qu'elles peuvent
et
doivent se prêter à approches plurielles, à confrontations fondées,
contextualisées... Bienvenus le doute, la critique, la démarche
rigoureuse,
sourcée, bienvenue l'approche scientifique, en empathie ou hostile...
Mais pas
le torchon.
Les
candidats auraient pu réfléchir sur des auteurs cubains critiques ou
«révolutionnaires»
talentueux, dont il restera la qualité de l'écriture et souvent du
questionnement : Reynaldo Arenas, par exemple, violent, mais grand
écrivain,
pamphlétaire mais con arte, sans
parler du foisonnement passé et actuel de romanciers et poètes cubains
de
qualité. Les maîtres: Alejo Carpentier, Nicolas Guillen, Cabrera
Infante,
Lezama Lima.., et les générations d'aujourd'hui: Miguel Barnet, Leonardo
Padura, qui mériterait d'être nobélisé un jour, Anton Arrufat, Nancy
Morejon,
Abilio Estévez, Ena Lucia Portela, Reinaldo Montero, Julio Travieso,
Alexis
Diaz Pimienta... Aucun n'avait ou n’a le doigt sur la couture du
pantalon. Mais
aller chercher un médiocre auteur espagnol, en visite touristique dans
l'enfer
dictatorial cubain, où le Muchacho de
Camagüey (titre du texte), crèverait de faim et
terminerait en
prison, cela relève de la crapulerie intellectuelle, de la guerre
idéologique,
du cliché politicien usé, de la pensée unique,
Cuba
n'est ni le paradis socialiste, ni le goulag tropical. Mais son peuple,
sa
révolution, ses acquis, ses erreurs, ses manques, et son histoire de
luttes
pour l'indépendance, la dignité, la souveraineté, la justice sociale,
méritent
une vraie réflexion. Pas ce galimatias sassé et ressassé par la plupart
des
médias et, malheureusement, la plupart des intellectuels et enseignants
français, aux ordres, parfois même sans s'en rendre compte. Ce n'est pas
à Cuba
mais en France qu'un peuple a rejeté par référendum un traité
constitutionnel
qu'on lui a finalement imposé. Ce n'est pas à Cuba que la liberté
médiatique
relève de marchands d'armes, de canons, d'avions de combat, de
milliardaires du
bâtiment et des travaux publics... C'est l'Espagne de l'auteur du
torchon,
Luisgé Martin, qui possède le seul parc thématique fasciste au monde, le
Valle
de los Caidos, où est enterré le dictateur Franco (domaine et mausolée
franquistes entretenus aux frais des contribuables).
L'auteur
ou les auteurs du choix de ce sujet poubelle devraient avoir le courage
de nous
expliquer cc qui a motivé un choix si caricatural, mensonger, dénigrant,
si peu
conforme à la réalité cubaine, si contraire à notre esprit de la
Renaissance,
des Lumières, des philosophes, de la Révolution française... de notre
école
laïque et républicaine.
Oui
au pluralisme, à l'approche critique, plurielle... non à
l'embrigadement, à la
propagande libérale au sein du service public d'éducation nationale.